Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi de règlement des comptes intervient à un moment tout à fait particulier du calendrier politique : c’est un nouveau Gouvernement, soutenu par une nouvelle majorité, qui doit présenter les résultats de gestion de ses prédécesseurs.
On a vu le trouble que cela a jeté en commission des finances puisque, à ma grande surprise, il en est résulté un vote favorable des sénateurs socialistes et une abstention de nombreux membres du groupe UMP. C’est le monde à l’envers!
Permettez-moi de revenir sur les comptes de l’année 2011, avant de formuler quelques observations sur la certification par la Cour des comptes. Enfin, j’aimerais que vous nous précisiez, monsieur le ministre, la voie que vous comptez suivre pour redresser les comptes dans la justice, un objectif que nous partageons bien sûr tous !
Lorsque j’ai pris connaissance des résultats de gestion de l’année 2011 qui nous ont été présentés, ma première réflexion a été de me dire, de façon un peu triviale : « C’est mieux que si c’était pire ! »
D’un côté, il y a ceux qui se réjouissent d’un déficit inférieur aux prévisions de la loi de finances initiale, soit 5, 2 % du PIB. C’est un signal plutôt positif envoyé à nos créanciers.
De l’autre, il y a ceux qui déplorent la situation actuelle et accusent le passé, mais sans montrer le chemin du redressement.
Mes chers collègues, essayons d’y voir un peu plus clair.
Le taux de couverture de la dépense publique par nos recettes est négatif, à hauteur de 28, 2 %. Cela signifie tout bonnement que la puissance publique, en général, vit à crédit pendant 3, 4 mois de l’année, c'est-à-dire du 20 septembre au 31 décembre. Imaginez un salarié, un ouvrier, un employé ou un cadre qui ne percevrait aucune rémunération durant les trois derniers mois de l’année ! Il ne tiendrait évidemment pas longtemps…
Certes, les objectifs de réduction du déficit ont été meilleurs que ce qui a été annoncé, et c’est bien la première fois depuis 2008 ! Y ont contribué la disparition des dépenses exceptionnelles qui avaient creusé le déficit en 2010 et les recettes d’impôts sur le revenu et sur les sociétés qui ne progresseront peut-être pas tous les ans dans les mêmes proportions : elles ont augmenté respectivement de 5, 6 % et de 18 %. Même si de véritables efforts ont été consentis en 2011 pour maîtriser les dépenses et réduire le déficit, il est encore beaucoup trop tôt pour parler d’une amélioration structurelle de notre situation financière.
À ce propos, je voudrais insister sur les frais de personnel de l’État, la prévision de croissance et, bien sûr, l’endettement.
Le précédent gouvernement avait établi un principe de gestion clair : la règle du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. C’était l’un des piliers de feu la RGPP, la révision générale des politiques publiques.
Certes, on peut discuter du bilan de cette politique, mais elle avait au moins le mérite d’exister, et je pense, pour ma part, qu’elle allait dans le bon sens. Pourtant, et sans doute à cause de la trop grande générosité du précédent gouvernement dans la redistribution du surplus économisé, ce principe n’a pas permis de réduire les dépenses de personnel, y compris en 2011 : malgré la suppression de 30 000 postes environ, la masse salariale a encore augmenté.
La Cour des comptes n’avait pas manqué de rappeler dans un rapport de décembre 2009 que le principe du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite n’avait pas entraîné les économies escomptées et qu’il ne serait plus opérationnel après 2016 du fait de l’évolution démographique de la fonction publique.
Aujourd’hui, je suis inquiet d’entendre que le Gouvernement actuel abandonne ce principe et qu’il veuille vouloir stabiliser les effectifs et maintenir le pouvoir d’achat.
Avec ces annonces, il est clair que les dépenses de personnel, notamment avec le fameux GVT, le glissement vieillesse technicité, augmenteront bien plus vite que la croissance et continueront d’alimenter le déficit.
Concernant la croissance, nos prévisions sont presque toujours trop optimistes. Je rappellerai que nous avions prévu en 2011 une croissance de 2 %, qui s’est établie à 1, 7 % et, en 2012, une croissance de 1, 75 %, qui n’a été que de 0, 3 %.
En matière de budget, l’optimisme est à proscrire et la prudence doit prévaloir.
Il nous faut remettre à plat la construction de notre hypothèse de croissance initiale de manière à éviter les corrections à outrance de la prévision. Vous en conviendrez, mes chers collègues, mieux vaut une cagnotte qu’un déficit trop élevé. Aussi, je renouvelle ici ma proposition d’établir la prévision de croissance sur le consensus des économistes, avec moins 0, 5 point de PIB, à l’instar de ce qui se fait au Danemark.
Après la nécessaire réduction des dépenses de personnel et l’adoption d’une ligne claire sur les prévisions de croissance, il convient d’adopter un troisième principe : réhabiliter la rigueur !