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...faux Cranach, faux Miro, faux Picasso, faux Chagall, fausses antiquités, faux meubles Boulle ou faux sièges XVIIIe : les dernières années ont été marquées par la révélation de nombreuses affaires de faux. Si le phénomène des fraudes artistiques n’est pas nouveau, il semble aujourd’hui en pleine expansion. La hausse de la demande, l’explosion des prix sur le marché de l’art et l’essor de la vente d’art en ligne contribuent sans doute très largement à doper et à faciliter ce type d’escroqueries. Aucune forme d’art n’est épargnée et la nature des fraudes se diversifie. Loin de se réduire à la fabrication de fausses œuvres d’art, ces fraudes prennent aussi la forme de faux certificats attestant d’une fausse authenticité, mais aussi, de plus en plus, d’une fausse provenance. L’office central de l...
Je commencerai par une question : connaissez-vous Mark A. Landis ? Sa vie, qualifiée de « hors du commun » outre-Atlantique, a été quasiment consacrée à une seule activité : réaliser de fausses œuvres d’art, en prenant appui sur les catalogues des musées américains. Mais là où l’histoire devient mordante, c’est qu’il n’agit pas ainsi dans le but de s’enrichir : il donne, gratuitement, ses faux aux musées qui, pendant plus de vingt ans, ne remarquent rien. Finalement démasqué par un conservateur perspicace, il fera l’objet d’un documentaire, Le F aussaire, diffusé en 2015 au cinéma. Et, quand...
...ce de qualités préexistantes, ce qui permettait au vendeur de dénoncer le contrat. Par ailleurs, la loi Bardoux était inspirée par une conception très académique des beaux-arts, qui fut rapidement dépassée par l’évolution de la pratique artistique. En 1913, Marcel Duchamp expose sa roue de bicyclette et, plus tard, sa fontaine, en posant la question : « Peut-on faire des œuvres qui ne soient pas d’art ? ». En l’occurrence, ce qu’interroge Marcel Duchamp, c’est le statut de l’artiste et de l’œuvre, et c’est dans ce questionnement que réside la démarche artistique. La notion d’authenticité n’a alors plus aucun sens. Avec cet exemple est rapidement abordé le problème juridique complexe des relations entre la législation du patrimoine et celle de la propriété intellectuelle. L’auteur conserve des...
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je ne sais exactement ce qu’est un faux. Je ne sais précisément ce qu’est un bien culturel. J’ignore la différence réelle entre un plagiat et un pastiche. Mais je sais reconnaître une œuvre d’art quand j’en vois une. Et je peux dire que ce texte en est une. Une œuvre d’art authentique. Une œuvre de dentelle, ou d’orfèvrerie juridique, pour filer la métaphore. Car elle nous entraîne dans un univers de droit où chaque concept doit être bien pesé et où la subtilité le dispute à la finesse. Monsieur Fialaire, en tant qu’auteur et rapporteur de ce texte, vous me permettrez de vous dire : chap...
...ssion est à la pensée. Cet équilibre fragile entre la nécessité de protéger les œuvres contre leur exploitation frauduleuse et le principe intangible de liberté de création doit donc être recherché en priorité. C’est ce que le groupe du RDSE a désiré atteindre, sous la plume de Bernard Fialaire et au travers de ce texte, en focalisant notamment la répression sur les atteintes portées aux œuvres d’art elles-mêmes, et non sur la seule protection de l’acheteur ni sur les seuls aspects contractuels. Le faux artistique ne devrait-il pas être pensé comme une atteinte à la vérité – et de surcroît à l’intérêt général – plutôt que comme une atteinte à un intérêt particulier ? À l’heure de la démocratisation et de l’internationalisation du marché de l’art et alors que la loi Bardoux se démarque par s...
... de faux. Comme le souligne justement la proposition de loi, le recours aux dispositifs existants, comme ceux qui sont prévus pour lutter contre l’escroquerie, le faux, la tromperie ou la contrefaçon, est impossible, car ces derniers ne sont pas tout à fait adaptés à la situation particulière des fraudes artistiques. Madame la ministre, les auteurs et leurs ayants droit, les acheteurs – amateurs d’art ou investisseurs –, les professionnels du marché de l’art, ainsi que les institutions dont l’activité se trouve parasitée, sont ainsi dans l’attente d’une réforme. À ce besoin criant d’actualisation de la loi, ce texte apporte une réponse nécessaire et attendue. Cependant, si les insuffisances de la loi Bardoux sont connues, sa réécriture s’annonçait particulièrement complexe.
Ce texte apporte en effet une réponse pénale adaptée, qui prend en considération la diversité des œuvres d’art circulant sur le marché. À partir des travaux menés en commission, plusieurs amendements ont été adoptés en vue de clarifier les nouvelles règles et d’éviter certains effets collatéraux relevés lors des auditions. L’approche retenue place au centre du dispositif non plus les droits qui lui sont attachés, mais l’œuvre en elle-même. Elle vise à assurer un équilibre entre protection des œuvres et ...
...ique, dont témoigne l’Office central de lutte contre le trafic des biens culturels. La loi Bardoux limite l’incrimination à certains types de cas. Premièrement, elle ne concerne que les œuvres de peinture, sculpture, dessin, gravure et musique. Cette considération énumérative de l’art est aujourd’hui très limitée au regard de la grande diversité de la création artistique. Deuxièmement, l’œuvre d’art en question doit présenter une signature apocryphe ou un nom usurpé. Or les pratiques de falsification sont de plus en plus complexes et imaginatives. Troisièmement, enfin, l’œuvre ne doit pas être tombée dans le domaine public, ce qui relègue dans l’oubli un vaste pan de l’art. Les peines prévues par la loi de 1895 en cas d’infraction sont bien trop faibles et éloignées de celles qui sont prév...
