Intervention de Christiane Taubira

Réunion du 11 juillet 2012 à 21h45
Harcèlement sexuel — Article 1er

Christiane Taubira, garde des sceaux :

En tout cas, nous n’engagerons pas un débat philosophique sur ce sujet cette nuit, je vous le promets.

Concernant la question de la vulnérabilité, j’entends vos arguments, monsieur Hyest. Je souligne simplement que, dans le cas du harcèlement sexuel, la vulnérabilité économique ou sociale est un état particulier qui peut donc devenir un élément incitatif pour les harceleurs. Voilà pourquoi elle constitue un facteur aggravant.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je me félicite que nous soyons réunis dans cet hémicycle pour écrire ce texte de loi, en nous efforçant de bien définir l’incrimination et de sanctionner le délit le plus justement possible, avec toute la sévérité nécessaire mais pas plus que la sévérité nécessaire. Toutefois, force est de constater que nous sommes objectivement un peu moins exposés au harcèlement que la plupart des Français. Certes, on a constaté que ce phénomène s’observait dans toutes les catégories sociales, mais, je le répète, ce sont les personnes vulnérables et fragiles qui, dans notre société, sont le plus massivement touchées par le harcèlement sexuel.

Pour le viol, la condition de vulnérabilité économique ou sociale pourrait parfaitement constituer un facteur aggravant. Pour ma part, je ne serais pas choquée par cette contagion. Autant je suis attentive à la cohérence du code pénal, en veillant à ce que l’on ne désarticule pas toutes les normes en vigueur lorsque l’on introduit des éléments nouveaux, autant je considère que, dans des cas bien précis, certaines dispositions peuvent prendre du sens ailleurs.

Cela étant, telle n’est pas la situation face à laquelle nous nous trouvons : aucun amendement n’a été déposé en vue d’introduire le critère de la vulnérabilité économique ou sociale en cas de viol. Convenons tout au moins que, concernant le harcèlement sexuel, la vulnérabilité économique ou sociale présente, comme la précarité, un caractère plus largement incitatif que dans le cas du viol. Ce constat n’est pas particulièrement satisfaisant, j’en conviens, mais votre réticence ne me paraît pas justifiée quant à l’introduction de ce facteur aggravant.

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