Intervention de Jean-Pierre Chevènement

Réunion du 11 octobre 2012 à 9h45
Traité sur la stabilité la coordination et la gouvernance au sein de l'union économique et monétaire — Exception d'irrecevabilité

Photo de Jean-Pierre ChevènementJean-Pierre Chevènement :

Les deux propositions qui sont faites à cet égard ne sont pas sérieuses.

S’agissant de l’élection au suffrage universel du président de la Commission européenne, le Tribunal constitutionnel de Karlsruhe lui-même reconnaît qu’il n’y a pas « un peuple européen » qui pourrait la légitimer.

Quant à la proposition de M. Schaüble d’instituer un « ministre des finances européen » doté d’un droit de veto en matière budgétaire, elle a au moins l’avantage d’être plus claire que l’« usine à gaz » que l’on nous propose de mettre en place.

La question de la démocratie en Europe se trouve ainsi posée. Je ne crois pas du tout à l’idée d’instituer une conférence interparlementaire évoquée par M. Sutour. C’est une feuille de vigne §destinée à masquer le transfert du pouvoir budgétaire des parlements nationaux à une technostructure irresponsable. Plutôt que de poser rustine après rustine sur un système dont on se refuse à voir le vice constitutif, mieux vaudrait faire un effort d’intelligence pour réconcilier l’Europe avec la démocratie et le progrès social.

L’Europe doit être refondée. Elle ne peut l’être que dans le prolongement des nations, dans une perspective d’indépendance et sur la base d’un projet social avancé. Cette Europe sera inévitablement à géométrie variable, parce que sa construction requiert l’assentiment des peuples concernés. La question de la monnaie viendra à son heure, il faut la subordonner à un projet politique.

Peut-être même un jour – je ne veux pas l’exclure – la confédération évoluera-t-elle vers une fédération, ce qui supposerait l’émergence d’un sentiment commun d’appartenance, ne pouvant résulter que d’un choc extérieur extrêmement fort. À cette condition, l’élection d’une assemblée européenne effectivement légitime pourrait être envisagée.

Dans l’immédiat, ne mettons pas la charrue devant les bœufs. Ce jour n’est pas venu. Il faut d’abord trancher le nœud gordien d’une monnaie unique qui, loin d’être au service de l’économie, tend aujourd’hui à l’asphyxier. Le TSCG est un nœud coulant pour le progrès social et pour la démocratie.

C’est pourquoi, avec mon collègue du RDSE Pierre-Yves Collombat, je demande au Sénat d’adopter cette motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité au projet de loi. Nous encouragerons ainsi le Gouvernement à reprendre le chantier sur des bases plus solides et, comme l’a dit hier M. le Premier ministre, à faire enfin « bouger les lignes ». §

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