...tion de loi alourdit considérablement les peines et prévoit des circonstances aggravantes lorsque les faux sont réalisés au détriment d’une personne publique ou commis en bande organisée. La rédaction proposée élargit enfin la qualification du faux. Nous serons toutefois très attachés à trouver un meilleur équilibre entre la protection des droits patrimoniaux des collectionneurs et des marchands d’art et la protection des artistes. Le droit d’auteur est un corollaire de la liberté d’expression artistique. Il ne doit pas devenir une entrave à la création. C’est pourquoi nous présenterons des amendements destinés à exclure la destruction des œuvres jugées comme faux, en considérant que ces dernières peuvent disposer d’une valeur intrinsèque, autonome de l’identité de l’artiste, même faussaire....
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, depuis la promulgation de la loi Bardoux voilà cent trente ans, les choses ont bien changé dans le monde de l’art. La technologie a complètement transformé le marché et les moyens par lesquels les œuvres d’art sont créées et vendues. On a vu l’apparition et l’essor de nouvelles technologies telles que la 3D ou les NFT, ces jetons numériques qui ont permis de numéroter et de rendre chaque œuvre unique. Malheureusement, la loi Bardoux et le droit commun en général ne se sont pas toujours enrichis ni adaptés à ces changements. De fait, les artistes sont de plus en plus exposés aux fraudes et à la contre...
...applicables à tout marchand ou commissionnaire qui aura sciemment recélé, mis en vente ou en circulation les objets revêtus de ces noms, signatures ou signes ». La réécriture proposée dans cet amendement est beaucoup plus large que ce que prévoit le droit actuel. Elle vise non seulement la vente, mais également la présentation, la diffusion ou la transmission à titre onéreux d’œuvres ou d’objets d’art. L’interdiction faite de tromper par quelque moyen que ce soit sur l’identité du créateur ne doit pas être prise à la légère, car elle pourrait se retourner contre les artistes qui se décideraient à créer sous un nom d’emprunt. Ce fut par exemple le cas de Marcel Duchamp, quand il signa sa fontaine « R. Mutt », de Romain Gary, dissimulé derrière Émile Ajar, ou encore des Daft Punk, dont on ne c...
...s, à commencer par la copie, dans la mesure où la simple intention d’attribuer l’œuvre à un autre pourrait être sanctionnée. J’ajoute que la rédaction du texte de la commission ne remet pas en cause, à mes yeux, la possibilité, pour un artiste, d’utiliser un pseudonyme. On pourrait d’ailleurs considérer que les différents pseudonymes utilisés par un artiste sont partie intégrante de son identité d’artiste. L’infraction doit permettre de sanctionner les seuls cas dans lesquels l’identité d’un créateur, qu’il s’agisse de son vrai nom ou de son pseudonyme, a été usurpée. Enfin, sur la forme, la rédaction proposée a pour effet de supprimer les mots « de tromper autrui sur », ce qui rend la lecture de la suite de l’alinéa impossible. La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à dé...
...les artistes à dévoiler leurs secrets de fabrication artistique, lorsqu’ils mettent en vente leurs œuvres. En mentionnant les tromperies sur la composition, c’est bien, par exemple, les tromperies sur les matières utilisées que nous avions en tête, si celles-ci sont mentionnées, ou encore les restaurations ou reconstitutions excessives qui ont pour effet de faire perdre à une œuvre ou à un objet d’art son caractère authentique. On peut aussi penser à la fabrication de faux meubles, en utilisant des matériaux anciens. Il me semblerait regrettable que des escroqueries de ce type ne puissent pas être sanctionnées. D’ailleurs, le terme de « composition » est repris du décret Marcus qui impose aux vendeurs la délivrance de certificats d’authenticité contenant les « spécifications qu’ils auront ava...
... juge par la proposition de loi de prononcer la destruction de l’œuvre qui aurait été reconnue comme un faux. Je comprends parfaitement cette inquiétude et ce sujet complexe nous a d’ailleurs beaucoup occupés durant nos travaux et a été largement évoqué dans les auditions que nous avons organisées : la destruction n’est pas un outil à manier à la légère. Il ne serait pas acceptable qu’une œuvre d’art simplement revêtue d’une signature apocryphe soit détruite, car, à l’exception de cette signature trompeuse, elle reste l’œuvre originale d’un artiste qui mérite d’être rétabli dans ses droits. Surtout, si la signature peut être retirée, il n’y a aucune raison que l’œuvre ne puisse pas être remise sur le marché. C’est la raison pour laquelle le texte de la commission se contente de donner un pan...
...’est peut-être parce que ses fondements étaient solides, mais c’est aussi parce que la matière est particulièrement complexe. Il fallait donc sans doute, de la part des parlementaires qui voulaient s’attaquer à ce monument législatif, un brin d’innocence ou d’insouciance – c’est tout le mérite de Bernard Fialaire ! Albert Einstein disait que rien n’est plus proche du vrai que le faux. En matière d’art, c’est particulièrement exact et tout le mérite de ce texte, notamment dans son article 1er, est d’arriver à définir à partir de quel moment une intention devient malveillante et un acte répréhensible. La matière est tellement complexe qu’au fil de nos travaux la rédaction de la proposition de loi a évolué. Je crois que cet approfondissement était nécessaire et qu’il permettra au texte de poursu...