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... ils sont fusillés le 17 mars par leurs camarades, quelques heures avant que ne parvienne le résultat du recours en grâce commuant leur peine en travaux forcés. Le 14 juin 1915, après s’être fait soigner d’une blessure, Joseph Gabrielli, ne parlant que le corse, ne parvient pas à rejoindre sa compagnie. Il est condamné à mort pour abandon de poste et fusillé le jour même. Le 21 mai 1916, quatre soldats sont condamnés à mort à Roucy. Quelques jours plus tôt, ils avaient retardé d’une heure le départ de leur compagnie. Initialement condamnés à huit jours de prison, ils ont vu leur peine modifiée en condamnation à mort « pour faire un exemple ». Des récits semblables, glaçants, confondant d’injustice et confinant parfois à l’absurde, les historiens de la Grande Guerre en ont répertorié des centa...
... survie. Des millions d’hommes, dont la plupart étaient de simples civils, se battent sur plusieurs fronts. L’ennemi de la France n’est pas n’importe qui : il s’agit de l’Allemagne et de ses alliés, c’est-à-dire d’une puissance économique, industrielle et militaire considérable. Le traumatisme de 1870 habite les esprits. Une nouvelle défaite de la France aurait signifié la fin de notre pays. Les soldats mobilisés ont, au cours des combats, été confrontés à un niveau de violence inouï et inédit dans une guerre véritablement industrielle, marquée par l’emploi en masse d’armes très meurtrières et terrorisantes. Les conditions de vie des soldats étaient particulièrement rudes, comme le laisse entrevoir actuellement la guerre de tranchées en Ukraine. Nous savons dorénavant que de nombreuses vies on...
... de maintenir allumée la flamme du souvenir. Les monuments aux morts de nos communes retiennent les noms de ceux qui se sont battus pour défendre la patrie, des Ardennes aux Dardanelles. Il s’agit de lieux fondamentaux pour la République et pour la Nation. La Première Guerre mondiale a fait plus de 4 millions de blessés parmi les militaires de notre pays. Elle a tué près d’un million et demi de soldats français. De nos jours, même en ayant ces chiffres en tête, on peine à se représenter l’ampleur du massacre. Nombreux sont ceux qui ont donné leur vie pour défendre la patrie. Parmi eux, certains sont morts sous les balles françaises, condamnés à mort par une justice de guerre. Une justice qui n’offrait pas de procès équitable à l’accusé et qui a conduit à exécuter des déserteurs, mais aussi de...
...s de la discussion du texte à l’Assemblée nationale, M. Gosselin, député Les Républicains de la Manche, a évoqué le cas de l’instituteur Théophile Maupas, l’un des caporaux de Souain, défendu avec acharnement par sa veuve, Blanche Maupas, en lien étroit avec la Ligue des droits de l’homme, jusqu’à ce qu’une cour spéciale le réhabilite en 1932. Pour sa part, le président Sarkozy a reconnu que ces soldats « ne s’étaient pas déshonorés », car « ils étaient allés jusqu’à l’extrême limite de leurs forces ». N’oublions pas que la Grande Guerre a décimé nos villages. Les monuments aux morts nous rappellent, dans tous nos territoires, le coût humain de la guerre et la souffrance des familles. De nombreux conseils municipaux, départementaux ou régionaux, conscients de cette blessure, ont eux aussi dema...
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, comme tout texte législatif à dimension mémorielle, la proposition de loi que nous examinons est particulièrement sensible. Sur le fond, la question ici posée est de savoir quel statut nous devons, plus d’un siècle après les faits, accorder à 639 soldats de l’armée française ayant été condamnés pour désobéissance militaire par un conseil de guerre entre 1914 et 1918 et n’ayant pas fait l’objet d’un procès en réhabilitation durant les années qui ont suivi la fin de la guerre. Par leurs actes, ces 639 militaires exécutés ne sont, disons-le clairement et avec des mots crus, ni des héros ni des salauds. Ce ne sont pas des héros, car, si d’une cert...
...scipline collective fait partie intégrante de leur engagement. Toutefois, mes chers collègues, ce n’est pas vraiment ce dont il s’agit lorsque nous évoquons les fusillés pour l’exemple. Ils avaient 18 ans ou 20 ans et ils combattaient dans des conditions atroces. Le seul fait de gagner quelques mètres entre deux tranchées ou de ne pas en perdre pouvait entraîner la mort de plusieurs dizaines de soldats, l’espace d’un instant. Nous pourrions penser, de ce fait, que les fusillés pour l’exemple étaient ceux qui refusaient ce combat peu rationnel, où la discipline était l’alpha et l’oméga de l’engagement. Mais non, très majoritairement, ce n’est pas d’eux qu’il s’agit. Cette confusion ne peut exister. Les condamnés le furent principalement en retrait de la ligne de front, particulièrement en 1914...
