Intervention de Denis Baupin

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 24 juillet 2012 : 1ère réunion
Audition de la commission nationale d'évaluation du financement des charges de démantèlement des installations nucléaires de base et de gestion des combustibles usés et des déchets radioactifs cnef

Denis Baupin :

Je remercie aussi le président Lépine pour la grande transparence de ce rapport. Il serait souhaitable que celui-ci puisse être plus largement diffusé dans le grand public. Dans notre pays, alors que la construction d'une éolienne nécessite d'avoir provisionné au préalable l'argent nécessaire à son démantèlement, quarante ans après avoir lancé le programme nucléaire, la connaissance, sans parler du provisionnement, des moyens financiers nécessaires à la gestion des conséquences de cette industrie reste incertaine. L'absence de fonctionnaire permettant d'y travailler, la difficulté à réunir la commission, l'impossibilité de faire appel au corps de contrôle des assurances, sont autant d'éléments montrant que cette connaissance n'est pas jugée, aujourd'hui, prioritaire.

Je continue à considérer qu'en France la question des déchets nucléaires n'est pas réellement traitée : ces déchets sont déplacés, empilés, font l'objet de rapports et de réunions de commissions. Mais à ce jour, sans faire insulte à la loi portant le nom du président Bataille, leur sort final n'est pas connu, puisque nous aurons à en discuter au cours de cette législature.

D'autre part, ce que vous soulignez, tout comme l'a fait la Cour des comptes, sur les sous-évaluations manifestes de ces coûts, s'avère particulièrement préoccupant. Ainsi dans votre conclusion, vous indiquez qu'il « apparaît que les évaluations actuelles des exploitants ne comportent pas de marge de sécurité et qu'il y a un risque qu'elles aient à être revues en hausse à l'avenir. En particulier deux points mériteraient d'être réexaminés », vous les avez évoqués : « le taux d'actualisation utilisé par les exploitants nucléaires », pour lequel vous avez précisé qu'il devait être revu, « et l'évaluation du coût du stockage géologique profond ».

Par ailleurs, que pensez-vous des propos tenus voici quelques semaines devant une commission sénatoriale par le président de l'ASN, M. André-Claude Lacoste : « S'agissant des provisions, nous avons été choqués par deux épisodes récents. D'une part, quand le Gouvernement a buté pour trouver des provisions conformes à la loi, il a publié un décret permettant de contourner l'esprit de la loi. C'est typiquement le cas des actions de RTE. D'autre part, certaines situations me paraissent rigoureusement contraires à la loi : c'est ainsi qu'une partie des provisions pour le démantèlement du CEA s'est transformée en créances sur l'État. Nous sommes nombreux à ne pas avoir une très haute opinion de la valeur d'une créance sur l'État dans un tel domaine. Historiquement, le démantèlement d'une installation nucléaire s'est déjà trouvé en grand péril faute d'un financement qui devait être assuré directement par l'État. » ?

Une autre question concerne les conséquences sur l'évaluation des charges de long terme d'une éventuelle décision d'abandon de la filière du retraitement et du MOX, ce qui aurait pour conséquence de transformer en déchets des matières aujourd'hui considérées comme des combustibles potentiels. Quelles en seraient les conséquences sur l'évaluation des besoins de stockage et sur leur coût ? Un facteur deux par rapport à l'évaluation actuelle de l'ANDRA, à hauteur de trente-cinq milliards d'euros, parfois évoqué, vous semble-t-il un ordre de grandeur réaliste ? À cet égard, la Cour des comptes a elle-même estimé qu'en l'absence de certitude sur la poursuite du retraitement, il convenait, pour le moins, d'envisager, en matière d'évaluation, toutes les hypothèses.

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