Intervention de Danièle Nouy

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 9 octobre 2012 : 1ère réunion
Table ronde sur l'union bancaire

Danièle Nouy, secrétaire générale de l'Autorité de contrôle prudentiel :

Le projet d'Union bancaire a trois composantes : une surveillance bancaire unique, mais aussi un mécanisme commun de résolution des défaillances bancaires et une garantie commune des dépôts. Le système de supervision unique tel que proposé par la Commission européenne sera organisé, à l'image de l'Eurosystème, avec une décentralisation de la mise en oeuvre et une centralisation de la prise de décision. Certains principes de l'Union bancaire sont déjà connus : différenciation entre les Etats membres appartenant à la zone euro et ceux qui n'en font partie, système européen unique de surveillance, composé d'un échelon national et d'un échelon européen, et participation directe de l'échelon européen, qui sera variable en fonction de la situation et de la nature des banques concernées.

En termes de calendrier, l'objectif est de parvenir à un accord d'ici à la fin de l'année 2012 pour permettre rapidement aux fonds d'urgence de la zone euro de recapitaliser directement des établissements en difficulté. La BCE a mis en place pendant l'été un groupe de travail de haut niveau, auquel je participe avec la sous-gouverneure de la Banque de France. On constate, au sein de ce groupe, une bonne convergence des vues sur plusieurs principes. Tout d'abord, la BCE devra être dotée de l'entière responsabilité de la supervision bancaire pour la zone euro. Ensuite, le périmètre de la supervision européenne devra recouvrir l'ensemble des banques de la zone euro. Par ailleurs, la mise en oeuvre opérationnelle des activités de supervision devra se faire, autant que possible, de manière décentralisée par les superviseurs nationaux. En outre, le degré de centralisation ou de décentralisation de la mise en oeuvre de la supervision pourra être défini sur la base du caractère systémique de la banque concernée, de la nature des tâches de supervision ou, plus probablement, des deux. Enfin, les établissements seraient différenciés selon leur pertinence systémique.

S'agissant de la participation à l'Union bancaire, la Commission propose une supervision bancaire ouverte aux dix Etats membres n'appartenant pas à la zone euro, dans le cadre d'une coopération dite « étroite ». Il est vrai qu'une supervision unifiée, dans l'idéal, serait pertinente à l'échelle des Vingt-Sept, mais cela pose des problèmes d'ordre opérationnel et juridique.

S'agissant du périmètre de la supervision, l'ACP est favorable à la proposition de la Commission de couvrir l'ensemble des 6 000 banques de la zone euro. Je rappelle notamment que beaucoup de problèmes sont venus, ces dernières années, de banques non systémiques, comme Northern Rock ou Bankia.

S'agissant des responsabilités, la proposition de la Commission donne une compétence très large à la BCE, qui exercera l'essentiel des pouvoirs de supervision aujourd'hui aux mains des superviseurs nationaux. Comme nous le souhaitons, la BCE décidera et définira les modalités de la conduite opérationnelle de la supervision ; c'est donc elle qui organisera la décentralisation du mécanisme, avec un impact fort, en termes organisationnels, pour les superviseurs nationaux.

Certains pays, comme l'Allemagne, pensent qu'il faudrait privilégier, au moins à titre transitoire, un régime dual distinguant les banques les plus importantes soumises à la supervision de la BCE, et les autres, soumises à une supervision nationale. Nous pensons, quant à nous, qu'il convient plutôt de s'orienter, dans un premier temps, vers une instruction conjointe, par les superviseurs nationaux et par la BCE, des dossiers les plus importants, mais la décision finale devrait rester, en tout état de cause, dans les mains de la BCE.

Pour répondre à votre question sur les effectifs et les moyens de l'ACP, il est possible que ce mécanisme conduise, à terme, à une réduction. Dans un premier temps cependant, l'expertise et les équipes de l'ACP seraient encore nécessaires pour préparer le travail du gouverneur de la Banque de France qui siègera à la BCE, ainsi que pour l'instruction des dossiers.

L'objectif est de mettre en place ce système en début d'année prochaine. Selon nous, la première décision à prendre est de définir le degré de décentralisation ou de centralisation du mécanisme.

Les deux autres composantes de l'Union bancaire, la résolution et la garantie des dépôts, sont essentielles mais leur mise en place ne doit pas nécessairement être simultanée avec celle de la supervision unique. La supervision unique est la pierre fondamentale. C'est le superviseur unique qui prononcera la décision de non viabilité d'un établissement, conduisant à la transmission d'un dossier à une autorité de résolution, quel que soit son niveau. De même, c'est le superviseur unique qui activera la procédure de garantie des dépôts.

Par ailleurs, je tiens à souligner que le renforcement du contrôle démocratique fait partie du projet d'Union bancaire. La BCE et l'ABE rendront compte au Parlement européen et l'ACP restera, comme aujourd'hui, responsable devant le Parlement français. Je crois savoir que des possibilités d'auditions des superviseurs européens par les Parlements nationaux sont actuellement en discussion.

S'agissant des groupes transfrontaliers, la BCE sera le superviseur consolidé des groupes dont le siège est établi dans la zone euro et négociera à ce titre avec les autorités des pays d'accueil. Inversement, elle participera au collège des superviseurs lorsque le superviseur consolidé sera l'autorité d'un État membre hors de la zone euro.

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