Notre collègue Jean-Claude Gaudin étant absent, je vais essayer de défendre l’amendement qu’il a déposé.
Il s’agit d’un amendement « de suppression de suppression », puisqu’il vise à supprimer l’article 1er supprimant la TVA sociale, laquelle, comme cela est rappelé dans l’objet, devait rapporter 13, 2 milliards d’euros au budget de l’État et, surtout, donner un coup de fouet à la compétitivité des entreprises.
On a beaucoup parlé hier du problème de la TVA sociale, ou TVA anti-délocalisation. Pour ma part, contrairement à certains de nos collègues qui ont regretté un certain flottement dans la désignation de cette TVA, je soutiens les deux termes, qui sont complémentaires, malgré des significations distinctes.
Dans un premier temps, elle fut dénommée TVA sociale car elle devait succéder à une charge de l’ordre de 5 milliards d’euros pesant sur les entreprises et destinée à financer la branche famille de la sécurité sociale. On se demande d’ailleurs pour quelle raison historique ce financement reposait sur les entreprises.
Cette TVA sociale devait également son nom à la distinction opérée entre les biens de consommation courante acquis par les ménages les moins aisés, sur lesquels pesait un faible taux de TVA, et les biens concernés par un taux normal, sur lequel devait porter l’augmentation.
Quant à la dénomination « TVA anti-délocalisation », elle se justifie par le fait que l’augmentation en question permettait de protéger les entreprises françaises en taxant des produits pour la plupart importés de pays où le coût de la main-d’œuvre est faible.
Pour nous, la suppression de cette TVA est un mauvais coup porté à l’économie française. Une telle décision est d’ailleurs d’autant plus surprenante que tant la Cour des comptes que certains anciens parlementaires socialistes devenus ministres, ainsi que certaines associations proches du pouvoir comme Terra Nova, avaient soutenu, en filigrane, l’instauration de la TVA sociale. La situation est d’autant plus inquiétante que le Gouvernement n’a présenté, à ce jour, aucune solution de substitution.
Hier, on a beaucoup parlé de la CSG, dont l’augmentation, comme certains l’ont rappelé, n’a pas encore été décidée. Néanmoins, je le rappelle, le Président de la République a affirmé récemment que, entre la TVA sociale et la CSG, il avait porté son choix sur la CSG. J’ai également entendu Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l'autonomie, dire que la CSG serait destinée à financer la réforme de la dépendance. On peut se demander comment cette contribution, qu’il appartiendra de définir dans les mois qui viennent, pourrait à la fois bénéficier aux entreprises en venant réduire leurs charges patronales pour améliorer leur compétitivité et, en même temps, financer la dépendance, qui, chacun le sait, nécessite des sommes considérables.
Je le rappelle rapidement, la CSG est un impôt rétrograde et injuste puisqu’il frappe tous les revenus d’une manière uniforme, sans opérer de sélection. L’augmenter, comme ce sera sans doute le cas dans les mois qui viennent, consistera à reprendre d’une main ce qui a été donné de l’autre, en particulier aux salariés les plus modestes, qui ont bénéficié récemment d’une faible augmentation du SMIC. Finalement, ceux-là n’apercevront pas de grand changement au bas de leur feuille de paye !
J’ajoute également que la suppression programmée de la TVA sociale est un mauvais signal donné à nos partenaires européens. Je ne reviendrai pas sur les tribulations de l’Europe, dont les médias nationaux se sont encore fait l’écho ce matin, mais je rappellerai que nos partenaires attendaient des gestes forts en faveur du désendettement et de l’amélioration de la compétitivité française. Or cette suppression pure et simple ne va pas dans ce sens.
Certains ont souligné hier que les pays qui avaient appliqué la TVA sociale n’avaient pas bénéficié de l’effet qu’ils en attendaient, insistant en particulier sur l’inflation qu’elle avait engendrée en Allemagne. Si ce pays a connu, il est vrai, une légère inflation, celle-ci n’a été que de quelques points pendant très peu de temps. La situation est rapidement revenue à la normale.
J’ajoute que les projections établies à l’époque par le précédent gouvernement indiquaient, compte tenu du gain de compétitivité qui aurait été réalisé par les entreprises, que l’impact sur les prix serait de l’ordre de 0, 4 % à 0, 5 %, chiffres bien différents de ceux qui ont été annoncés.
J’ajoute encore que les pays scandinaves, et en particulier le Danemark, appliquent cette TVA dite sociale depuis très longtemps. Le Danemark est en effet, avec la Suède, l’un des pays d’Europe où le taux de TVA est le plus élevé, puisqu’il atteint 25 %. En contrepartie de cette augmentation, toutes les charges sociales des entreprises pesant sur les salaires ont été supprimées, ce qui est loin d’être négligeable. Or, chacun peut constater que, dans le concert européen, les pays scandinaves font partie du bloc du Nord, qui n’est pas le plus mal placé sur le plan financier.