Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens tout d'abord à saluer l'ouverture de postes engagée par le Gouvernement. Face à la saignée opérée sans discernement par le gouvernement précédent, cette mesure est un premier signe encourageant des priorités données par la nouvelle équipe au pouvoir.
Même s'il ne s'agit que d'une atténuation de l'affaiblissement de l'encadrement éducatif, les postes supplémentaires attribués à la Guyane – quinze pour l'enseignement public et deux pour l'enseignement privé sous contrat – sont plus que nécessaires.
Le système scolaire guyanais se heurte manifestement à des difficultés inconnues dans les autres académies. Je rappellerai quelques chiffres pour illustrer mon propos. Cette année, l'écart constaté entre le taux de réussite aux baccalauréats général et professionnel à l'échelon national et dans l'académie de Guyane s'élève à quinze points ; il atteint même plus de 25 points pour ce qui concerne l'ensemble des filières technologiques. Quant au brevet des collèges, la différence est de presque 11 points. Tel est le fossé entre les résultats guyanais et nationaux !
Il existe donc en Guyane un problème manifeste de réussite scolaire, dont la violence scolaire se fait le reflet. Le climat au sein des établissements ne cesse de se dégrader : rackets, incivilités, violences verbales et physiques à l'encontre des enseignants comme des élèves, actes de dégradation sur le matériel pédagogique. Des postes d'assistant d'éducation serait seraient également bien nécessaires.
Mais les effectifs sont-ils seuls en cause ? En réalité, le problème paraît davantage structurel. Je vais illustrer ce point en me concentrant, comme le Gouvernement, sur l'enseignement primaire.
La proportion des élèves scolarisés dans le primaire qui se trouvent en zone d'éducation prioritaire s'établit à 60 % en Guyane, contre 4 % en métropole. Or, malgré la mise en place de réseaux ambition réussite et réussite scolaire, aux termes des évaluations nationales, les résultats obtenus en Guyane se situent très en deçà de ceux qui sont enregistrés en métropole : seuls 30 % des élèves maîtrisent le socle commun de connaissances, contre 75 % en métropole.
Alors que les effectifs scolaires stagnent en métropole, ils progressent de 3, 7 % par an dans mon département. L'augmentation démographique laisse supposer que la population âgée de moins de 20 ans aura doublé en 2040. Comment accueillir tous ces nouveaux élèves ?
Ces dernières années, deux écoles maternelles et trois écoles primaires ont été construites. Sur ce point encore, la spécificité guyanaise apparaît : 60 % de nos écoles ont plus de dix classes, contre 12 % en métropole.
Le problème des locaux se pose clairement, non seulement pour les primo-scolarisés, mais aussi pour les internes des collèges ou encore pour les redoublants de terminale. Or les locaux sont tributaires des finances des collectivités territoriales et de celles de l'État. Faut-il que l'on organise en Guyane une classe le matin et une autre l'après-midi pour pallier le manque de capacités d'accueil ? Certains pays émergents ont recours à une telle pratique. Il faudrait toutefois, pour cela, consentir à augmenter à terme le corps enseignant de 10 % à 25%.
La non-scolarisation dans le primaire est une autre particularité malheureuse de la Guyane : elle concerne 4 % des enfants et cette proportion atteint 7 % lorsque les parents sont inactifs. Chaque année, 5 000 enfants se trouvent ainsi dans cette situation.
En fait, c'est peut-être l'offre pédagogique qui doit être aménagée. Actuellement, l'enseignement en langue maternelle établissant le lien avec le français, langue de scolarisation, n'est pas assez développé pour faire barrage à l'échec de la scolarisation. Le temps consacré à l'enseignement en langue maternelle dépasse rarement trois demi-heures par semaine, à condition toutefois que l'établissement puisse le délivrer. Or, dans les espaces isolés guyanais, on trouve fréquemment des élèves français non francophones, cas de figure ayant disparu depuis les années cinquante dans l'Hexagone. Néanmoins, lorsqu'une telle situation apparaît en métropole, l'enseignement est capable d'emmener l'élève de sa culture propre vers la culture du pays d'accueil ; sur le territoire des Amérindiens ou des Bushinengués, descendants des noirs marrons, c'est l'enseignant qui est étranger au monde dans lequel il enseigne.
Des expériences de transition entre un enseignement en langue maternelle et un enseignement en langue française comportant des références au milieu et au mode de vie des élèves ont déjà été tentées, tout en consolidant la première expérience de langage de ces jeunes populations, afin de construire un bilinguisme dans une école moins étrangère.
Mais les obstacles sont nombreux : la reconduction des budgets en faveur de ces médiateurs culturels, leur statut en tant qu'intervenants en langue maternelle, la difficulté de les former pédagogiquement et la pérennisation du dispositif sont autant de sujets qui nécessitent un travail urgent, tant à l'échelon du rectorat de Guyane qu'à celui du ministère.
Je souhaite vivement que l'effort consacré par le Gouvernement à la petite enfance et à l'école primaire soit adapté à la diversité des situations §