Intervention de Laurent Fabius

Réunion du 18 juillet 2012 à 14h30
Traité d'amitié et de coopération avec la république islamique d'afghanistan — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Laurent Fabius, ministre :

Quelques efforts ont été entrepris, mais il faudra aller beaucoup plus loin.

L’Afghanistan s’engage également à soutenir les institutions qui concourent à la relation bilatérale. Cela passe notamment par des exemptions fiscales et douanières au bénéfice de l’’Agence française de développement, l’AFD, et des ONG françaises impliquées dans la mise en œuvre du traité.

L’Afghanistan s’engage enfin à promouvoir l’enseignement du français dans le secondaire et le supérieur. Nous avons le plaisir de constater qu’un assez grand nombre de personnalités afghanes parlent le français, souvent pour avoir fait leurs études en France. Il faudrait cependant que la connaissance de notre langue se diffuse plus largement dans la population.

En pratique, la mise en œuvre du programme de coopération devra tenir compte de la capacité d’absorption de la partie afghane, des décisions des organes de gouvernance des établissements concernés, notamment l’AFD, ainsi que des conditions de sécurité en Afghanistan.

Nous avons voulu éviter, au travers de ce traité, la mise en place d’un cadre institutionnel trop pesant. En plus des consultations politiques, le traité prévoit la création de trois commissions mixtes autonomes, qui se réuniront une fois par an, alternativement à Paris et à Kaboul : une commission mixte de coopération pour le suivi des programmes de coopération, une commission mixte politico-stratégique et une commission pour la sécurité intérieure.

Le traité est complété par un programme de coopération quinquennal présentant de manière plus détaillée les projets qui seront menés au cours d’une première période allant de 2012 à 2016. Il a été paraphé par les ambassadeurs français et afghan en marge de la dernière visite du président Karzaï à Paris.

Ce traité doit nous permettre de bâtir une relation de long terme avec l’Afghanistan sur la base des secteurs d’intervention traditionnels de la France dans ce pays. Il tient compte de notre contribution aux actions des organisations multilatérales qui resteront sur place après 2014 : l’ONU, naturellement, mais aussi l’Union européenne et l’OTAN.

Mesdames, messieurs les sénateurs, dans les années à venir, alors que l’Afghanistan devra se reconstruire et se développer, ce traité d’amitié devrait nous permettre de conserver une place importante et d’illustrer ce que peut être une puissance d’influence comme la France.

Les prochaines années seront une période cruciale pour l’avenir de l’Afghanistan. L’histoire le montre, les Afghans n’ont jamais accepté la présence durable d’une force étrangère sur leur sol. C’est ce qui, depuis Alexandre le Grand jusqu’à l’Union soviétique, a donné à ce pays sa réputation de « cimetière des empires ».

Le retrait des troupes étrangères est une nécessité, mais la transition n’est pas sans risques : risque du chaos comme au début des années quatre-vingt-dix, risque du retour des talibans les plus extrémistes, lesquels avaient pris le pouvoir à Kaboul à la faveur de l’anarchie. Nous ne devons pas répéter les erreurs du passé en laissant ce pays livré totalement à lui-même, comme cela avait été le cas après le départ des soviétiques. Beaucoup de choses, il faut avoir l’humilité de le reconnaître, dépendront des pays voisins : le Pakistan, mais aussi l’Inde, l’Iran, la Chine, etc. C’est ce que l’on appelle traditionnellement, dans la diplomatie mondiale, le « grand jeu ». La communauté internationale doit donc rester engagée, mais sous des formes nouvelles, efficaces et préservant la souveraineté de l’Afghanistan. C’est l’objet de ce traité. Ce sera aussi l’objet, sur la base de ce dernier et des engagements internationaux de la France, de notre action politique aux côtés des représentants de toutes les composantes de la société afghane en vue d’ouvrir la voie à un avenir aussi stable et apaisé que possible pour tous les habitants de l’Afghanistan.

La ratification de ce traité est un acte important par lequel vous, représentants du peuple français, adresserez un message d’amitié à la population afghane. Le Parlement afghan devrait ratifier ce traité dans les prochaines semaines. L’ambition qui le sous-tend est à la fois simple et très élevée : ensemble, nous devons signifier que nous continuerons d’agir côte à côte, mais désormais essentiellement par une action civile de développement et d’appui à la mise en place d’institutions efficaces et démocratiques. §

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion