Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 7 juillet 2008 à 22h00
Modernisation de l'économie — Article 23

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

Je ne reviendrai pas sur la création d’une nouvelle autorité qui serait indépendante, car nous avons dit tout à l'heure tout le bien - plutôt tout le mal - que nous en pensions ! Je me contenterai d’aborder le problème posé par le transfert de compétence de la DGCCRF vers cette nouvelle autorité.

L’article 23 précise que cette nouvelle autorité devrait disposer de moyens d’investigation renforcés pour exercer notamment les missions de contrôle des concentrations économiques. Or il s’agit de transférer – ai-je bien compris, car les chiffres cités sont fort différents d’une page à l’autre ? – une trentaine d’enquêteurs de la DGCCRF vers cette nouvelle autorité.

Cela pose un problème de cohérence, car l’organisation de la DGCCRF risque d’être mise à mal, alors même qu’elle permet, nous semble-t-il, de garantir une protection efficace au consommateur. Du reste, il ne nous a pas été démontré que le schéma retenu actuellement n’était pas performant. Je ne comprends donc toujours pas pourquoi on veut le modifier.

Nous craignons que la mission « concurrence » ne soit finalement abandonnée au profit du rattachement d’un corps d’enquêteurs de la DGCCRF à la nouvelle autorité. On supprimerait ainsi la tête de réseau, si je puis dire, alors que le réseau territorial est, nous le savons bien, extrêmement important pour déceler les pratiques illicites sur le plan local.

L’organisation actuelle de cette direction nous semble cohérente, même si elle est, à l’heure actuelle, un peu en « tuyaux d’orgue », c'est-à-dire avec des recoupements verticaux, mais sans transversalité. On aurait pu améliorer ce dispositif, mais vous avez opté pour une solution différente, monsieur le secrétaire d'État. Or, à nos yeux, le maillage territorial est très important, notamment pour ce qui concerne le contrôle des concentrations locales. Le fait de couper cette tête de réseau peut, à notre sens, affaiblir l’efficacité de ces contrôles.

De surcroît, et l’on ne m’a pas répondu sur ce point tout à l'heure, un processus de dépénalisation est en cours depuis quelques années et il semblerait qu’il soit encore renforcé cet automne, avec un projet de loi dont on nous annonce qu’il sera défendu par Mme le garde des sceaux. Tout à l'heure, j’ai fait référence à la commission présidée par Jean-Marie Coulon ; nous verrons alors quelle sera la traduction législative de son rapport. Toutefois, une dépénalisation exige un renforcement des pouvoirs de contrôle et de police. Il faut donc accorder des moyens supplémentaires aux services de la DGCCRF, ce qui n’est pas le cas avec cette réforme ; c’est même tout le contraire !

Pour conclure, le regroupement du service d’enquêtes avec l’autorité chargée de sanctionner les pratiques anticoncurrentielles ne remet-il pas en cause, d’une certaine manière, la séparation des pouvoirs ? De nombreux juristes que nous avons auditionnés s’en sont émus. C’est d’autant plus important aujourd'hui que certaines enquêtes n’ont pu être menées à leur terme ; je citerai, à titre d’exemple, une enquête sur les marges arrière de la pharmacie…

Vous le voyez, nous nourrissons un certain nombre de préventions sur ce transfert, qui justifient cet amendement de suppression.

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