Intervention de Jean-Pierre Sueur

Réunion du 7 juillet 2008 à 22h00
Modernisation de l'économie — Article 24

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

Cet article 24 est caractéristique, une fois encore, de l’idéologie qui préside à ce texte. Et l’idéologie est toujours déterminante, vous le savez bien, mes chers collègues.

Sur ce texte, il n’y a pas que les soldes qui sont flottantes, la pensée l’est aussi. Si l’on allait jusqu’au bout du raisonnement qui est implicitement ou explicitement tenu, il n’y aurait plus du tout, finalement, de périodes de soldes. Le mieux serait qu’il y ait des soldes permanentes. Ainsi, serait atteint l’objectif - non-dit mais tellement pensé qu’il affleure tout au long de ce texte - d’une déréglementation totale. Une idée se dégage de nombreux articles - nous allons y revenir -, qui est votre premier postulat : moins il y a de règles, mieux c’est.

Je me souviens du temps où les soldes étaient une sorte de fête, où l’on pouvait acquérir les objets invendus à des prix extrêmement modestes.

Désormais, ce sera cinq semaines fixes et deux semaines flottantes, et ces semaines vont tellement flotter que ce sera tout le temps. Or, comme vous supprimez subtilement les moyens de réprimer les pratiques de ceux qui auraient l’idée de ne pas respecter la loi, on arrive à l’empire du flou.

M. Jean-Paul Charié, rapporteur de ce texte à l'Assemblée nationale, que j’ai plaisir à citer, a écrit dans son rapport : « La réglementation des soldes ne correspond pas à l’évolution d’un commerce qui est passé d’un modèle fondé sur deux collections annuelles à un modèle inspiré notamment de grandes enseignes qui multiplient les collections ». Il y a toujours des collections ; il y a toujours des soldes et c’est toujours flottant ; donc, tout va bien !

Il n’y a plus d’obstacle dirimant puisque cette fameuse amende de 15 000 euros disparaît.

M. Jean-Paul Charié écrit, à propos de la suppression de cette amende : « Dans la mesure où la définition des soldes a évolué pour intégrer en elle-même la notion de période, la prohibition de l’utilisation du mot soldes ou ses dérivés dans les cas où cette utilisation ne se rapporte pas à une opération de soldes définie au I de l’article L 310-3 suffit à assurer le respect du régime des soldes. »

C’est absolument magnifique ! En d’autres termes, plus besoin de sanctions, le seul fait d’avoir connaissance de la prohibition – ce sera bien entendu de plus en plus difficile à déceler, comme nous serons dans l’univers du flottant -, suffira à faire peur à ceux qui ne voudraient pas appliquer la règle !

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