Or n’est pas si loin le jour où la France se retrouvera contrainte de demander l’assistance de l’Europe au travers du Fonds européen de stabilité financière et bientôt du mécanisme européen de stabilité, le MES. Ce jour-là, ce ne sera plus devant nous, mes chers collègues, que le Gouvernement devra rendre des comptes, mais devant les fonctionnaires de la Commission européenne, de la Banque centrale et du FMI. J’en suis convaincu, aucun de nous, sur quelque travée que nous siégions, de gauche comme de droite, n’a envie de vivre de pareils moments, qui seraient forcément extrêmement douloureux.
L’enchaînement très négatif que nous observons depuis trente ans et qui apparaît très clairement dans ce projet de loi de règlement, avec l’augmentation des dépenses publiques et des déficits, l’explosion de la dette et la croissance permanente des prélèvements obligatoires, doit absolument être stoppé. Ce n’est pas la Cour des comptes qui dira le contraire : elle l’a suffisamment affirmé dans son dernier audit des comptes publics et elle nous offre un outil intéressant, mais encore perfectible : la certification des comptes.
La France est l’un des seuls pays au monde à faire certifier ses comptes par une juridiction indépendante, ce dont on doit se féliciter, même si le chemin n’a été parcouru qu’à moitié.
Depuis la première certification en 2006, belle initiative à saluer – rendons à César ce qui est à César ! –, le nombre de réserves substantielles émises par la Cour a presque diminué de moitié. Cela signifie que des efforts ont été réalisés. Félicitons-nous-en !
Toutefois, il semble, cette année, que les engagements de l’État plafonnent. Le nombre de réserves n’a pas diminué et, surtout, le montant du risque lié à ces réserves est très significatif par rapport au total du budget de l’État. Cela est dû aux incertitudes pesant sur les actifs et les passifs de l’État, qui posent des questions quant à la fiabilité des comptes qui nous sont présentés. Des réserves formulées voilà six ans n’ont toujours pas trouvé réponse ! Je pense notamment aux actifs et passifs du ministère de la défense. Dans le secteur marchand, il serait inimaginable de certifier les comptes d’une entreprise avec autant de réserves sur l’exhaustivité et la sincérité de ceux-ci.
Aussi, je m’interroge sur la méthode employée par la Cour des comptes. Avec autant de réserves substantielles, pourquoi la Cour n’en viendrait-elle pas, un jour, à refuser de certifier nos comptes ?
Ce risque existe, et ce serait alors un signal cataclysmique envoyé à nos partenaires européens comme à nos investisseurs.
Cette séance publique doit donc être l’occasion pour le Gouvernement de réaffirmer sa volonté de poursuivre les efforts en vue de lever progressivement toutes les réserves, de suivre les recommandations de bon sens de la Cour émises en matière de gestion et d’afficher, enfin, quelques principes de saine gestion financière. Or, sur ce point, il y a beaucoup de choses à dire.
Le précédent gouvernement avait au moins quelques principes de gestion, clairement énoncés et totalement revendiqués. Aujourd’hui, j’ai beau chercher, je ne vois pas ceux du nouveau Gouvernement. §
En la matière, comme sur d’autres sujets, j’ai l’impression qu’on navigue à vue. §C’est visiblement une pratique appréciée de notre nouveau président de la République...