Madame la présidente, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, mon propos concernera essentiellement la question des heures supplémentaires ou plutôt, devrais-je dire, le problème que pose le choix du nouveau gouvernement, sans doute purement idéologique, un choix parfaitement décalé par rapport à la vie économique réelle de notre pays.
Depuis les discussions à l’Assemblée nationale, les exemples de situations concrètes affluent, traduisant l’inquiétude tant des entreprises, plus particulièrement des PME, que des salariés, mais aussi des agents de nos collectivités, qui vont être touchés comme les autres.
Or, nous le savons parfaitement, nous avons en France un double problème : le coût du travail et la compétitivité des entreprises. D’ailleurs, le nouveau gouvernement, maintenant, seulement maintenant, le reconnaît.
Ainsi, quinze ans après la mise en place des 35 heures, en mettant un frein aux heures supplémentaires, vous commettez, une fois de plus, l’erreur de penser que le travail se partage en morceaux.
Or la vie d’une entreprise n’est pas faite d’opérations mathématiques, de division ou de multiplication du travail, elle est sujette à la demande de ses clients, soumise, entre autres, à diverses formes de saisonnalité, aux modes, à la météo, à certaines urgences à satisfaire. Les entreprises d’aujourd’hui ont, plus que jamais, besoin de souplesse.
Dans nos collectivités, nous avons tous ressenti la nécessité, à un moment ou à un autre, régulièrement ou ponctuellement, d’avoir recours aux heures supplémentaires, qui ne justifient pas de nouvelles créations de postes, lesquelles, par ailleurs, alourdiraient la dépense publique.
Aux exemples très nombreux qui circulent, reflets des réalités du terrain, j’ajouterai celui que j’ai vécu personnellement. J’ai récemment rendu visite à une PME de mon département, employant une centaine de salariés dans le domaine du textile, une survivante, pourrais-je presque dire. Les explications de son dirigeant, avec qui j’ai abordé la question des heures supplémentaires, m’ont frappée : lorsqu’il constatait que tel ou tel de ses ouvriers demandait de plus en plus souvent des acomptes sur salaire, ou lorsqu’arrivaient des saisies sur salaire, il proposait tout simplement aux salariés concernés de faire des heures supplémentaires, pour leur éviter de perdre pied et d’entrer dans la spirale de l’endettement. Ce même chef d’entreprise se disait soucieux, car la suppression de l’exonération des charges ne lui permettrait plus de proposer cette solution.
C’est bien cela, la réalité de la vie quotidienne des entreprises. C’est pourquoi j’ai peine à croire, monsieur le ministre délégué, que vous ayez pleinement pris la mesure des conséquences de votre dispositif. Celui-ci va toucher des dizaines de milliers d’entreprises, plus particulièrement des PME, qui ont le plus souvent recours à la formule souple des heures supplémentaires, et plus de 8 millions de salariés. Ces derniers se verront, dans le pire des cas, privés purement et simplement de leurs heures supplémentaires, lesquelles représentaient jusqu’à 500 euros par an, et, dans le meilleur des cas, privés de l’exonération fiscale, ce qui représentera évidemment une baisse de leur pouvoir d’achat.
Même si cette amputation n’est que de quelques dizaines d’euros, elle va frapper les salariés les plus modestes, ceux qui ont du mal à boucler leur budget. J’en veux pour preuve que 30 % des ménages français font leurs achats en calculant à l’euro près.
C’est pourquoi, monsieur le ministre délégué, nous ne comprenons pas que vous vous acharniez à maintenir cette mesure. Erreur économique doublée d’une erreur sociale, elle va faire souffrir ceux qui sont déjà les plus touchés : les salariés aux faibles revenus et les petites entreprises.