Intervention de Aurélie Filippetti

Réunion du 24 juillet 2012 à 9h30
Questions orales — Perspectives de la décentralisation des enseignements artistiques

Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication :

Madame la sénatrice, tout d’abord, je vous félicite pour le travail que vous avez accompli au service des enseignements artistiques spécialisés dans l’ensemble de nos collectivités.

Vous le savez, je souhaite mettre en œuvre un nouveau partenariat entre l’État et les collectivités locales en matière culturelle dans le cadre de l’acte III de la décentralisation annoncé par le Premier ministre. Il s’agira de mieux définir le rôle de chaque échelon et de viser à une cohérence accrue des politiques portées par chacun.

L’article 101 de la loi de 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales avait précisément pour objectif de favoriser le développement d’un enseignement artistique spécialisé mieux réparti et mieux coordonné sur l’ensemble du territoire. Il visait également à améliorer les formations professionnalisantes par la création du cycle d’enseignement professionnel initial, le CEPI, et du diplôme national d’orientation professionnelle, le DNOP, dont l’organisation et le financement devaient être assurés par les régions.

Cette réforme n’a pas abouti, vous l’avez dit. Deux régions – Nord-Pas-de-Calais et Poitou-Charentes – l’ont mise en place, les autres disant qu’elles n’avaient pas reçu les compensations financières nécessaires pour assumer ces nouvelles missions.

Le travail réalisé par ces deux régions est encourageant. Mais je veux sortir de l’impasse que nous connaissons depuis 2004. C’est la raison pour laquelle je compte m’appuyer sur les résultats du dialogue que j’ai renoué avec le Conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel, le CCTDC, au sein duquel un groupe de travail est spécifiquement consacré aux enseignements artistiques.

L’ensemble des associations d’élus ont fait part de leur accord sur une modification de l’article 101 de la loi de 2004 sur les points suivants : la région ne serait plus chargée d’organiser et de financer le CEPI, mais pourrait participer au financement des établissements ; une commission régionale des enseignements artistiques serait créée, pour conforter l’approche territoriale ; l’accès du plus grand nombre aux pratiques artistiques serait affirmé et inscrit dans la loi ; le cycle d’enseignement professionnel initial serait dénommé « cycle d’orientation professionnelle », destiné à des jeunes qui souhaitent rejoindre l’enseignement supérieur.

Vous l’avez dit, des positions divergentes ont été exprimées s’agissant de la collectivité destinataire du transfert des crédits de fonctionnement. La loi de 2004 prévoit en effet que ces crédits transitent par les régions ou par les départements. Le dialogue entre l’État et les associations d’élus devrait nous permettre de préciser les modalités d’organisation des CEPI, de définir le fonctionnement de la commission régionale des enseignements artistiques et de spécifier les objectifs des cursus d’études.

Une réflexion sur la procédure de classement par l’État des établissements, confiée à l’Inspection de la création artistique de la Direction générale de la création artistique, la DGCA, va être amorcée très rapidement. L’originalité du projet de chaque conservatoire et la valorisation des pratiques amateurs devront être mieux prises en compte, mais aussi, ce qui est également important à mes yeux, l’ouverture des conservatoires à l’ensemble de la population : il n’est pas normal que, dans certains de nos conservatoires, les parents soient obligés de faire la queue pendant des heures pour pouvoir inscrire leurs enfants dans les disciplines artistiques. Le libre accès à l’enseignement de ces disciplines doit faire partie des droits offerts à chacun de nos concitoyens.

Par ailleurs, l’offre doit être plus équilibrée entre les différents domaines du spectacle vivant.

L’évaluation de l’État pourrait se concentrer sur l’expertise qualitative et sur l’étendue des enseignements artistiques offerts, concourant ainsi à assurer l’égalité des territoires sous ces deux aspects. Les collectivités auraient la charge d’organiser l’offre territoriale, leur objectif prioritaire étant alors de permettre l’égal accès des élèves au service public de l’enseignement artistique.

C’est de ce scénario que je souhaite débattre avec le CCTDC.

Dans l’attente des conclusions de ce dialogue, je vous annonce que je prolongerai de deux années les classements des conservatoires dont le terme est fixé aujourd’hui au 11 octobre 2013. Cette proposition a d’ailleurs reçu un avis favorable des associations d’élus siégeant au CCTDC.

Les conservatoires ont un rôle essentiel à jouer pour la politique de démocratisation de l’accès aux pratiques culturelles qui est portée le Gouvernement. Cela passe par une ouverture plus large des établissements aux amateurs et par une valorisation des pratiques amateurs. Il s’agit de diversifier les publics et d’apporter des réponses différenciées en fonction des besoins des populations. Les enseignements artistiques doivent ainsi s’inscrire dans la réflexion engagée pour développer une politique d’éducation artistique et culturelle ambitieuse, prenant en compte à la fois ce qui se passe pendant le temps scolaire mais aussi en dehors de celui-ci.

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