Intervention de Pascal Canfin

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 3 octobre 2012 : 1ère réunion
Avenir de la politique de coopération française au développement — Table ronde

Pascal Canfin, ministre délégué auprès du ministre des Affaires étrangères, chargé du développement :

Votre rapport, celui de la Cour des Comptes, ou celui à venir de l'OCDE, interviennent en début de législature, tirent un bilan du passé et je ne me sens donc pas visé par les critiques. Mais il appartient désormais de se tourner vers l'avenir.

Je commencerai par la question du 0,7 % de RNB consacré au développement. On peut douter de la pertinence de cet indicateur dit structurant. Je suis surpris que les ONG réclament son respect tout en étant les premières à le critiquer comme une pure convention comptable. Il n'a pas grand sens. A titre d'anecdote, la facture de chauffage des centres de rétention a longtemps été comptabilisée - et peut-être l'est-elle encore ! - dans l'aide au développement. Qu'on pousse la température de quelques degrés et l'on se rapproche de l'objectif...

Avec Pierre Moscovici, je combats en faveur de la transparence des investissements. Si les grandes entreprises réalisent un reporting pays par pays, on saura ce qu'elles gagnent et ce qu'elles paient en impôts dans chaque pays. On luttera contre la corruption plus efficacement.

La directive sur la transparence a été votée au Parlement européen récemment, et revient désormais devant les États. Si la France s'empare politiquement de cette question, cela aura un impact financier important, alors même qu'il s'agit d'une action à coût nul pour la France, et utile.

Deuxième point : la politique de développement est une tuyauterie complexe. Or quels en sont les résultats concrets ? Certaines politiques d'aide publique au développement peuvent s'avérer contre-productives. Nous avons déjà amélioré le pilotage et depuis l'enquête menée par la Cour des comptes, il y a dix-huit mois, les choses ont bien changé.

Nous voulons changer cet état de fait. Les résultats ne dépendent pas des canaux de l'aide, mais des objectifs concrets retenus. Quoi choisir : ouvrir une centrale solaire, développer des infrastructures, soutenir l'agriculture exportatrice, ou l'agriculture paysanne ?

Le gouvernement actuel fait des choix, auxquels il associe l'AFD. Lors du prochain conseil d'administration de l'agence, il présentera un nouveau cadre sectoriel d'intervention en matière énergétique, d'un montant de 5 à 6 milliards d'euros pour les trois prochaines années. Il portera en priorité, s'il est adopté, sur les énergies renouvelables et l'efficacité énergétique.

Dès lors que le choix politique est clair, quelles sont les modalités de pilotage ? Nous avons fait en sorte d'unifier la parole de l'État, entre le Quai d'Orsay et Bercy notamment, par l'instauration de discussions informelles entre les administrateurs des différents ministères à l'AFD. Dans la période récente, l'Etat ne parlait pas d'une seule voix. Le gouvernement veut désormais affirmer une politique claire, tandis que l'agence est chargée du management.

Les Assises du développement et de la solidarité internationale, engagement du Président de la République, se tiendront d'octobre à mars et constitueront un moment important d'échanges avec la société civile et avec tous les partenaires : ONG, élus locaux, entreprises, partenaires du Sud, etc.

Cinq thèmes seront abordés. Les objectifs du développement durable et les objectifs du millénaire, tout d'abord. Quel sera le mode de développement dans un monde aux ressources limitées ? C'était l'agenda Rio + 20. C'est aussi la question du climat ; j'étais à New York la semaine dernière pour participer à la négociation sur ce sujet. Quel espace carbone laisser pour le développement, dans un budget mondial contraint ?

Le deuxième thème est la transparence. Comme Jean-Michel Severino, j'ignore à quoi sert l'aide au développement, dans le détail : combien de kilomètres de routes, combien de malades du sida sauvés, combien de classes ouvertes ? Aucun document synthétique n'existe actuellement. En dépit des problèmes méthodologiques, il faut élaborer un document unique, à l'image de ce qu'ont fait les Britanniques. Profitons des Assises pour élaborer une méthodologie. Nous pourrons enfin dire à quoi servent les 9,5 milliards d'euros consacrés au développement. La direction de la mondialisation et l'AFD ont commencé cette réflexion. Il faut agréger notre action, le multilatéral, le bilatéral, l'action européenne,...

Quelle a été la contribution de l'aide française à la hausse du PIB du Burkina Faso ces cinq dernières années ? Nous sommes incapables de le dire, en raison des nombreux paramètres. En revanche, disposer d'indicateurs concrets - nombre de vaccins, de kilowatts-heure, etc. - nous fournira une évaluation plus tangible, au moins sur les éléments matériels.

Troisième thème aux Assises, l'innovation, technologique, organisationnelle,... Oui les réseaux de téléphones portables constituent un élément essentiel du développement, je songe au mobile banking au Kenya. Avec ma collègue Fleur Pellerin, nous réfléchissons aux moyens de promouvoir l'innovation numérique au service du développement.

Quatrième thème : comment intégrer la société civile ? Un Haut conseil de la coopération internationale avait été créé dans le passé. Adepte du pragmatisme, je suis plutôt partisan d'une concertation sur des thèmes particuliers avec les ONG compétentes. J'ai discuté avec les associations de lutte contre le sida avant la conférence de Washington, avec les acteurs concernés par le Sahel, avant un déplacement conjoint avec Laurent Fabius sur place.

Cinquième point : la cohérence entre les différentes politiques - politique de développement, politique agricole, politique d'innovation financière, etc. Le président Carrère a estimé que les propos de M. Vielajus sur la PAC étaient un peu...

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