Intervention de Maurice Vincent

Réunion du 2 octobre 2012 à 9h30
Débat sur l'application de la loi relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision

Photo de Maurice VincentMaurice Vincent :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, nous sommes ici pour débattre des résultats de la loi du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, trois ans après son adoption.

Cette loi fixait plusieurs objectifs qui ont été abondamment commentés.

Le premier objectif était de réduire la dictature de l'audimat. Ce soir, quelle que soit notre appartenance politique, nous avons tous constaté que cet objectif n'avait pas été atteint.

Le deuxième objectif était de transposer deux directives européennes dans le droit français, l'une sur les médias audiovisuels, l'autre sur la télévision sans frontières. Sur ce point, tout le monde s'est accordé pour dire que la loi avait été utile et qu'elle avait consacré une modernisation du droit français.

Le troisième objectif était de refondre le modèle économique de financement du service public, en supprimant la publicité après 20 heures. Deux conséquences de cette mesure apparaissent aujourd'hui clairement, de mon point de vue. D'abord, et cela n'a peut-être pas été suffisamment souligné, cette suppression s'est en effet traduite par un accroissement important des ressources financières du secteur privé, à laquelle fait écho une sorte de précarité financière de l'audiovisuel public.

En effet, le financement de la réforme a été marqué par la création de deux nouvelles taxes, qui ont été largement explicitées, et qui sont pour moi marquées du sceau de l'amateurisme et de la confusion.

Amateurisme pour la première taxe, celle sur les recettes publicitaires des opérateurs privés, qui devait susciter une ressource de 450 millions d'euros, mais qui en a rapporté à peine un peu plus de la moitié.

Confusion pour la seconde de ces taxes, assise sur le chiffre d'affaires des opérateurs de téléphonie, qui s'est révélée plus rentable, mais qui fait l'objet d'une grave contestation de la part de la Commission européenne. Comme cela a été souligné, le risque est aujourd'hui important pour notre pays de devoir rembourser ces sommes.

Le gouvernement actuel se trouve donc aujourd'hui contraint de faire face à ces engagements très importants. Il devra peut-être provisionner des sommes, et en tout cas trouver de nouvelles ressources stables pour l'audiovisuel public.

Un quatrième objectif était de changer de mode de nomination des présidents de sociétés de l'audiovisuel public. Chacun a pu donner son avis sur la question. Quant à moi, je constate que cet objectif a conduit à une intrusion beaucoup plus directe que par le passé du pouvoir politique dans les choix des responsables.

La loi avait un cinquième objectif, la fusion des différentes sociétés de France Télévisions ; elle a été à peine engagée, conduite très partiellement avec une méthode et une approche qui produisent – chacun le voit – une lourde inquiétude pour les agents des sociétés concernées.

Le gouvernement actuel hérite donc d'un dossier particulièrement difficile, doté d'une sorte de bombe à retardement financière dans le contexte général très difficile des finances publiques de notre pays. C'est à lui qu'il reviendra de remettre en place un système de financement stable pour notre audiovisuel public.

À cet instant – et pour me tourner rapidement vers l'avenir –, je voudrais souligner une des dimensions particulières de notre système audiovisuel public : sa relation avec nos territoires. Il existe, je le rappelle, un fort attachement des populations, dans toutes les régions de France, à une information liée à leurs territoires et pluraliste. Cet attachement est d'autant plus important que la mondialisation de l'information se développe.

L'une des spécificités du service public est justement qu'il est très implanté sur le territoire à un moment où, dans le contexte que nous connaissons, à l'inverse, la presse quotidienne régionale est souvent réduite à un seul titre et où les quotidiens gratuits diffusés dans les villes ne donnent souvent que des informations minimalistes.

Enfin, les radios commerciales, qui sont nombreuses, restent essentiellement axées sur le divertissement.

Pour ces raisons, la présence d'un service public puissant et diversifié me semble importante, madame la ministre, qu'il s'agisse de la télévision publique ou de Radio France, une radio dont chacun constate et apprécie aujourd'hui la grande qualité.

Je voudrais souligner, en terminant, qu'il me paraît important de réfléchir à une organisation de notre secteur audiovisuel public qui garantisse pleinement les capacités des chaînes à remplir ces missions, particulièrement sur l'ensemble des territoires, ce qui ne doit pas être incompatible, me semble-t-il, avec une bonne gestion des deniers publics et la recherche d'une réelle maîtrise des équilibres budgétaires.

Tel est, de mon point de vue, l'un des enjeux majeurs de la période à venir et je vous souhaite, madame la ministre, compte tenu de la situation, bon courage pour aller au bout de cette lourde tâche !

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