Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, les mesures proposées dans ce projet de loi visent à lutter contre la vie chère en facilitant le jeu de la concurrence, afin d’améliorer la chaîne de formation des prix dans les outre-mer.
L’Autorité de la concurrence a d’ailleurs observé à plusieurs reprises, au travers de ses différents avis rendus depuis 2009, que les frais de transport et l’octroi de mer ne justifient pas à eux seuls des écarts de prix pouvant aller jusqu’à plus de 55 % entre la métropole et les marchés ultramarins. Les mesures envisagées, conformes au droit européen, vont dans le sens d’un renforcement de la régulation, au niveau tant des importateurs grossistes que des détaillants.
La boîte à outils mise en place au travers de ce texte renforcera l’arsenal juridique dont disposent les pouvoirs publics pour remédier aux atteintes au principe de liberté des prix et de la concurrence, lesquelles privent tous les consommateurs, ainsi que, bien souvent, les entreprises, du bénéfice de produits et de services de qualité au meilleur prix.
J’approuve donc l’amendement du Gouvernement prévoyant la tenue d’une négociation annuelle dans chacune de nos collectivités ultramarines, un accord de modération du prix global pour une liste de produits de grande consommation et l’intervention du préfet en cas d’échec de ces négociations.
En effet, il était nécessaire de réviser cet arsenal juridique, qui n’avait le pouvoir de contraindre le marché et de réglementer les prix que dans des situations très exceptionnelles, comme celles de catastrophe naturelle, pour prendre un exemple extrême.
Ce projet de loi marque donc une grande avancée dans la lutte contre la vie chère. Son adoption permettra d’accroître la marge de manœuvre du Gouvernement dans cette lutte, ainsi que celle des collectivités, en leur permettant de saisir directement l’Autorité de la concurrence, et de renforcer les pouvoirs de cette dernière outre-mer.
Ce texte est une des solutions au problème de la vie chère. Toutefois, nous savons qu’il nous faudra approfondir d’autres pistes dans les mois prochains. Ce texte est un premier acte posé dans la lutte contre la vie chère outre-mer ; il est nécessaire, mais il doit être conforté.
Je pense notamment à la possibilité, voire la nécessité, de développer des échanges commerciaux avec nos voisins proches, par exemple la zone Caraïbes ou l’Amérique latine. Aujourd’hui, en raison de notre appartenance à l’Union européenne, nous sommes soumis à des normes dont je ne remets pas en cause le bien-fondé, mais qui sont parfois un élément contraignant. Si ces normes, dans leur dessein initial, visent à nous protéger, cette protection devient dans certains cas une contrainte trop importante. N’y a-t-il pas là matière à réflexion et à négociation avec les instances européennes sur cette réalité, afin de dégager un facteur supplémentaire d’amélioration de la concurrence dans nos territoires ?
Prenons l’exemple concret de l’approvisionnement en carburant. Si, aujourd’hui, la Guadeloupe pouvait s’approvisionner auprès de pays exportateurs de pétrole de sa zone régionale, tel le Venezuela, le prix du carburant à la pompe en Guadeloupe pourrait être réduit de façon significative, et ce gain ne serait pas négligeable pour le pouvoir d’achat des Guadeloupéens.
Je veux aussi appeler l’attention du Gouvernement sur la nécessaire mise en œuvre rapide de la loi après son vote. Je sais que vous avez déjà pris des engagements sur ce point, monsieur le ministre, mais il importe vraiment que, une fois la loi promulguée, les décrets d’application soient rapidement publiés, afin que les différentes mesures prennent leur plein effet dans les meilleurs délais. Rappelons-nous, à cet égard, du retard pris dans la publication des décrets de la loi pour le développement économique des outre-mer, la LODEOM.
S’agissant du cas particulier des carburants, la crise économique actuelle appelle des mesures urgentes. Certaines d’entre elles, non mises en œuvre à ce jour, avaient été proposées au travers des nombreux rapports élaborés à la suite des mouvements sociaux de 2009. Je pense notamment à la filialisation des activités de stockage de la société anonyme de raffinerie des Antilles, la SARA, à l’ouverture du stockage à de nouveaux importateurs et à l’affichage des prix dans les stations-service, ainsi qu’à l’arrêt de la publication de prix plafonds, sur lesquels tous les distributeurs s’alignent, ce qui fausse le libre jeu de la concurrence. Dans ce domaine particulier, vous vous êtes déjà engagé à prendre rapidement des mesures, monsieur le ministre : ce serait un signal fort adressé à nos populations.
Je m’interroge également sur le rôle et les moyens de l’Observatoire des prix et des revenus. Malgré sa récente réforme, l’Observatoire des prix de la Guadeloupe peine à publier des comparaisons avec la métropole, ce qui nuit à l’information du consommateur et, d’une certaine manière, à la transparence des prix. Le Gouvernement a-t-il l’intention, monsieur le ministre, de renforcer les moyens de cet organisme ?
Enfin, il me semblerait opportun de mettre en place une réglementation des tarifs bancaires pour tenter de corriger d’éventuelles situations de monopole dans un secteur qui n’est pas exempt de comportements abusifs, contre lesquels nous souhaitons également lutter. Je sais que je ne vous apprends rien sur ce sujet, monsieur le ministre, et je connais votre engagement en la matière. En tout état de cause, les comparatifs publiés annuellement placent les outre-mer aux premiers rangs des départements les plus chers à cet égard. Le Gouvernement envisage-t-il de prendre quelques mesures concernant ce secteur ?
Monsieur le ministre, je sais que la promotion de la production locale, dont nous devons favoriser le développement, est aussi une priorité pour vous.
En fait, la lutte contre la vie chère appelle le recours à des moyens multiples. Elle doit mobiliser l’ensemble des acteurs publics – Gouvernement, collectivités, Autorité de la concurrence, observatoires des prix –, mais également la société civile, par le biais notamment des associations de consommateurs et des médias. Pour être véritablement efficace, elle ne pourra être que collective.
Je formule donc le vœu que la nouvelle loi soit le premier outil en vue du règlement du problème du pouvoir d’achat des ultramarins. Vous avez dit, monsieur le ministre, que ce texte marquait le début d’une révolution ; nous serons à vos côtés dans le combat pour faire gagner nos territoires !