a relevé tout d'abord le caractère complexe, important et délicat du sujet et a rappelé qu'issu d'une famille enracinée depuis des générations dans une région et propriétaire d'une entreprise étroitement liée à ce territoire, le concept de nationalité de l'entreprise lui était familier. A la suite d'une nationalisation qui a écarté le groupe familial de son activité historique, il a reconstitué ce groupe dans des métiers divers, ce qui l'a mis en contact avec la variété et la spécificité des cultures. Par ailleurs, les responsabilités qu'il a exercées à la tête du MEDEF l'ont aussi sensibilisé à la spécificité des expériences nationales en matière de gestion d'entreprise. Pour autant, les progrès de la libre circulation des capitaux et des hommes ont considérablement modifié la portée de la notion de nationalité de l'entreprise et de celle de centre de décision économique. Les acteurs économiques sont en effet de plus en plus indifférents à l'identification d'une entreprise avec un territoire et l'on peut schématiser cette réalité en constatant qu'une entreprise a une double nationalité : celle de sa culture et celle de son compte d'exploitation. Les responsables politiques se préoccupent légitimement des conséquences de cette situation sur le tissu économique de la France et cherchent à évaluer dans quelle mesure la croissance et l'emploi sont liés à l'existence de centres de décision sur le territoire français. Les entreprises, de leur côté, visent la seule rationalité économique, indépendamment de toute considération de nationalité. C'est ainsi qu'une entreprise étrangère qui prend le contrôle d'une entreprise française la considère essentiellement sous l'angle de la rentabilité de l'investissement effectué. L'expérience montre que la reprise par des étrangers de sociétés détenues par le groupe Wendel n'a pas eu de conséquences sur leur gestion.
Pour autant, chaque entreprise a incontestablement une nationalité - parfois deux - identifiable au moyen de critères divers, au nombre desquels il faut mentionner la nationalité de l'actionnariat, l'emplacement du siège social, la composition de l'équipe de direction, le lieu où sont consolidées les filiales, ainsi que, peut-être, l'implantation des centres de recherche. La nationalité de l'entreprise se manifeste dans sa vie quotidienne, à travers la langue de travail, le comportement des membres, sans influencer considérablement les décisions stratégiques, inspirées par le souci de la rentabilité de l'investissement. A titre d'exemple, l'usine Siemens de Haguenau a attiré pendant une période des investissements importants du groupe, avant que le mouvement ne s'inverse, pour des raisons toujours exclusivement liées à la rationalité économique : si les décisions peuvent être un temps retardées par des pressions liées au contexte local, la rationalité économique finit toujours par imposer sa logique.
En ce qui concerne l'opportunité d'interventions publiques visant à influencer la localisation des centres de décision, M. Ernest-Antoine Seillière a estimé que prévalaient en la matière le contexte réglementaire, fiscal, le statut des « impatriés », le climat général dans lequel l'entreprise exerce ses activités. A ces différents égards, l'image de la France n'a pas été améliorée par certaines initiatives, et quelques centres, qui pourraient y être installés, s'écartent de la France.
L'attractivité de la France pourrait donc être améliorée, et le MEDEF s'y emploie, mais la tendance n'est pas très favorable.
Les initiatives à caractère défensif consistant à interdire ou à protéger ont des conséquences globalement plus négatives que l'avantage qui pourrait être retiré du maintien sur le territoire de tel ou tel centre de décision dont la délocalisation était envisagée. En outre, alors que la plupart des pays agissent en ce sens de façon discrète, la France lance des débats publics dont les résultats sont minces et les conséquences négatives, notamment en termes d'image.