Intervention de Hélène Luc

Réunion du 17 mars 2005 à 15h00
Avenir de l'école — Articles additionnels après l'article 6

Photo de Hélène LucHélène Luc :

Le socle commun de connaissances appauvri risque de devenir un savoir maximum pour un grand nombre d'élèves, en ce qu'il aboutirait à ce que soient abandonnés des axes fondamentaux d'apprentissage, comme l'EPS, l'éducation physique et sportive.

Voici ce que disait le candidat à l'élection présidentielle Jacques Chirac : « Le sport apparaît de plus en plus comme une véritable école de la vie... C'est la raison pour laquelle il doit devenir une matière à part entière de l'éducation des enfants, au même titre que les connaissances de base. » Cette citation, que chacun, ici, aura certainement reconnue, est extraite de son livre intitulé La France pour tous.

Le futur Président de la République pointait lui-même le coeur de ce qui fonde aujourd'hui nos propres craintes : l'exclusion de l'EPS des connaissances de base.

Nous considérons que l'émergence de ce nouveau modèle scolaire a un sens politique. Nous avons l'intime conviction que le destin des différentes disciplines, de leurs enseignants, sera différent suivant qu'ils appartiennent ou non au « socle ». Qu'on le veuille ou non, il produit aujourd'hui de la hiérarchie ; il produira, demain, de l'exclusion. Personne ne peut aujourd'hui prédire de façon exhaustive l'effet différé qu'il joue autour de la définition du contenu de la scolarité obligatoire.

Les enseignants d'EPS sont particulièrement mobilisés, vous le savez, pour la défense de leur discipline d'enseignement : l'appel pour l'EPS lancé par leur organisation syndicale recueille de très nombreux soutiens, aussi bien auprès de l'opinion publique - à ce jour, plus de 150 000 signatures ont été réunies - qu'auprès de personnalités.

Les signataires ne comprennent pas, en particulier, cette remise en cause du caractère fondamental de l'EPS à l'école au moment où le Gouvernement est engagé dans une campagne pour les jeux Olympiques à Paris en 2012.

Les membres du SNEP-FSU, le syndicat national de l'éducation physique de l'enseignement public et de la fédération syndicale unitaire, regrettent vraiment, monsieur le ministre, qu'il n'y ait pas eu avec lui de véritable concertation ; pourtant, c'est une organisation qui, elle-même, a recueilli 80 % des voix lors des dernières élections professionnelles.

Vous connaissez, monsieur le ministre, mes chers collègues, le rôle positif et important des professeurs d'éducation physique : ayant un autre rapport avec l'élève, ils contribuent aussi, par la pratique du sport, à l'apprentissage de la mixité, dont nous parlions hier.

Je veux achever cette intervention par un retour sur ce qui fonde la raison d'être de l'éducation physique et sportive en citant un extrait de l'ouvrage Variations du philosophe Michel Serres : « Ecrites en éloge des professeurs d'éducation physique et des entraîneurs, des guides de haute montagne, des athlètes, danseuses, mimes, clowns, artisans et artistes... ces Variations décrivent les métamorphoses admirables que leur corps peut accomplir. Les animaux manquent d'une telle variété de gestes, postures et mouvements ; souple jusqu'à la fluidité, le corps humain imite à loisir choses et vivants ; de plus, il crée des signes. Déjà là dans ces positions et métamorphoses, l'esprit, alors, naît de ces variations. Le corps se révèle plus difficile à robotiser que l'intelligence, vite artificielle. Les cinq sens ne sont pas la seule source de la connaissance : elle émerge, en grande part, des imitations que rend possibles l'extraordinaire plasticité du corps tout entier. En lui, avec lui et par lui commence le savoir. Du sport à la connaissance, il passe donc de la forme au signe, ...»

Cette citation me paraît éloquente et constitue, à mon sens, une réponse de haut niveau à M. de Rohan en démontrant l'importance de l'éducation physique.

Voyez-vous, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est là que nos appréciations, concernant le rôle que joue l'éducation physique, divergent complètement.

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