L’an dernier, dans son rapport sur la mission « Travail et emploi », notre collègue François Patriat a pu ainsi faire le constat d’une action publique « qui se désengage des politiques actives de l’emploi et de lutte contre le chômage ».
Lors de mes permanences, de mes échanges avec nos concitoyens, j’ai pu mesurer à quel point il est difficile d’être jeune par les temps qui courent.
Selon Pierre Bourdieu, « la jeunesse n’est qu’un mot ». Malheureusement, aujourd'hui, elle souffre de maux, et les chiffres sont terrifiants. Le chômage des moins de vingt-cinq ans s’est envolé : il concerne, en moyenne, 25, 7 % de cette population, et, plus précisément, près de 45 % des jeunes sans diplôme et près de 75 % de ceux qui résident dans nos départements d’outre-mer. Un tel constat est inacceptable, intolérable ! Mais il n’est pas le fruit du hasard, n’est-ce pas mes chers collègues de l’opposition ?
Les jeunes sont les premières victimes de la crise que nous traversons et de la précarisation accrue du marché du travail. C’est sur leurs épaules que repose la flexibilité : la moitié des salariés embauchés en CDD, en stage ou en apprentissage a moins de vingt-neuf ans, alors que la moitié des salariés recrutés en CDI a plus de quarante-trois ans.
Les jeunes servent aussi de variables d’ajustement des effectifs en période de crise ; une sorte de surplus ! C’est ainsi que, chez les jeunes, la proportion d’intérimaires est plus de deux fois supérieure à ce qu’elle est dans l’ensemble de la population active occupée. Et encore, tous ne sont pas logés à la même enseigne : les peu ou pas diplômés, auxquels s’adresse le dispositif que nous étudions, rencontrent le plus de difficultés. Ce sont eux, mes chers collègues, qui grossissent les cohortes des chômeurs. On n’est finalement pas très éloigné de la fameuse « armée de réserve » de travailleurs dont parlait Karl Marx !
Ce sont aussi les jeunes qui subissent l’essentiel de la précarité.
Bien évidemment, cette situation a de fortes répercussions sur leur vie quotidienne. À l’évidence, leurs difficultés d’insertion ne favorisent pas leur autonomie, tant financière que résidentielle.
Sur le plan des revenus, 17 % des jeunes âgés de dix-huit à vingt-neuf ans vit en dessous du seuil de pauvreté, contre13 % dans l’ensemble de la population. En 2008, plus d’un pauvre sur deux avait moins de trente-cinq ans.
En raison de cette précarité, les intéressés doivent faire face à des formes de dépendance très souvent mal vécues. Il faut d’ailleurs rappeler que, contrairement à un cliché en vogue, le fameux « effet Tanguy », ce sont bien les jeunes les moins diplômés, issus de milieux modestes, qui se trouvent confrontés à cette situation. De surcroît, les liens de solidarité familiale sont de plus en plus fragiles du fait de la crise.
Alors est-il étonnant de voir les banlieues s’enflammer ? Est-il surprenant que les jeunes se détournent des urnes ?
De sensible, le décalage entre le discours officiel de la République tenu pendant le dernier quinquennat sur l’égalité et l’investissement dans la jeunesse et la réalité à laquelle celle-ci est confrontée est devenu abyssal. Logiquement, la majeure partie des jeunes sont désabusés. En témoignent les enquêtes d’opinion qui montrent leur pessimisme quant à leur avenir.
Et pourtant, le chômage des jeunes n’est pas une fatalité : plusieurs de nos voisins européens affichent des taux de chômage inférieurs aux nôtres.
La crise n’explique sans doute pas tout. Le chômage des jeunes résulte de plusieurs facteurs, au premier rang desquels figure, bien entendu, l’école : comme cela a été rappelé précédemment, 120 000 jeunes sortent chaque année du système scolaire sans qualification. Or le quinquennat de Nicolas Sarkozy a plongé l’éducation nationale dans une crise sans précédent. En supprimant 93 000 postes, il a amputé l’école de la République de ses moyens humains, de ses forces vives.