Intervention de Cyril Roux

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 3 octobre 2012 : 2ème réunion
Crédit immobilier de france cif — Table ronde

Cyril Roux, premier secrétaire général adjoint de l'Autorité de contrôle prudentiel :

Les autorités de contrôle ont effectué un suivi rapproché du CIF, sans disposer des instruments juridiques qui auraient évité à l'Etat d'intervenir aujourd'hui. Je vous précise d'emblée qu'étant tenu au secret professionnel en vertu de l'article L. 612-17 du code monétaire et financier, je ne pourrai pas aborder certaines questions au cours de cette audition publique.

Le CIF est un intervenant marginal dans le domaine du crédit à l'habitat, qui a pourtant connu une croissance spectaculaire. Le crédit immobilier a progressé de 6 % par an en France depuis 2007, contre 2 % en moyenne dans la zone euro ; il représente désormais 42 % du PNB français, contre 24 % il y a dix ans. Dans ces conditions, l'ACP comme la Banque de France doivent assurer une surveillance étroite des crédits. Le CIF détient 4 % des crédits à l'habitat, au lieu de 6 % il y a dix ans, en raison de la banalisation des aides à l'achat immobilier par des ménages modestes : les banques, notamment le groupe BPCE avec le Crédit foncier de France, distribuent désormais le prêt à taux zéro, le prêt d'accession sociale ainsi que le prêt social de location accession. Cela a amené le CIF à élargir son offre aux investisseurs personnes morales : l'affaire Apollonia en est l'illustration. Même si le CIF prête à beaucoup de ménages modestes, ce n'est pas l'institution qui accorde en moyenne, ni les prêts les plus longs, ni avec l'apport personnel le plus faible, ni avec le seuil d'endettement le plus élevé : un autre établissement est devant le CIF sur chacun de ces critères.

Sa structure de financement est atypique, puisqu'il se finance intégralement sur les marchés, sans adossement à un puissant acteur financier. Il emprunte sur le marché en émettant des obligations foncières par le biais de CIF Euromortgage, et pour que ses titres soient bien notés, il titrise ses crédits en distinguant des parts de première perte, conservées par le groupe, et des parts senior apportées à CIF Euromortgage. Le besoin complémentaire de financement est couvert par des émissions en blanc de la 3CIF, la centrale de trésorerie du groupe.

Ce modèle est fragile, le financement des nouvelles productions n'étant jamais assuré. L'adossement entre actifs et passifs est imparfait, puisque les passifs sont de moins longue durée que les actifs, même en tenant compte des remboursements anticipés de crédits. Cette structure est unique en France. Le seul établissement comparable est le Crédit foncier de France qui, lui, est adossé à BPCE - il faut se féliciter rétrospectivement qu'il ait été repris par les Caisses d'épargne et non par le CIF.

Que le CIF ait failli faire défaut ne remet pas en cause le modèle français des obligations foncières et à l'habitat, même si des aménagements techniques sont souhaitables. Il a fallu rassurer les marchés sur la solidité de ces obligations, alors que les hypothèques sont souvent mal comprises par les investisseurs étrangers. L'intervention de l'Etat est nécessaire pour éviter une crise sur un marché qui représente des encours de plus de 300 milliards d'euros et 40 % du financement long des banques, crise qui eût été d'autant plus regrettable que nous travaillons à ce que les obligations sécurisées soient prises en compte parmi les actifs liquides au titre des ratios de liquidité LCR (Liquidity Coverage Ratio).

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