Édifiant, n'est-ce pas ?
Je vous souhaite donc beaucoup de courage et de détermination, monsieur le ministre, car il est vital pour les économies d'outre-mer de faire sauter le terrible verrou que représentent les économies de comptoir, encore florissantes, hélas !
Seules la concurrence et la transparence, notamment dans la composition des prix, seront à même de modifier en profondeur le paysage du coût de la vie. Il convient d'encourager et de promouvoir les mécanismes naturels de régulation et d'équilibre. Par exemple, l'obligation de publier les différentes étapes de formation du prix des produits est certainement un moyen de contourner les résistances. L'ouverture des marchés à la concurrence par le biais d'incitations, y compris fiscales, pourra jouer un rôle positif, notamment en matière de transport aérien, mais à la condition d'assurer un suivi et une protection du marché contre toute entente.
Pour des raisons institutionnelles et de compétences, le présent projet de loi visant à la lutte contre la vie chère ne concerne ni la Nouvelle-Calédonie ni la Polynésie française. Pourtant, l'expérience démontre que c'est dans ces territoires que le coût de la vie est le plus élevé. Que l'on ne nous oppose pas l'argument de l'éloignement, car j'ai pu voir un produit métropolitain de consommation courante vendu presque deux fois moins cher dans un magasin de Port Vila, au Vanuatu –archipel encore plus lointain –, que dans les grandes surfaces de Nouméa, en Nouvelle-Calédonie.
Aussi, dans l'intérêt tant des consommateurs que des économies locales, il serait utile de conduire une action de conseil et d'accompagnement auprès des gouvernements de ces territoires afin qu'ils entreprennent, eux aussi, les efforts nécessaires pour lutter avec efficacité contre les monopoles, les positions dominantes, les abus de marges commerciales et qu'ils ramènent les prix à un niveau raisonnable.
Je terminerai mon intervention en évoquant brièvement les mesures que vous souhaitez prendre par ordonnance, monsieur le ministre, pour lutter contre l'immigration clandestine à Mayotte.
J'ai participé, sous la conduite du président Jean-Pierre Sueur et en compagnie de mon collègue Félix Desplan, à une mission d'information de la commission des lois du Sénat à Mayotte, dont le rapport propose beaucoup de pistes de réflexion et de solutions. M. le rapporteur pour avis de la commission des lois en sait quelque chose. Nous avons pu constater que, malheureusement, les efforts remarquables effectués ces dernières années pour lutter contre l'immigration clandestine, assortis de sévères conditions d'accès au territoire du fait de la délivrance au compte-gouttes des visas, étaient désormais devenus vains. Ça a marché, mais ça ne marche plus ! Il ne faut pas se voiler la face, notre dispositif de sécurité aux frontières de Mayotte, bien que très coercitif, est devenu une passoire. Il faut donc en changer.
La départementalisation de Mayotte représente une chance considérable pour son développement économique et social, mais celui-ci tient à une condition incontournable : le développement économique des Comores, grâce à une coopération régionale bien comprise et bien maîtrisée avec Mayotte. La France en détient les clés. Elle peut faire un geste fort en relançant le principe de libre circulation dans l'archipel. Il lui suffit de remplacer le « visa Balladur » par un visa délivré à l'arrivée sur le territoire à tout détenteur d'un passeport comorien en règle, avec prise d'empreintes et de photographie, de manière à connaître exactement les entrées et les sorties et à pouvoir, le cas échéant, reconduire à la frontière ceux qui ne respecteraient pas la durée autorisée de séjour. Tout Comorien en situation irrégulière serait donc toujours obligé, avec ce nouveau dispositif, de quitter le département. Cette main tendue n'aurait pas seulement une haute valeur symbolique ; elle créerait également les conditions d'un essor économique partagé, indispensable au développement de Mayotte, cent-unième département français.
Il y a encore, bien entendu, beaucoup de choses à dire sur le présent projet de loi, monsieur le ministre, mais j'en resterai là, car je dépasse le temps de parole qui m'est imparti.
Ce texte a au moins un mérite : celui d'exister. Pour moi, il ne va pas assez loin, et surtout il n'est pas assez fort, mais comme je préfère un bon « tiens » à rien du tout, monsieur le ministre, à titre personnel, je le voterai. §