Intervention de François Marc

Réunion du 17 juillet 2012 à 14h30
Règlement des comptes et rapport de gestion pour l'année 2011 — Adoption définitive d'un projet de loi en procédure accélérée

Photo de François MarcFrançois Marc, rapporteur général de la commission des finances :

Merci, monsieur le président.

Concernant l’exécution du budget de l’État en 2011, je voudrais formuler quelques observations.

La première est que la crise et les réponses qui lui ont été apportées ont considérablement désorganisé les finances publiques et en particulier leur lisibilité. Les données doivent en permanence être retraitées pour refléter la réalité.

Ainsi, en apparence, les dépenses de l’État baissent, mais, si l’on neutralise l’effet du grand emprunt, elles augmentent.

En apparence, les recettes augmentent de 29 milliards d’euros, mais en réalité – une fois démontée la tuyauterie installée pour permettre la réforme de la taxe professionnelle – on s’aperçoit qu’elles sont stables par rapport à 2010 – à 255 milliards d’euros – et que leur progression spontanée est même en retrait de 3, 3 milliards d’euros par rapport aux prévisions.

Quant au déficit, il s’établit à 90 milliards d’euros et enregistre une amélioration spectaculaire de près de 60 milliards d’euros, qui doit être ramenée à seulement 14 milliards d’euros une fois pris en compte les effets du grand emprunt, qui a creusé de 35 milliards d’euros le déficit en 2010 pour majorer d’autant ou presque les ressources de trésorerie de l’État. Si l’on y ajoute la réforme de la taxe professionnelle et la fin du plan de relance, on a l’explication complète.

Conclusion : même si 2011 a marqué les dix ans du vote de la loi organique relative aux lois de finances, il n’est pas certain que l’on ait beaucoup progressé en matière de lisibilité des comptes publics…

Ma deuxième observation porte sur l’évolution des dépenses.

Je réserverai d’ailleurs l’analyse des recettes pour mon intervention dans le débat suivant, car c’est en appréciant les recettes au niveau consolidé et pas seulement à celui de l’État que l’on se rend le mieux compte du contraste entre le discours « anti-impôt » que tenait le précédent gouvernement et l’ampleur des hausses de prélèvements obligatoires qu’il a fait voter en 2011.

Le même contraste, par symétrie, s’observe en matière de dépenses. Le gouvernement précédent ne cessait de rappeler son souhait de maîtriser, voire de réduire les dépenses de l’État. Son candidat à la présidence de la République avait même retenu, dans son programme électoral, une trajectoire de retour à l’équilibre reposant à 80 % sur les efforts en dépense.

À la lumière de l’exécution 2011, on se rend compte du décalage entre la rhétorique et la pratique.

Vous le savez, l’État s’est doté de deux normes de dépense transversales. La première vise à stabiliser en volume le montant de l’ensemble constitué des dépenses de l’État et des prélèvements sur recettes. En loi de finances pour 2011, le Gouvernement affichait l’ambition non seulement de respecter cette norme de stabilité, mais d’aller plus loin en faisant reculer les dépenses de 0, 2 % en volume, en les plafonnant à 357 milliards d’euros. Ce volontarisme n’a pas complètement payé, puisque les dépenses relevant de cette norme se sont finalement élevées à 357, 4 milliards d’euros.

Le dépassement aurait pu être encore plus important si l’on n’avait pas recouru à des contorsions budgétaires, comme celle qui a consisté à attribuer à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, par le biais d’un fonds de concours, 400 millions d’euros qui auraient dû relever de la norme de dépense...

La seconde norme de dépense, celle qui stabilise en valeur les dépenses de l’État hors charge de la dette et pensions, est également dépassée.

Si l’on s’intéresse maintenant aux différentes missions qui composent le budget de l’État, on s’aperçoit que vingt sur trente ne respectent pas les plafonds fixés par la loi de programmation 2009-2011.

Si l’on s’intéresse, enfin, à l’évolution des dépenses en fonction de leur nature, et en particulier aux règles dont l’État s’est doté pour piloter l’évolution des dépenses de fonctionnement et d’intervention, il apparaît que l’objectif d’une réduction de leur montant n’a pas été atteint.

Prenons d’abord les dépenses de fonctionnement. Elles sont stables par rapport à 2010, à 46, 2 milliards d’euros, alors que la loi de finances prévoyait qu’elles diminueraient et s’établiraient à 43, 6 milliards d’euros. Elles ont donc dérapé de 2, 6 milliards d’euros, constatés sur les missions « Défense », « Culture » et « Écologie ».

Il faut aussi relever, au sein des dépenses de fonctionnement, que les subventions pour charges de service public représentent désormais plus de la moitié des dépenses de fonctionnement, ce qui illustre le poids croissant des opérateurs dans la mise en œuvre des politiques publiques.

Prenons maintenant les dépenses d’intervention, dont les unes – les dépenses de guichet – devaient être stabilisées tandis que les autres – les dépenses discrétionnaires – devaient être réduites.

On constate en exécution que les services comptables de l’État ne savent pas distinguer les unes des autres. Je me permets de le relever car je sais que le nouveau gouvernement souhaite conserver cette distinction pour l’avenir. Saura-t-on faire en 2012 ce qui n’était pas possible en 2011 ? On peut, monsieur le ministre, le souhaiter.

Du point de vue de la maîtrise des dépenses, les chiffres étaient plus encourageants puisque l’on constate une diminution de plus de 14 %. Mais cette fois encore, après correction, on s’aperçoit que la baisse résulte exclusivement des phénomènes comptables et des effets des investissements d’avenir et du plan de relance.

Cela étant, il est un poste de dépenses plus dynamique que les dépenses d’intervention, je veux parler de la charge de la dette, dont le montant a augmenté en 2011 de 14, 3 % et, avec 46, 3 milliards d’euros, a dépassé celui des dépenses d’intervention, et ce alors même que les taux sont restés très bas. Il s’agit d’une matière hautement inflammable, qui explique pourquoi il est vital que la crise de la zone euro ne s’étende jamais à la France.

J’en viens maintenant aux dépenses de personnel.

En 2011, les effectifs ont été réduits de 31 278 équivalents temps plein travaillés. De 2003 à 2012, plus de 183 000 emplois de fonctionnaires auront été détruits au total.

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