Opposer la question préalable à un projet de loi ne consiste pas simplement à demander le rejet de celui-ci ; cela revient à considérer qu’il n’est même pas nécessaire d’en débattre.
Or, comme vous le savez, mes chers collègues, les écologistes ont beaucoup discuté du TSCG… §Nous avons eu entre nous de nombreux échanges, souvent passionnés, parfois passionnants. Nous ne voulons donc pas perdre cette ultime occasion de débattre, pas seulement entre nous cette fois, mais devant l’opinion ! Nous cultivons, en notre sein, le respect des minorités, d’où notre attachement viscéral au débat contradictoire.
Il est affirmé, dans l’objet de la motion, que le traité bafoue la souveraineté budgétaire de notre pays.
D’un point de vue juridique, cette affirmation se trouve déjà contredite par le Conseil constitutionnel, lequel a considéré, dans sa décision du 9 août 2012, que le TSCG n’entraînait pas de perte de souveraineté pour la France. Si tel avait été le cas, il aurait requis une révision de la Constitution.
De même, le Parlement allemand, dont on connaît la vigilance particulièrement sourcilleuse en matière de souveraineté budgétaire, a approuvé le TSCG à une très large majorité, ne semblant pas y voir une dépossession fondamentale de ses prérogatives nationales.
D’un point de vue plus politique, pour les écologistes, transférer une part de souveraineté pour la déléguer à l’étage supérieur de la pyramide institutionnelle n’est pas tabou. Au contraire, cela correspond même à l’essence de notre vision fédéraliste des institutions.
À l’échelle de la France, on peut dire que les régions sont largement dépossédées de leur souveraineté au profit de l’État, à tel point que, en matière budgétaire, la règle qui les contraint à un équilibre absolu n’est pas d’or, mais d’airain ! Cela n’est a priori pas incompatible avec davantage de subsidiarité, pour des compétences identifiées.
Les écologistes sont favorables à un transfert de souveraineté du même type entre l’État et l’Europe. Nous considérons que nous pourrions tout à fait abandonner une partie de notre marge de manœuvre budgétaire nationale au profit de l’Europe. Évidemment, il conviendrait, au préalable, que cette Europe repose sur un régime parlementaire réellement démocratique et qu’elle soit dotée d’un budget substantiel, alimenté par des ressources propres.
Les inquiétudes et les incertitudes actuelles relatives à la gouvernance européenne sont évidemment légitimes. Pour autant, même ceux d’entre nous sénateurs écologistes qui s’apprêtent à rejeter la ratification du traité – au Sénat, il s’agit d’une forte minorité, mais d’une minorité tout de même ! – ne peuvent voter cette motion, dans la mesure où nous croyons y déceler une défiance assez nette à l’égard du projet européen fédéraliste que nous soutenons.
Or, si nous avons pu laisser entendre des divergences importantes de stratégie entre nous sur le meilleur moyen de nous approcher au plus près de l’Europe que nous appelons de nos vœux, c’est bien notre vision commune d’une Europe fédérale, solidaire et, bien sûr, écologique qui nous rassemble et constitue notre force.
C’est également parce que nous souhaitons avoir l’occasion, comme je le disais au début de mon propos, de prolonger le débat non seulement sur le TSCG, mais aussi sur l’ensemble des procédures européennes en cours, devant les Français, en toute transparence, ainsi que nous l’avons fait au sein de notre mouvement, que le groupe écologiste ne pourra voter cette motion tendant à opposer la question préalable, présentée par le groupe CRC. §