Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président et monsieur le rapporteur de la mission commune d’information, mes chers collègues, mon intervention portera sur la situation de la filière des autobus, autocars et poids lourds, dont la fragilité est patente par comparaison avec la même filière en Allemagne et, même, en Italie.
J’évoquerai tout d’abord le secteur des poids lourds.
La société Renault a vendu en 2000 sa division « poids lourds » à Volvo AB et, en contrepartie, est devenue son premier actionnaire. En 2011, pour rembourser les 3 milliards d’euros prêtés par l’État afin de faire face aux conséquences de la crise, l’entreprise a cédé ses actions sans droit de vote et ne détient plus que 6, 8 % du capital de Volvo AB et 17, 5 % des droits de vote.
Dans le cas où Renault céderait ses autres actions, sans précaution particulière, Volvo AB serait à la merci d’une offre publique d’achat hostile et la concentration qui en résulterait, dans un contexte marqué par une demande très inférieure aux capacités de production, pourrait être fatale à Renault Trucks et à ses usines en France.
De manière générale, il serait inadmissible que le gouvernement français accepte qu’il n’y ait plus aucun industriel français présent dans le secteur des poids lourds, ce qui aurait pour conséquence de nous faire totalement dépendre du bon vouloir de Volvo AB pour ce qui est du maintien ou non des activités de fabrication et d’assemblage de Renault Trucks en France.
Aussi, je demande que les pouvoirs publics français veillent à ce que Renault conserve durablement une part significative du capital et des droits de vote de Volvo AB. Dans mon esprit, il ne peut s’agir d’un simple actionnariat « dormant ».
Le groupe Scania assemble depuis 1992 des camions et tracteurs gros porteurs – de plus de 16 tonnes – dans son usine d’Angers, qui emploie 520 personnes. Les véhicules produits sont destinés aux marchés de l’Europe du Sud, notamment à la France.
Iveco produit, sur son site de Bourbon-Lancy, des moteurs de la famille Cursor, qui équipent de nombreux modèles d’autocars et d’autobus de marque Fiat et Irisbus et de camions de marque Iveco. Cette usine emploie 1 100 personnes.
Il convient de saluer l’engagement important tant de Scania que d’Iveco en France. Je suggère donc que le Gouvernement se rapproche de ces deux groupes de manière à déterminer les mesures susceptibles d’être prises afin d’assurer non seulement le maintien des activités actuelles, mais aussi le développement d’activités nouvelles.
J’en viens au secteur des autocars et autobus.
La Commission européenne s’étant opposée, en 2000, à ce que Renault soit à la fois actionnaire de Volvo AB et partenaire capitalistique d’Iveco au sein d’Irisbus, plus aucun industriel français n’est présent dans ce secteur. Iveco France, propriétaire de la marque Irisbus, est une filiale à 100 % du groupe Fiat.
Face à l’atonie du marché, le risque est grand qu’Iveco France transfère de plus en plus d’activités sur ses sites tchèques et italiens, au détriment des sites français d’Annonay et de Rorthais.
Il paraît donc nécessaire que le gouvernement français obtienne de Fiat l’engagement de maintenir les activités actuelles d’Iveco en France, ainsi que leur développement en cas de reprise économique.
À la différence notamment du groupe Man, propriétaire des marques Man et Neoplan, qui n’a pas d’usine en France, EvoBus France, filiale du groupe Daimler commercialisant les marques Mercedes-Benz et Setra, dispose d’une usine à Ligny-en-Barrois. Cette implantation en France est à souligner, même s’il ne s’agit que d’un site d’assemblage, sur des chaudrons entièrement traités et apportés d’Allemagne par camions, de pièces – moteur, boîte, pont, etc. – quasiment toutes fabriquées en Allemagne.
Désormais, seuls des autobus y sont assemblés, alors que le site réalisait aussi par le passé l’assemblage d’autocars.
Ainsi, le site de Ligny-en-Barrois emploie 400 salariés et EvoBus France 650 salariés, contre 10 000 emplois en Allemagne et 3 000 emplois dans le reste de l’Europe.
Là encore, il est nécessaire que le Gouvernement, tout en saluant l’engagement du groupe EvoBus en France, ouvre une négociation avec lui afin d’obtenir qu’il confie davantage d’activités au site de Ligny-en-Barrois, de manière à y faire progresser très sensiblement le nombre d’emplois. Ce groupe a obtenu en France près de 20 % du marché, ce qui me paraît de nature à justifier pleinement cette évolution.
À l’instar de nombreux observateurs, je tire de cette analyse le constat selon lequel, si la France compte un nombre assez important d’usines où sont fabriqués et/ou assemblés des autobus, des autocars et des poids lourds, elle n’a toutefois pas de véritable politique industrielle dans ce secteur. Il n’est pas encore trop tard pour en définir une.
Monsieur le ministre, les quelques mesures que je préconise pourraient en constituer l’amorce.