Cet amendement tend à préciser les conditions dans lesquelles l'enseignement du créole est assuré dans les départements d'outre-mer.
Le créole est une langue mixte. Il est né d'un métissage entre les différentes langues qui étaient présentes sur ces territoires, à la fois la langue des colons et celles des esclaves africains. C'est le fruit d'une création commune, qui permet aujourd'hui à la France d'afficher des écrivains de qualité mondiale comme Edouard Glissant ou Raphaël Confiant.
Prenant acte de cette donnée, un ministre de l'éducation nationale courageux a inauguré, en 2000 et 2001, un dispositif universitaire d'enseignement du créole et ouvert deux concours de recrutement d'enseignants en créole.
Les statistiques manquent, mais on estime qu'en Martinique, par exemple, 10 % des écoles primaires et sans doute moins de 20 % des collèges disposent, aujourd'hui, d'enseignants en créole. C'est insuffisant et très préjudiciable à la réussite scolaire des élèves dont le créole est la langue maternelle.
L'amendement n° 186 vise non pas à fixer de nouveaux objectifs, qui relèvent sans doute de la circulaire, mais à souligner dans la loi l'importance que nous attachons à la diffusion de cette langue magnifique auprès de nos compatriotes d'outre-mer.
Par ailleurs, je crois indispensable de revenir sur l'amendement qu'a présenté M. Carle tout à l'heure. Il a en effet utilisé une argumentation que je trouve assez ambiguë et non dénuée d'arrière-pensées.
M Carle nous dit qu'il est inutile de rajouter cet article 12 bis, au motif que le code de l'éducation organise l'enseignement des langues régionales et que des conventions sont déjà passées entre l'Etat et la plupart des régions et départements dans lesquels ces langues sont utilisées de façon vernaculaire.
La suite de la démonstration de M. le rapporteur m'a étonnée, car elle était d'une autre tonalité. En évoquant les emplois du temps surchargés, la maîtrise insuffisante du français ou des langues étrangères d'une partie des élèves, il revient finalement à une argumentation plus classique : il y aurait, d'un côté, les langues étrangères, dont la découverte et l'usage sont encouragés, et, de l'autre, les langues régionales, qui continuent à sentir le soufre, à apparaître comme des langues « en plus », et qui pourraient, d'une certaine façon, menacer l'unité de la République.
On ne doit pas, me semble-t-il, faire de différences fondamentales entre les langues étrangères et les langues régionales. Il est connu que le Français parle peu et mal les langues étrangères, qu'il est peu rompu à cette gymnastique mentale. Je crois que découvrir une langue donne envie d'en découvrir d'autres ; cela suscite la curiosité : on est plus ouvert aux autres.
L'amendement n° 186 vise simplement à traduire ce fait. On peut à la fois reconnaître la langue vernaculaire, encourager son enseignement, favoriser l'usage des langues étrangères, insister sur l'apport du français, considérer que certaines matières pourraient être enseignées de façon indifférenciée, notamment dans le cadre du développement de la bivalence des enseignants et des enseignements, dans des langues qui ne sont pas forcément la langue de la République, langue que, pour ma part, je persiste à soutenir envers et contre tout.
Nous devrions être plus audacieux ! J'ai cru comprendre, tout à l'heure, en écoutant l'intervention de M. Fillon, que, dans le domaine des langues, il était tout à fait prêt à faire preuve d'audace et à tenter des expérimentations.