Intervention de Françoise Holder

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 27 septembre 2012 : 1ère réunion
Femmes et travail — Audition de Mme Françoise Holder présidente du comité égalité hommes-femmes du mouvement des entreprises de france medef accompagnée de Mme Hélène Molinari directrice générale déléguée

Françoise Holder, présidente du comité égalité hommes-femmes du Mouvement des entreprises de France (MEDEF) :

J'ai cessé mes activités de magistrat consulaire et en ai profité pour prendre la présidence de Force Femmes, association qui mobilise 350 bénévoles et sept salariées dans dix antennes régionales pour aider les femmes de plus de 45 ans à trouver un emploi ou à créer leur entreprise. Nous nous sommes occupées de 13 000 femmes, dont 30 % ont retrouvé un emploi salarié.

Au MEDEF, après m'être longtemps occupée de dialogue économique, je suis depuis deux ans en charge du comité égalité hommes-femmes, sujet crucial pour les entreprises et pour l'ensemble de la société. Les femmes n'occupent en effet encore que 20 % des postes décisionnels. Malgré les lois, les réglementations ou les quotas, les discriminations dans l'entreprise demeurent. D'où la naissance de ce comité, la conviction de Laurence Parisot étant qu'une entreprise fonctionne bien lorsqu'elle résout les problèmes de société, faute de quoi la compétitivité n'est pas au rendez-vous. Le comité a travaillé dans quatre directions.

D'abord, faire évoluer les mentalités en cassant les stéréotypes, ce qui conduit à remonter bien au-delà du cadre de l'entreprise puisque pour les femmes la frontière entre vie professionnelle et vie privée n'est pas étanche et que les stéréotypes sont partout, des livres scolaires jusqu'aux publicités. Cette action doit être menée dans tous les domaines, y compris dans le monde politique : on ne devrait plus entendre de quolibets dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale lorsqu'une femme s'y présente en robe. Nous rédigeons actuellement un petit livre de résistance contre ces stéréotypes qui nous servira de support pour aller débattre dans les régions, avec l'ensemble des organisations professionnelles. Il ne faut pas en rester à une approche parisienne !

Notre deuxième objectif est de parvenir à une meilleure conciliation de la vie privée et de la vie professionnelle et à un meilleur partage des tâches familiales, ce qui nous a conduit à travailler avec le laboratoire de l'égalité, à signer la charte de la parentalité et à encourager la création de crèches ou de conciergeries . En France, contrairement à ce l'on observe aux Etats-Unis ou dans les pays du Nord, 80 % des tâches familiales incombent aux femmes, le temps que les hommes y consacrent n'ayant augmenté que de six minutes au cours des dix dernières années. Ce sont des sujets dont il faut aussi parler aux hommes car ils sont aussi, parfois, frustrés de pas pouvoir se consacrer davantage à leurs enfants, de ne pas pouvoir prendre tout leur congé de paternité ou partir du bureau à 18 heures. Au-delà des lois, il faut donc déplacer plusieurs petits curseurs. Mais lorsque je vois comment se comportent les jeunes pères, ceux qui sont issus de cette fameuse génération Y dont on parle tant, je crois qu'on peut être optimiste.

Troisième objectif, la mise en place de politiques managériales favorables à l'égalité dans le déroulement de carrière et à l'égalité salariale, tout d'abord en renonçant à un présentéisme forcené. Etre un cadre formidable exige-t-il de rester systématiquement jusqu'à huit heures du soir ? Pour certaines activités, pourquoi ne pas profiter de la possibilité d'un ou deux jours de télétravail par semaine ou par mois ? Ne peut-on pas éviter de tenir des réunions importantes le mercredi ou le soir ? Ce que j'ai mis en place dans mon entreprise confirme que tout cela ne nuit pas à la compétitivité.

A compétences égales, une partie des inégalités salariales s'explique par les différences de déroulement de carrière : les arrêts maternité, le temps partiel pénalisent les femmes pour la retraite. Ne pourrait-on pas valoriser ces périodes ? On ne perd pas ses qualités intellectuelles du fait que l'on consacre du temps à l'éducation de ses enfants ! Plus grave encore, cette inégalité salariale se constate dès l'embauche. C'est inacceptable et il faut que le législateur intervienne car il ne s'agit plus, ici, d'influencer les pratiques managériales mais de faire respecter une exigence de justice.

Alors que les filles sont majoritaires dans les universités et les écoles, ce sont ensuite les hommes qui deviennent le plus souvent cadres supérieurs car beaucoup de femmes n'osent pas prendre le job. Pour prendre une métaphore que m'inspire mon secteur d'activité - la société Holder SAS regroupe les Boulangeries Paul et Ladurée - je dis souvent que la vie des femmes est un millefeuille. Mais en ne renonçant à aucun de leurs rôles, les femmes sont rapidement acculées au sentiment d'étouffer, elles ont peur de ne pas y arriver. Il faut donc mettre sur pied des formations spécifiques pour encourager les femmes à sauter le pas.

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