Je soutiens, naturellement, l'amendement de suppression de la commission, tout en souhaitant, comme vient de le dire à juste titre notre collègue Jacques Legendre, que la commission mixte paritaire nous permette d'approfondir la question de l'enseignement des langues et des cultures régionales, celle-ci étant en effet mal abordée dans l'article 12 bis tel qu'il résulte de la rédaction de l'Assemblée nationale. Cet article traite de la même façon des situations assez différentes.
Les cultures et langues régionales appartiennent à notre patrimoine et il convient de les faire vivre. Il est précisé qu' « un enseignement de langues et cultures régionales peut être dispensé tout au long de la scolarité ». C'est équivoque ! Cela signifie-t-il qu'un véritable bilinguisme sera mis en place ou simplement qu'il sera possible, à différentes étapes de la scolarité, de s'ouvrir sur les cultures et sur les langues régionales ? Il ne faut pas confondre cette situation avec le véritable bilinguisme.
Nous avons en France des régions de tradition bilingue, qui s'efforcent d'évoluer vers un bilinguisme européen. Tel est le cas, par exemple, de l'est de la France, où l'on est passé du francique ou de l'alémanique à l'allemand d'aujourd'hui.
Et comme l'a fait observer notre collègue Christian Cointat, on peut aller vers un bilinguisme de nouvelle génération, qui ne serait pas un bilinguisme de tradition. Il ne s'agit pas de considérer que, puisque Charles le Chauve et Louis le Germanique, en échangeant le serment de Strasbourg en 842, ont décidé de partager leurs territoires selon une ligne de frontière linguistique qui n'a pas évolué pendant plus de douze siècles - elle a été bousculée depuis par la télévision, mais c'est un autre sujet -, il faut en rester là.
On peut imaginer qu'une région comme le Languedoc-Roussillon décide d'offrir des formations bilingues, pas nécessairement en catalan, mais en espagnol, qui est une langue européenne. La Savoie pourrait opter pour un bilinguisme italien, bien que, à ma connaissance, les Savoyards aient toujours parlé une langue romane proche du français et pas du tout l'italien.
Par conséquent, un partenariat entre l'Etat et les collectivités locales me paraît être un élément d'une politique culturelle.
Vous avez raison, madame Voynet, de dire que le créole est un élément du patrimoine et qu'il ne faut pas l'abandonner. Mais le bilinguisme français-anglais me paraît une absolue nécessité pour le développement des Antilles. Saint-Martin est d'ailleurs bilingue ! Pourquoi ne pas tenir compte de cette réalité ?
En supprimant l'article 12 bis, nous rouvrons le débat et nous demandons à l'assemblée nationale de hiérarchiser ses préférences.
Il faut distinguer l'enseignement des cultures et des langues traditionnelles, l'aspect patrimonial, du développement de la langue du voisin dans un espace intégré. Il faut par ailleurs maintenir, pour ceux qui le souhaitent - c'est le cas de l'Alsace et de la Lorraine mosellane - un bilinguisme dans une langue européenne, mais certainement pas un bilinguisme de repli dans une langue qui, si elle se justifie d'un point de vue culturel et historique, est aujourd'hui très faiblement utilisée.
La seule façon de poser le problème est donc de supprimer l'article 12 bis, comme nous y invite M. le rapporteur.