Intervention de Christiane Taubira

Réunion du 11 juillet 2012 à 21h45
Harcèlement sexuel — Article 1er

Christiane Taubira, garde des sceaux :

L’argument de cohérence avancé par M. le rapporteur n’est pas négligeable. C’est l’ordonnance de 1945 qui a fixé à quinze ans l’âge de la majorité sexuelle.

Se pose la question des mineurs âgés de quinze à dix-huit ans. En réalité, même si cela n’est pas explicitement dit, nous visons là les mineurs évoluant dans l’environnement de l’entreprise. De fait, les mineurs de moins de quinze ans sont peu nombreux dans le monde professionnel ; pour autant, nous devons veiller à protéger les collégiens qui sont amenés à effectuer des stages de quelques semaines en entreprise et qui peuvent parfaitement faire l’objet de harcèlement sexuel.

Clairement, nous avons en tête la situation des stagiaires qui sont objectivement soumis à l’autorité des salariés de l’entreprise. J’imagine mal un stagiaire, a fortiori mineur, qui exercerait une autorité hiérarchique sur un autre membre du personnel. Aussi, comme l’expliquait le rapporteur, le facteur aggravant est celui de l’abus d’autorité.

En droit pénal, et le rapporteur l’a rappelé, la minorité de quinze ans est un facteur aggravant dans le cas d’infractions telles que le viol. Nous sommes là dans une logique de protection.

Au-dessus de quinze ans, nous nous plaçons dans une logique d’engagement. On peut émanciper un adolescent de seize ans pour l’autoriser, par exemple, à exercer une activité économique, à gérer des biens, etc. De même, on peut autoriser, dans certains cas exceptionnels, le mariage avant dix-huit ans pour permettre la concrétisation d’un engagement, d’un projet de vie. Ce sont donc des logiques différentes, et modifier cette construction aurait des effets en cascade sur le code pénal et retirait à celle-ci toute cohérence d’ensemble.

En outre, la circulaire d’application de la loi précisera que, dans le cas de mineurs qui seraient victimes de harcèlement sexuel, les parquets devront prendre des réquisitions de telle sorte qu’il apparaisse bien que le mineur en question a été particulièrement soumis à un abus d’autorité.

Compte tenu de ces explications, M. Kaltenbach n’a pas à regretter d’avoir retiré son amendement… Je vois d’ailleurs que M. Richard approuve.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion