Intervention de Jean-Louis Vielajus

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 3 octobre 2012 : 1ère réunion
Avenir de la politique de coopération française au développement — Table ronde

Jean-Louis Vielajus, président de Coordination Sud, délégué général du Comité français pour la solidarité internationale :

Les deux évaluations de la politique française tombent à point nommé. Les ONG de Coordination Sud approuvent, pour l'essentiel, leurs conclusions - difficultés de pilotage, problèmes opérationnels,... J'ajouterai que la multiplication des effets d'annonce au cours de ces dernières années a nuit à la prévisibilité et à lisibilité de notre aide publique au développement.

Dénonçant toutes ces difficultés à chaque loi de finances depuis sept ans, nous venons d'éditer une nouvelle version de notre document L'APD pour les nuls.

Alternance démocratique, volonté politique clairement exprimée par la création d'un ministère du développement et mobilisation parlementaire : le moment est bien choisi pour évoquer l'avenir. D'autant que selon le dernier sondage commandé par l'AFD et publié en 2011, 63 % des Français sont favorables à l'aide publique au développement et 55 % considèrent qu'elle est efficace pour lutter contrer la pauvreté et le réchauffement climatique. J'ignore de quels éléments ils disposent pour fonder leur jugement...

N'oublions pas non plus les avancées de 2010, dans le document cadre global de la politique de coopération au développement, qui croise pour la première fois des informations sur la pauvreté et sur les biens publics mondiaux ainsi que des données géographiques. Dommage que le document n'ait pas été complété par une programmation financière et une hiérarchisation des priorités. Sans considérations de droit, de régulation, de politiques publiques internationales, sans référence aux droits humains, la stratégie perd en puissance et ne saurait être une vraie stratégie de coopération et développement.

Nous serons appelés à dépasser l'exercice du document de 2010 pour définir véritablement le cadre d'une politique de coopération pour les années à venir. Ainsi 2015 est une date clef pour les objectifs du millénaire pour le développement durable, un peu perdus de vue à Rio. Ils seront rediscutés pour répondre aux besoins du temps : toujours la pauvreté.

Mais si la pauvreté diminue dans un certain nombre de pays émergents, les inégalités explosent dans presque tous les pays du monde et constituent la plaie des temps qui viennent. La réduction des inégalités est un enjeu autant moral ou social qu'économique, un élément essentiel dans la conception des politiques qui viennent.

Quatre points me tiennent à coeur. D'abord, j'appelle de mes voeux la concrétisation de l'engagement présidentiel d'une loi d'orientation et de programmation pluriannuelle. Deuxièmement, les ONG doivent se préoccuper prioritairement des pays pauvres et en crise. Elles doivent intervenir non seulement dans les situations d'urgence humanitaire, mais aussi ensuite, car la crise, généralement, persiste. La question du lien entre crise, urgence et développement doit être prise en compte pour mieux définir nos interventions.

Troisièmement, instillons plus de cohérence dans les politiques française et européennes en matière de développement. Inutile de dépenser beaucoup si les politiques se contredisent. Un exemple classique est l'agriculture européenne : d'un côté les crédits en faveur du développement soutiennent l'agriculture familiale, tandis que la politique agricole commune se déploie aux dépens de cette agriculture familiale. Une rationalisation dégagerait des crédits pour d'autres actions en faveur du développement.

Enfin, d'un point de vue financier, on constate avec inquiétude une baisse de 200 millions d'euros des crédits de la mission APD. M. le Ministre a annoncé son intention d'augmenter la part des dons dans l'aide et nous le soutenons. Quelle sera la part de la taxe sur les transactions financières affectée au développement : 10 % ou 3,75 % ? Nous avons quelque inquiétude.

Nous ne progresserons que si tous les acteurs de la solidarité travaillent ensemble. C'est le sens des Assises du développement et de la coopération internationale lancées par le ministère. Les grands dossiers y seront évoqués. C'est une très bonne nouvelle.

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