Intervention de Victorin Lurel

Réunion du 26 septembre 2012 à 11h00
Régulation économique outre-mer — Articles additionnels après l'article 9

Victorin Lurel, ministre :

Le Gouvernement est également défavorable à ces amendements.

La doctrine gouvernementale en la matière a été livrée par Stéphane Le Foll à l'Assemblée nationale, en réponse à une question d'actualité : nous sommes contre les épandages mais, compte tenu du contexte et des intérêts en jeu, nous sommes bien obligés de « faire avec ».

Un bilan des dérogations sera effectué avant la fin de l'année 2012. Nous aviserons alors.

M. le rapporteur vous a donné quelques éléments concernant la banane. Pour ma part, je rappelle que la Martinique produit 200 000 tonnes de bananes et que la Guadeloupe, 70 000 tonnes. Comme vous l'avez indiqué, monsieur le sénateur, entre dix et douze traitements aériens ciblés sont pratiqués dans ces départements. Au Costa-Rica, au Guatemala, bref dans toute la Méso-Amérique, ce sont entre cinquante-deux et soixante traitements qui sont effectués pour traiter la cercosporiose noire.

Il faut savoir que la cercosporiose noire entraîne la mort de la banane en six ou neuf mois. Ainsi, Sainte-Lucie a perdu sa banane d'exportation en neuf mois. Si on ne traite pas la banane en Martinique et en Guadeloupe, la même chose s'y produira.

Par ailleurs, j'ajoute que, à l'heure actuelle, la toxicité des huiles fongicides, qui ne sont pas des pesticides n'est pas prouvée, alors que nous disposons de nombreuses études sur ce sujet.

Compte tenu de ces éléments – l'état actuel des connaissances, les études dont nous disposons et l'engagement qui a été pris d'effectuer un bilan des dérogations –, nous avons renouvelé la dérogation pour six mois, en l'assortissant de conditions drastiques, en prévoyant en particulier l'utilisation de GPS afin de bien cibler les zones à traiter.

Par ailleurs, les instituts techniques de la banane mettent actuellement au point un tracteur chenillé équipé d'un mât télescopique permettant de surplomber la canopée et de traiter la banane. Toutefois, il faut savoir que, si cette innovation technologique était adoptée, elle ne permettrait pour le moment de traiter que les bananes en plaine, donc dans les grosses exploitations, lesquelles correspondent à une certaine catégorie sociale, que je respecte. Les petites propriétés, qui correspondent à une autre catégorie sociale, celle des défavorisés, ne pourront pas être traitées de cette manière. Nos bonnes intentions risquent donc de nous conduire à mener une mauvaise politique et à accroître le clivage du secteur de la banane. C'est dire que, avant de prendre une décision, nous devons prendre le temps de la réflexion.

Pour ma part, j'ai été accusé d'avoir contribué à autoriser l'utilisation du chlordécone, alors que c'est la commission d'étude de la toxicité du ministère de l'agriculture qui délivre l'autorisation d'utiliser des pesticides. Cette accusation m'a néanmoins beaucoup affecté. Ce que je peux vous dire, c'est que ma belle-famille vit en pleine région bananière, où des épandages sont effectués, et cela se passe relativement bien pour le moment.

Nous devons rester vigilants, mais aussi savoir sauvegarder des intérêts.

Comme l'a indiqué M. le rapporteur, la banane guadeloupéenne et martiniquaise est la plus propre du monde, à tel point que la région de Guadeloupe finance à hauteur de 6 millions d'euros l'exportation dans toute la Caraïbe du savoir-faire des planteurs de bananes, afin de diminuer les quantités de pesticides utilisées, en particulier le chlordécone.

Je vous prie donc, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer ces amendements. Nous ferons ensuite le point en fin d'année ou en début d'année prochaine.

J'ajoute pour finir que cette question concerne non seulement les Antilles, mais également, dans vingt régions hexagonales, 100 000 hectares de betterave, de maïs, de riz et de vigne. Et pourtant, nous buvons tous du vin, moi en tout cas !

Je vous engage donc à faire confiance, monsieur le sénateur, tout en restant vigilant.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion