Intervention de Luc Chatel

Réunion du 7 juillet 2008 à 22h00
Modernisation de l'économie — Article 23, amendements 664 27 1079

Luc Chatel, secrétaire d'État :

À ce stade de la discussion, je souhaite apporter un certain nombre d’éléments de réponse aux questions qui ont été évoquées lors de la défense de ces différents amendements et sous-amendements.

Que nous faut-il améliorer aujourd’hui ? L’articulation entre les moyens d’enquête et les moyens d’instruction. Vous avez d’ailleurs été nombreux, à l’occasion des débats budgétaires, à constater la lenteur des instructions dans les pratiques anticoncurrentielles.

Le système actuel ne fonctionne pas bien ; la création d’une autorité administrative indépendante doit nous permettre de l’améliorer fondamentalement, puisque les enquêtes et les instructions seront intégrées au sein de cette autorité administrative indépendante. Pour qu’elle puisse exercer ses pouvoirs, nous allons effectivement transférer à cette autorité une trentaine d’agents enquêteurs de la Direction nationale des enquêtes de concurrence, de consommation et de répression des fraudes des services de la DGCCRF.

Les agents qui ont la responsabilité du contrôle des concentrations seront également transférés, car ils seront nécessaires à l’Autorité.

Pour autant, nous n’enlevons pas à la DGCCRF tous ses moyens d’enquête et d’action, puisqu’elle poursuivra son travail au niveau local.

Il existe, dans le domaine de la concurrence, des pratiques anticoncurrentielles dont l’impact économique est absolument majeur. Je citais tout à l’heure les affaires qui ont été dénouées dans la téléphonie ; je citais des ententes dans le secteur des hôtels ou dans celui de la parfumerie. Mais d’autres ententes ou pratiques anticoncurrentielles organisées au niveau local sont tout autant préjudiciables aux consommateurs. En effet, lorsque quelques commerçants, artisans ou acteurs économiques d’une ville ou d’un bassin de vie s’entendent entre eux, il est tout aussi important pour les pouvoirs publics d’enquêter sur ces pratiques tout à fait inacceptables et très préjudiciables aux consommateurs. Cette deuxième catégorie d’affaires continuera à être de la responsabilité de la DGCCRF.

Le système sera donc plus efficace. L’autorité administrative indépendante sera dédiée aux grandes enquêtes nationales. Son rayon d’action sera important, puisqu’elle regroupera les services d’enquête et d’instruction. Quant au réseau décentralisé de la DGCCRF, plus proche du terrain, il continuera à remplir ses missions. Celles-ci seront d’ailleurs renforcées, puisque vous allez lui octroyer, mesdames, messieurs les sénateurs, un pouvoir de transaction pour mettre fin à certaines pratiques de dimension locale.

Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement n’est pas favorable aux amendements identiques de suppression n° 428 et 488.

Lors de la présentation de ce dernier amendement, un certain nombre de questions m’ont été posées sur la composition de la future Autorité de la concurrence. Elle comptera au total dix-sept membres : cinq personnalités qualifiées en matière de concurrence, cinq personnalités issues du monde économique, six magistrats –ils seront donc prépondérants – et le président de l’Autorité.

Comme vous pouvez le constater, une vraie logique préside à cette composition. Certes, le Conseil de la concurrence comptait huit magistrats, et nous passons à six. La diminution de leur nombre est due au fait que le rayon d’action des enquêtes de l’Autorité évolue, puisque, notamment avec le contrôle des concentrations, un certain nombre de missions seront désormais d’ordre administratif. La composition de l’Autorité est donc elle aussi de nature à évoluer.

Le Gouvernement est favorable à l’amendement de coordination n° 139 de la commission.

S’agissant du sous-amendement n° 664 rectifié, nous considérons qu’il est satisfait par le paragraphe XXI de l’article 27 issu d’un amendement déposé par M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale. Nous vous demandons donc de bien vouloir le retirer, madame Payet. Il en va de même du sous-amendement identique n° 1079.

Sur le sous-amendement n° 1082, le Gouvernement considère qu’il est également satisfait, dans la mesure où la disposition en question figure dans l’amendement n° 138 rectifié de la commission, dont l’adoption a permis d’introduire un article additionnel avant l’article 23. Celui-ci prévoit le transfert de la compétence du contrôle des concentrations à l’Autorité de la concurrence.

Je rappelle que cette mesure a également été renforcée par l’adoption de l’amendement de M. Retailleau, qui prévoit une disposition complémentaire en matière de contrôle des concentrations.

Monsieur Billout, le Gouvernement n’est pas favorable au sous-amendement n° 1080, qui concerne les concessions dans le domaine de l’eau.

En effet, le renouvellement de ces délégations doit s’effectuer dans le respect d’une procédure de mise en concurrence qui est issue de la loi Sapin. Cette procédure, qui garantit la transparence de l’attribution de ces délégations, réclame un délai de réalisation. L’adoption de la disposition que vous proposez, en rendant obligatoire l’examen consultatif de l’Autorité de la concurrence, prolongerait de plusieurs mois la procédure d’attribution ; le Gouvernement n’y est pas favorable.

Pour ce qui concerne le sous-amendement n° 671 rectifié bis, qui prévoit des dispositions particulières pour l’outre-mer, je rappelle que la nouvelle autorité disposera de moyens d’enquête propres. Ses enquêteurs auront vocation à rayonner sur l’ensemble du territoire, y compris les départements et les territoires d’outre-mer. S’ils avaient besoin de renforts, ils pourraient, le cas échéant, solliciter l’assistance des enquêteurs de la DGCCRF, qui sont répartis sur l’ensemble du territoire. Le Gouvernement considère donc que ce sous-amendement est satisfait et vous demande, madame Payet, de bien vouloir le retirer.

S’agissant du sous-amendement n 1081, il convient de rappeler que le Conseil de la concurrence peut entendre toute personne dont l’audition lui paraît susceptible de contribuer à son information. Par ailleurs, le droit d’intervention des tiers intéressés existe et sera maintenu.

En revanche, le Gouvernement est très réservé sur toute publicité de la procédure menée par l’Autorité de concurrence, car elle serait de nature à porter atteinte à la présomption d’innocence.

Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable.

Il émet également un avis défavorable sur les amendements n° 518, 520, 519 et 521.

L’amendement n° 693 vise à supprimer la compétence décisionnelle du ministre chargé de l’économie en matière de pratiques anticoncurrentielles.

Le Gouvernement émet un avis défavorable, car le projet de loi tend précisément à permettre aux services du ministre de l’économie de proposer aux PME concernées une transaction susceptible d’éteindre l’action publique devant l’Autorité de la concurrence.

C’est une disposition favorable aux PME : tout en respectant le principe du contradictoire, elle permettra d’éviter l’insécurité juridique due à la longueur bien connue des procédures devant les autorités chargées de la concurrence. On sait que les PME sont souvent mal armées pour affronter ce type de procédure concernant des affaires à fort enjeu, qui ne sont pas toujours traitées prioritairement par ces autorités.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.

Enfin, concernant l’amendement n° 429 rectifié, qui a pour objet de confier à la DGCCRF le soin de transmettre systématiquement à l’Autorité de la concurrence les indices de pratiques anticoncurrentielles, le Gouvernement considère qu’il est préférable que la DGCCRF transmette, plutôt que des indices, des preuves des pratiques anticoncurrentielles, c'est-à-dire qu’elle aille au bout des dossiers en question avant de les transmettre en totalité à l’Autorité de la concurrence.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable.

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