Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 10 octobre 2012 à 14h30
Traité sur la stabilité la coordination et la gouvernance au sein de l'union économique et monétaire — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

… il a réussi à faire admettre que dessaisir le peuple et ses représentants de son pouvoir budgétaire était conforme à l'article XIV de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, qui posa, en rupture avec l'autocratie d'alors, le principe du contrôle des finances du pays par le peuple, et lui seul.

Ce que ces textes tentent de finaliser aujourd'hui, c'est une autocratie d'une forme nouvelle, celle des marchés, organisée par des institutions non élues !

Ce dessaisissement démocratique confine à la caricature lorsque l'on cherche à nous vendre l'idée d'une supervision des banques sans insister sur qui supervisera la BCE et M. Draghi, qui sont l'une comme l'autre aux mains des marchés financiers.

Les mécanismes coercitifs, leur automaticité, le contrôle des budgets nationaux, comme des finances sociales et locales, en interne par le Haut Conseil et en externe par la Commission européenne, constituent des atteintes insupportables au pouvoir du peuple.

Changer cette Europe-là, quand le fossé démocratique devient un abîme, était l'objectif de la majorité des Français qui avaient voté « non » en 2005 et dont le vote a été volé par l'adoption, au terme d'un processus strictement parlementaire, du traité de Lisbonne.

Changer cette Europe-là était, nous a-t-il semblé, l'objectif du nouveau Président de la République. Le changement peut-il avoir lieu maintenant en France si rien ne change en Europe, si l'on confie des outils de domination renforcée aux forces libérales qui dirigent l'Europe aujourd'hui ?

Le Président de la République n'a pas voulu, ou n'a pas pu, renégocier le traité. Soit ! Qu'il s'en remette donc au peuple qui lui a exprimé le 6 mai dernier une volonté de changement et de rupture avec les choix libéraux de Nicolas Sarkozy.

Monsieur le ministre délégué, j'ai pris connaissance des propos que vous avez tenus sur le référendum que, par ailleurs, nous ne sommes pas les seuls à demander. Je ne peux souscrire à vos arguments car, si beaucoup s'accordent ici pour défendre une nécessaire démocratisation de l'Union européenne, comment faire adopter un tel traité sans débat public et sans consultation des citoyens ?

J'ai proposé de soumettre au Sénat une motion référendaire pour que le Parlement décide de proposer au chef de l'État de saisir le peuple. Le règlement du Sénat exige que cette motion réunisse trente signatures. Tel n'est pas le cas aujourd'hui, ce dont, visiblement, vous vous réjouissez.

« Moi, je ne veux plus de cette Europe obscure, de cette Europe honteuse. Je veux une Europe au grand jour. Une Europe sincère et populaire. Une Europe dont on soit fiers. C'est à force de dissimuler l'Europe, de la rendre incompréhensible qu'on a fini par en détourner notre peuple ». Ces mots forts étaient ceux de M. Ayrault défendant, le 6 février 2008 à l'Assemblée nationale, une motion référendaire pour exiger la consultation des Français sur le traité de Lisbonne !

Il est encore temps de réparer le déni démocratique de 2008 en consultant aujourd'hui notre peuple sur le choix de l'austérité préconisée par le traité budgétaire.

Les sénateurs et sénatrices du groupe CRC, avec le Front de gauche, ne renoncent pas à ce combat qu'ils mènent avec cohérence – c'est le moins que l'on puisse dire ! –, celui d'une Europe sociale, solidaire, en rupture avec l'oligarchie financière qui s'impose traité après traité.

Ils voteront donc, et je ne vous surprendrai pas, contre la ratification de ce traité de soumission à l'ordre libéral.

Le changement, en Europe comme en France, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, nous y croyons, nous n'y renonçons pas, et ce avec dynamisme et combativité !

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