La composition de ce nouveau CSM est-elle de nature à mieux garantir non pas l’indépendance – je n’aime pas beaucoup le terme –, mais, disons plutôt, l’impartialité et la liberté des magistrats ? La réponse, malheureusement, est négative. Elle ne donne pas satisfaction en ce sens qu’elle accentue encore la pression de l’exécutif sur la carrière des magistrats et leur observation de la discipline.
Les membres désignés sont choisis par le chef de l’exécutif et par les présidents des deux assemblées. À l’évidence, le fait majoritaire entravera l’expression du pluralisme nécessaire à l’équilibre démocratique.
La présence parmi eux d’un avocat pose de graves problèmes, et nous y reviendrons lors de la discussion des amendements. Personnellement, je ne vois rien qui puisse justifier cette présence d’un avocat parmi les membres du CSM. On aurait pu penser à d’autres personnalités qualifiées : le premier président de la Cour des comptes, un professeur de droit… Pourquoi un avocat ? Veut-on montrer par là que les défenseurs, ceux qui sont les porte-parole des justiciables, auront une place au sein du CSM ? Je ne pense pas que ce soit le cas !
En outre, cela pose des problèmes pratiques qui sont loin d’être négligeables, à commencer par ceux qui touchent aux modalités de désignation de cet avocat. Pourquoi devrait-il être désigné par le président du Conseil national des barreaux, alors que le conseiller d’État membre du CSM est élu par ses pairs ? La commission des lois revient heureusement sur ce choix, dont nous ignorons les raisons. Ne les cherchons pas trop, de crainte d’en trouver qui nous déplairaient sans doute…
Mais notre reproche essentiel porte sur une exception prévue par le projet de loi au profit de l’avocat : lui seul pourra continuer à exercer sa profession. Aucun des autres membres du Conseil ne peut, pendant la durée de ses fonctions, exercer la profession d’officier public ou ministériel ni aucun mandat électif ni la profession d’avocat. Cela veut au moins dire que le CSM ne comptera pas plusieurs avocats…
Cet avocat pourra donc plaider devant des magistrats dont il connaîtra le déroulement de carrière, voire les poursuites disciplinaires dont ils ont pu faire l’objet. Cela est, à l’évidence, totalement contraire aux règles du procès équitable établies par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme. Il s’agit là d’un point gravissime, sur lequel nous reviendrons lors de la discussion des articles.
De notre point de vue, cet avocat ne doit plus pouvoir exercer sa profession pendant la durée de son mandat ni demeurer associé d’un cabinet de groupe, ce qui reviendrait au même.
Dans ces conditions, c’est la perle rare qu’il va falloir trouver : un avocat qui n’exercera plus ; un avocat qui ne sera pas membre associé d’un gros cabinet ; un avocat proche de la retraite !