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, dans un monde en feu où les grandes puissances se sont affrontées pour le partage des marchés et des ressources, pour la conquête de colonies ou pour la restructuration de leur sphère d’influence, la guerre de 14-18 fut une accumulation d’horreurs pour les soldats comme pour les civils. Durant ce conflit, des soldats français et immigrés furent exécutés dans le cadre de conseils de guerre improvisés, pour cause d’indiscipline militaire – refus d’obéissance, abandon de postes et désertion à l’ennemi –, tandis que d’autres furent abattus au détour d’une tranchée par un officier, à bout portant, soit pour rébellion, soit – je tiens à le rappeler avec émotio...
...ine des anciens combattants, le Mouvement de la Paix, l’Union pacifiste de France ou encore la Fédération nationale de la libre-pensée. Le sujet divise également les tenants d’une discipline garante de l’intégrité nationale, justifiant une sévérité exemplaire, ainsi que l’absence d’une quelconque remise en question de celle-ci, et ceux qui défendent une lecture humaniste, qui considèrent que ces soldats n’étaient ni des lâches ni des traîtres, mais des hommes qui avaient fait leur devoir, usés par la guerre et la violence physique et psychologique des combats, des soldats qui étaient allés au bout de ce qu’un homme pouvait endurer, qui ne comprenaient pas ou plus les objectifs et le sens de ces combats et de la mort certaine vers laquelle on les envoyait et qui ne méritaient certainement pas d’...
...avril 1921, qui instaurent un recours contre les condamnations prononcées par les conseils de guerre spéciaux au bénéfice des conjoints, ascendants et descendants jusqu’au quatrième degré, ont été votées à l’unanimité des députés. Outre ces deux lois d’amnistie, d’autres dispositions ont été votées, le plus souvent de manière transpartisane. La loi du 9 août 1924 permettant la réhabilitation de soldats exécutés sans jugement, une nouvelle loi d’amnistie votée le 3 janvier 1925, instaurant une procédure exceptionnelle devant la Cour de cassation, ou encore la loi du 9 mars 1932 créant une Cour spéciale de justice militaire, composée de magistrats et d’anciens combattants et compétente pour réviser l’ensemble des jugements rendus par les conseils de guerre. Les travaux menés durant cette périod...
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, examiner ce texte visant à réhabiliter les militaires fusillés pour l’exemple, c’est nous replonger non sans une certaine émotion dans l’un des épisodes les plus tragiques de la Première Guerre mondiale. En effet, en filigrane de ce texte, apparaît une certaine vision de l’histoire, celle du quotidien brutal et atroce des soldats dans les tranchées, dans la boue, sous la mitraille ennemie, la faim et la peur au ventre. C’est l’histoire touchante de « Ceux de 14 », comme les a nommés Maurice Genevoix dans ses récits rapportés du front de Verdun. Le poilu André Fribourg l’écrivait en 1915 au journal L ’ Opinion : « Voilà près d’un mois que je ne me suis ni déshabillé ni déchaussé. Je me suis lavé deux fois : dans u...
... qui jalonnent le passé de notre nation, pas un n’a plus profondément façonné le territoire et la société de mon département de l’Aisne – de notre département, madame la présidente – que la Grande Guerre. Dans la commune de Fontenoy, berceau de ma famille paternelle, il y a une histoire qui se transmettait de génération en génération et qui m’avait glacé le sang lorsque j’étais enfant : celle du soldat Lucien Bersot, âgé de 33 ans, qui a été évoquée par nos collègues Gréaume et Vaugrenard. Il avait été mobilisé au 60e régiment d’infanterie, puis envoyé sur le front de l’Aisne dès l’hiver 1914. En février 1915, le jeune soldat portait toujours le même pantalon de toile blanc qui lui avait été remis à la mobilisation. Grelottant de froid dans les tranchées, il demanda l’autorisation de recevoir ...
...ur de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », à la Mission du centenaire de la Première Guerre mondiale, qui a effectué un travail important dans nos territoires et départements respectifs, auquel ont participé les représentants des associations patriotiques de mémoire. Cette proposition de loi sur la réhabilitation collective des fusillés pour l’exemple concerne 639 soldats. Dans le département des Ardennes, que je représente avec ma collègue sénatrice Else Joseph, j’ai pu rencontrer, il y a environ un an, un certain nombre d’associations et de collectifs, notamment la Ligue des droits de l’homme. La notion de devoir de mémoire, de respect et de reconnaissance a été largement rappelée. Depuis de nombreuses années, différentes actions ont été menées avec le concour...
