Intervention de Aline Archimbaud

Réunion du 26 septembre 2012 à 11h00
Régulation économique outre-mer — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Aline ArchimbaudAline Archimbaud :

Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, comme l'a indiqué Joël Labbé, les membres du groupe écologiste saluent et soutiennent le travail du Gouvernement sur le problème si urgent de la vie chère en outre-mer.

Monsieur le ministre, le texte que vous nous présentez aujourd'hui opère une salutaire révolution – c'est vous qui avez employé ce mot –, eu égard à l'approche retenue. Il n'est plus question de coller des rustines, de se contenter de traiter la partie visible du problème. Au contraire, vous avez fait le choix courageux de vous attaquer aux sources de la vie chère en outre-mer, c'est-à-dire à la manière dont se forment les monopoles et les oligopoles, ainsi que les prix.

Nous sommes bien conscients que ce texte n'est que la première partie du dispositif que vous souhaitez mettre en place pour garantir aux ultramarins des prix raisonnables. Nous imaginons que la créativité du Gouvernement l'amènera à compléter ce projet de loi, par la recherche de voies complémentaires pour maîtriser les prix en outre-mer.

Aussi les sénateurs écologistes souhaitent-ils profiter de l'occasion pour vous proposer deux autres pistes de réflexion, visant également à s'attaquer à la racine du problème.

C'est pourquoi nous serons amenés, au cours de l'examen de ce texte, à soumettre à votre vote, mes chers collègues, deux demandes de rapport, en partant du constat partagé que les économies des territoires ultramarins sont particulièrement dépendantes des importations et que ceux-ci présentent un important déficit structurel de leur balance commerciale, au profit de la France hexagonale. Les marchandises sont ainsi transportées sur de longues distances, ce qui pèse lourdement sur les prix et entraîne une dégradation de l'empreinte carbone des biens consommés outre-mer.

Le premier rapport d'information gouvernemental que nous demandons aurait pour objet de nourrir la réflexion sur les mesures à prendre pour encourager et dynamiser l'ouverture des marchés locaux aux produits locaux, afin d'offrir à ceux-ci davantage de débouchés de proximité et donc de promouvoir les filières courtes.

Le second rapport que nous demandons porterait sur les moyens de développer les échanges commerciaux régionaux entre les territoires ultramarins et leurs voisins au sein des quatre grandes régions concernées : la Caraïbe, l'océan Indien, le Pacifique et l'Océanie.

Par ailleurs, un troisième amendement tendra à proposer la création d'un comité de suivi chargé d'évaluer l'application de la présente loi. Les dispositions de ce projet de loi nous paraissent prometteuses, mais, comme souvent d'ailleurs, tout dépendra de la manière dont elles seront mises en œuvre. Quel usage le Gouvernement fera-t-il des nouveaux outils qui vont lui être conférés ? Suffisamment de moyens seront-ils donnés à l'autorité de la concurrence pour qu'elle puisse mener à bien les missions qui lui sont confiées ?

Surtout, il s'agit, en vertu du principe de subsidiarité, d'associer les acteurs locaux au suivi de l'application du présent texte. Ce comité de suivi serait ainsi composé, en plus de représentants du Gouvernement et de parlementaires, d'élus locaux, de représentants d'associations et de syndicats, qui enrichiraient la réflexion de leur connaissance particulièrement fine du terrain.

En ce qui concerne la seconde partie de ce projet de loi, beaucoup plus générale, les écologistes souhaitent tout d'abord apporter une précision à l'article 8.

Étant donné la difficulté des collectivités locales ultramarines à s'autofinancer, la suppression, les concernant, de l'obligation de participation minimale de 20 % au financement des projets dont elles assurent la maîtrise d'ouvrage est salutaire. Cela permettra de faciliter la structuration économique de ces territoires.

Cependant, pour que les sommes ainsi fléchées soient utilisées le plus efficacement possible, il nous paraît opportun de conditionner leur affectation au caractère social ou environnemental des opérations concernées. Par exemple, les collectivités d'outre-mer ont un besoin urgent de structures de transports collectifs, de moyens de production d'énergies renouvelables, de centres de stockage des déchets et de réseaux d'assainissement. Par cette proposition, nous souhaitons faire en sorte que les financements aillent en priorité à ce type de projets durables, économiquement structurants et pourvoyeurs d'emplois locaux.

Enfin, les sénateurs écologistes ont souhaité profiter du caractère délibérément très large du champ du second chapitre de ce projet de loi pour présenter deux amendements visant à améliorer considérablement la situation sanitaire en outre-mer, concernant l'un les épandages aériens, l'autre le taux de sucre dans les aliments.

Nous proposons tout d'abord d'interdire les épandages aériens, en supprimant toute possibilité de dérogation. C'est en effet en outre-mer qu'il y est le plus recouru, alors même qu'il est reconnu que ce mode d'épandage de pesticides est une menace pour la santé des habitants, ainsi que pour la faune et la flore. La catastrophe environnementale et sanitaire du chlordécone, dont la population n'a pas fini de payer les conséquences, ne doit pas se reproduire, et il convient donc de ne plus tolérer de dérogations à l'interdiction des épandages aériens.

Enfin, notre dernier amendement vise à interdire que les produits commercialisés dans les régions d'outre-mer contiennent un taux de sucre plus élevé que les mêmes produits de même marque vendus dans l'Hexagone, comme c'est souvent le cas actuellement. Cette situation, qu'aucun argument objectif ne justifie, a des effets directs sur la santé des ultramarins, 25 % des enfants et adolescents et plus d'un adulte sur deux présentant une surcharge pondérale.

Au travers de la défense des amendements que nous présenterons dans la suite de la discussion, il ne s'agira en aucun cas, pour nous, de manifester un désaccord avec le présent projet de loi, mais bien de montrer tout notre intérêt pour les réformes qu'il tend à introduire, en les appuyant et en proposant d'aller parfois encore un peu plus loin.

Nous espérons que nos propositions sauront retenir votre attention. §

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