M. Badinter – j’allais presque dire maître Badinter… – a exprimé, avec le talent oratoire que chacun lui connaît, son opposition à la réforme constitutionnelle. Outre cette opposition, dont nous avions déjà connaissance, et les conséquences qu’il en tire, il a évoqué un certain nombre de véritables problématiques.
Je pense notamment au mal-être des magistrats. Effectivement, à mon arrivée au ministère, j’ai rencontré des hommes et des femmes profondément investis dans leur mission, fiers d’être magistrats, cultivant une vraie foi dans les valeurs et les principes qui sont les leurs et partageant le sentiment d’agir au nom du peuple français.
Parallèlement, j’ai eu le sentiment que le fonctionnement de l’institution judiciaire, et non de la justice – je pense qu’il faudrait davantage différencier les deux mots –, ne leur offrait ni les locaux ni le système informatique ni les règles qui leur permettraient de travailler au mieux et d’exprimer totalement leur envie d’une justice respectée, admirée, reconnue par les Français.
Il est effectivement important de rappeler la qualité de notre justice, qui est reconnue dans le monde entier, qui est un des éléments du rayonnement de la France, que je veux développer. Bien sûr, il faut être conscient des difficultés qui existent, car il ne servirait à rien de vouloir les occulter.
Ma volonté, c’est justement de mettre toute mon énergie, dans le cadre des attributions qui m’ont été confiées et de la mission que j’ai l’honneur d’exercer, au service de ce renouveau pour créer une justice du XXIe siècle, ancrée et fière de ses valeurs et de ses principes, mais également totalement en phase avec la société.
C’est pourquoi, je l’ai dit et j’aurai l’occasion de le redire au moment du débat budgétaire, je souhaite que la justice bénéficie des meilleures avancées possibles en termes d’organisation, de gestion, d’utilisation des technologies qui sont à notre disposition. Je veux une justice qui soit une référence parmi nos administrations nationales et une référence internationale.
La réforme de la Constitution, monsieur Badinter, n’est pas une marque de défiance à l’égard de la magistrature. Nous n’allons pas refaire le débat constitutionnel, même si vous y avez consacré de longs développements. Le retrait du Président de la République, et du garde des sceaux – mais c’est accessoire –, du Conseil supérieur de la magistrature démontre au contraire, d’une façon à la fois très symbolique et très évidente, que l’on fait confiance à l’institution pour fonctionner.
Le fait que cette institution s’ouvre vers l’extérieur montre qu’elle n’a pas la tentation de se replier sur elle-même, qu’elle ne cède pas au corporatisme et qu’elle est prête à intégrer l’ensemble de la société. Au XXI siècle, aucune institution ne peut effectivement jouer son rôle et se développer si elle est renfermée sur elle-même et si elle ne prend pas en compte tous ceux avec lesquels elle travaille.
Je ne reviens sur les problèmes de parité, dont nous débattrons au cours de l’examen des articles.
Je ne reviens pas non plus sur le statut des magistrats du parquet, que j’ai évoqué tout à l’heure. Nous aurons bien d’autres occasions d’évoquer cette réforme, puisque, comme je l’ai dit, l’avant-projet de texte sera prêt vers la fin du mois de janvier pour, je le souhaite, être discuté, avant l’été 2010. Il nous reste donc pratiquement cinq mois de discussion avant que le projet prenne une forme quasi définitive. Cela donnera l’occasion à chacun de s’exprimer.
Pour notre part, nous pourrons, je l’espère, apporter des assurances par rapport à certains des présupposés qui existent aujourd’hui et démontrer, à travers ce texte, que ce que nous voulons, c’est la justice qu’attendent les Français, c’est-à-dire une justice efficace, transparente et rapide.