Intervention de Josiane Mathon-Poinat

Réunion du 26 avril 2011 à 22h45
Ventes volontaires de meubles aux enchères publiques — Adoption d'une proposition de loi en deuxième lecture

Photo de Josiane Mathon-PoinatJosiane Mathon-Poinat :

Étrange posture qui, au nom de la concurrence, crée ainsi une concentration du marché aux mains de quelques-uns !

Il est aussi proposé de passer d’un régime d’agrément à un régime déclaratif. Ainsi, les ventes aux enchères ne seront plus régulées a priori, elles seront libres et les établissements commerciaux désirant s’y livrer ne devront plus obtenir un agrément, mais simplement se signaler auprès d’une autorité de régulation, le Conseil des ventes.

Cette autorité sera composée de membres nommés par l’exécutif, ce qui permettra tous les conflits d’intérêts possibles. Quelques petites modifications ont néanmoins été apportées sur ce point.

Les intervenants sur ce marché sont nombreux et de statuts très divers, ce qui, loin d’être un handicap, constitue une richesse. Citons, à titre d’exemple, les marchands d’art, qui, à la différence des salles de ventes, ne sont pas que l’interface entre le vendeur et l’acheteur : ce sont des professionnels investis dans un champ particulier qu’ils connaissent bien.

Leur travail est un long processus consistant à repérer des artistes, même méconnus, à acheter leurs œuvres, à les valoriser, à informer les clients et à conseiller les collectionneurs. Au-delà de cette activité apparemment mercantile, les marchands d’art remplissent un rôle éducatif et culturel auprès du public.

Grâce à ces différents acteurs répartis sur tout le territoire, nous disposons d’un maillage territorial qui assure le maintien d’une économie locale dont nous avons besoin.

Avec la mainmise donnée aux grosses maisons de ventes à travers cette proposition, le caractère puissamment spéculatif du marché de l’art sera renforcé et ces petits acteurs n’auront plus qu’à mettre la clé sous la porte.

Telles sont peut-être les réelles conséquences de cette proposition de loi !

En résumé, aussi bien pour les raisons que pour les conséquences de ce texte, nous sommes bien loin d’être convaincus. Nous avons, au contraire, de bonnes raisons d’être inquiets de cette réforme.

Il s’agit d’une application purement doctrinale de la directive européenne Services, qui dérégulera un marché spécifique au profit d’une poignée de grosses sociétés et qui niera nos spécificités culturelles en important des techniques de vente libérales, qui sont la cause de la fermeture de 30 % des galeristes en Angleterre.

Mes chers collègues, si effectivement le marché de l’art est confronté à des évolutions et, s’il est vrai que notre pays n’occupe désormais que la quatrième place du marché mondial des ventes aux enchères, il est aussi vrai que le marché français se tient bien et que, depuis 2002, le montant des ventes volontaires a augmenté de presque 30 %. D’ailleurs, je le rappelle, c’est grâce à quelques marchands français que Paris est redevenue la capitale du dessin.

Pour toutes ces raisons, nous réitérerons notre rejet de ce texte.

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