Mes chers collègues, nous vous demandons un gros sacrifice : il s'agit par cet amendement de supprimer le Haut conseil de l'éducation.
En effet, de par son mode de désignation, ce Haut conseil s'apparentera, nous dit-on, à une autorité administrative indépendante. Or il sera composé de neuf membres désignés par le Président de la République, le président de l'Assemblée nationale, le président du Sénat et le président du Conseil économique et social. Ce sera donc une assemblée éminemment politique, et très peu indépendante dans les faits.
Ce Haut conseil, à la composition très politique, se substituera à deux conseils à la composition beaucoup plus démocratique et ouverte, mais que vous jugez bon de supprimer dans le seul souci de neutraliser deux outils incontestés du service public de l'éducation, dont les choix ou les rapports ne vont sans doute pas toujours dans le sens que vous souhaiteriez.
Je rappelle que le conseil national des programmes, qui a été présidé par M. Luc Ferry et qui est actuellement présidé par M. Jean-Didier Vincent, est composé de vingt et une personnalités qualifiées, essentiellement des enseignants de tous les degrés, mais aussi des chercheurs, et trois inspecteurs généraux de l'éducation nationale.
Le Haut conseil de l'évaluation de l'école, présidé par M. Christian Forestier, est quant à lui composé de trente-cinq membres, principalement des représentants des acteurs, des partenaires et des usagers de l'école, des syndicats de personnels tant enseignants que non-enseignants, des associations de parents d'élèves, des lycéens, mais aussi de membres de la « société civile », d'élus, de personnalités qualifiées, par exemple de chercheurs en sciences de l'éducation.
Le Haut conseil de l'éducation sera compétent pour se prononcer à votre demande, monsieur le ministre, dans un grand nombre de domaines : pédagogie, programmes, évaluation des connaissances des élèves, organisation et résultats du système éducatif, formation des enseignants, etc. En outre, il dressera le bilan périodique des résultats du système éducatif.
En réalité, de par la dilution de ses missions, ce nouveau conseil pourra difficilement être autre chose qu'un organisme empâté et poussé à l'inactivité.
Il est par ailleurs inconcevable de créer une instance qui soit à la fois juge, puisqu'elle évaluera le système et les programmes, et partie, puisqu'elle mettra lesdits programmes en place. Partisans de la séparation des pouvoirs, nous ne pouvons que contester cette double compétence.
On assiste donc, disons-le franchement, à une reprise en main politique des outils d'évaluation du système éducatif et de mise en oeuvre des politiques éducatives.
Entre politisation des instances et représentation de la communauté éducative, vous avez choisi. Ce choix résume votre réforme de l'éducation, qui trouve dans cet article une parfaite illustration.
Nous nous opposons, pour notre part, à ce choix, et nous demandons la suppression de cet article.