Monsieur le ministre délégué, la déréglementation européenne des services postaux et la mise en concurrence des opérateurs européens plutôt que leur coopération ont engendré la suppression de 300 000 emplois en Europe. En France, La Poste bat des records dramatiques en la matière : 80 000 emplois supprimés depuis 2002 dont près de 7 000 au cours du seul premier semestre 2011, cela représente un emploi sacrifié en moyenne toutes les heures, c’est-à-dire le plus grand plan de casse sociale de notre pays.
Pour justifier la réduction drastique des effectifs, la direction de l’entreprise invoque régulièrement la baisse du trafic de courrier. Pourtant, le groupe La Poste a enregistré un bon résultat en 2011 : son chiffre d’affaires a dépassé 21 milliards d’euros. Le secteur du courrier affiche même une stabilisation, alors que la diminution des volumes reste toujours nettement inférieure aux prévisions annoncées.
Cette course effrénée vers la rentabilité provoque de gravissimes dommages collatéraux. Ainsi, le syndicat professionnel des médecins de prévention de La Poste, qui représente la moitié de ces derniers, a fait part de ses inquiétudes à Jean-Paul Bailly, en dénonçant « des méthodes de management de La Poste » qui « créent des inaptes physiques ou psychologiques ».
Se heurtant à un déni constant de la part de la direction du groupe, ce syndicat dénonce régulièrement des suicides ou des tentatives de suicide, un mal-être au travail qui touche tous les niveaux opérationnels de l’entreprise et une explosion patente du nombre d’arrêts-maladie.
Au service courrier, la mise en place du plan de restructuration appelé « Facteurs d’avenir » a modifié le système de distribution. Le principe de « sécabilité » des tournées y érige désormais la flexibilité et l’auto-remplacement en mode de gestion du personnel.
Tous les dix-huit mois, dans chaque bureau de poste, les effectifs sont recalculés – à la baisse – en fonction de la diminution du volume de courrier attendu, de paramètres techniques mais aussi de normes de cadences qui déshumanisent le service rendu.
Toujours d’après les rapports médicaux, on remarque, subséquemment, une dégradation considérable de la santé physique – 60 000 postiers sont atteints d’affections péri-articulaires – et mentale des agents de ce service, qui voient les effectifs diminuer pour une charge de travail constante.
Monsieur le ministre, à mon sens, La Poste est devenue une bombe à retardement. On ne pourra pas dire qu’on ne savait pas. En outre, il convient de souligner que l’État est l’actionnaire principal du groupe, qui lui est lié à la fois par un contrat de plan et par un contrat de service public.
Au regard de cette situation, quelles mesures entendez-vous mettre en œuvre pour placer de nouveau l’humain au centre des objectifs du groupe La Poste et pour soumettre ce dernier aux exigences de qualité de service public et de travail exprimées par les personnels et les usagers ?