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je souhaite m’adresser à mes collègues les plus réticents à voter cette proposition de loi, en insistant sur ce qu’elle n’est pas. Ce texte ne vise pas réhabiliter des traîtres, des espions ou des déserteurs – aucun des soldats figurant sur la liste des 639 fusillés pour l’exemple de la Première Guerre mondiale n’a été reconnu comme tel. Nombre de ces condamnés pour refus d’obéissance ou abandon de poste ont en réalité commis des actes bien compréhensibles, comme celui de s’endormir à leur poste, de se replier parce qu’ils n’avaient plus de munitions ou de méconnaître un ordre qu’ils n’avaient pas entendu ou mal compr...
...mmes plus en mesure d’examiner individuellement le cas de ces 639 fusillés. Surtout, nous ferions fausse route en continuant d’affirmer qu’ils ont été fusillés « pour l’exemple ». Je crois que personne ne remet en cause le fait qu’ils l’ont été en vertu d’une décision politique, afin d’éviter que l’armée française ne recule. Ils ont été en réalité fusillés pour la France, j’y insiste. Comme les soldats que l’on a envoyés prendre des tranchées infranchissables, ils ont été fusillés parce qu’il fallait gagner la guerre. Et ils ont payé de leur sang cet objectif. Les réhabiliter aujourd’hui ne peut prendre la forme d’un examen précis de chaque cas individuel : il nous faut avant tout reconnaître et tenir compte du fait que la décision prise par l’armée et l’État français à ce moment-là a consist...
Mes chers collègues, je formulerai deux remarques. La première concerne les 639 fusillés pour l’exemple. Ce chiffre ne sort pas d’un chapeau, mais d’un rapport du service historique de la défense (SHD), qui distingue très clairement les 639 cas que nous évoquons des soldats qui ont trahi ou refusé d’aller au combat. Il s’agit de faits parfaitement reconnus, issus d’un document du SHD, sur lequel nous fondons notre position. Je veux bien que l’on débatte de la réhabilitation de ces fusillés, chers collègues de droite, mais il ne doit pas y avoir de fausse polémique entre nous. On peut être pour ou contre, mais ne simulez pas une pseudo-incompréhension à ce sujet. ...
Nous proposons également qu’un monument national soit érigé à leur mémoire. Par cet amendement, nous voulons faire en sorte que ce texte puisse poursuivre son chemin et aboutir à une forme de réhabilitation des soldats injustement fusillés. Toutefois, force est de constater, mes chers collègues, que cet amendement de compromis a reçu une fin de non-recevoir en commission. Il faudra m’en expliquer les raisons ! Je l’ai pourtant présenté à M. le rapporteur en précisant que le texte proposé était intéressant et devait poursuivre sa route, et que notre initiative permettrait d’aboutir à une solution contournant l...
...itiques, de faire le vôtre, d’aboutir à une conclusion, voire de tourner la page. » Chacun le sait très bien, si ce texte, déposé par notre collègue député Bastien Lachaud et voté par l’Assemblée nationale, ne fait pas l’objet d’un vote conforme aujourd’hui, on en repoussera éternellement l’examen et il ne sera plus jamais discuté. Or l’enjeu, au-delà de ce débat, ce sont les familles de ces 639 soldats qui attendent une réhabilitation. En tant que rapporteur de ce texte, j’ai pris acte de la position de la commission et écouté les débats qui s’y sont déroulés – ils ont très bien été décrits –, mais je pense tout de même que le moment est venu de mettre un terme à cette histoire importante pour notre pays.
...es et sénateurs, avons aujourd’hui l’occasion unique de clore un chapitre douloureux de notre histoire. Au-delà de nos différences et de nos sensibilités, unissons-nous aux côtés de ces fusillés pour l’exemple, d’autant que vous savez tout comme moi qu’il n’y a plus aucun témoin vivant plus de cent ans après la fin de la guerre et que 20 % environ des dossiers sont manquants. Pensons à tous ces soldats qui ont vécu des situations extrêmes, qui les ont poussés à aller jusqu’au bout d’eux-mêmes. Il faut les réhabiliter ! Si nous décidons d’une réhabilitation au cas par cas, vous le savez très bien : on ne réhabilitera personne, et ce sera de notre responsabilité !
...un contexte de guerre, et non pour des actes réels qu’ils auraient commis. Le véritable artifice est celui qui consiste à proposer d’étudier les situations au cas par cas. Comme cela a été rappelé, une telle étude a déjà été engagée, et il a été démontré qu’il était impossible de la pousser plus loin, car les dossiers manquent. Procéder au cas par cas revient donc à ne réhabiliter aucun des 639 soldats. Jamais ! C’est l’honneur de l’armée et de la France que de réhabiliter ces fusillés dont on sait qu’ils ont été condamnés pour l’exemple.