Intervention de Bernard Cazeneuve

Réunion du 11 octobre 2012 à 9h45
Traité sur la stabilité la coordination et la gouvernance au sein de l'union économique et monétaire — Question préalable

Bernard Cazeneuve, ministre délégué :

J’en suis bien conscient, mais, parmi celles et ceux qui sont intervenus, certains, me dit-on, doivent partir. Il m’a donc été demandé, ce que je fais bien volontiers, de leur répondre dès maintenant, pour ne pas donner le sentiment d’attendre le dernier moment pour parler, ce qui ne serait pas respectueux à l’égard de la Haute Assemblée.

Je commencerai en m’adressant aux orateurs du groupe communiste, qui se sont longuement exprimés. Sachez, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous poursuivrons, dans les semaines et les mois à venir, le combat que nous avons mené pour la réorientation de l’Europe, dans l’esprit que j’ai déjà indiqué à plusieurs reprises depuis hier.

Je ne doute pas que, à la faveur de la tenue des prochains Conseils européens, nous aurons l’occasion d’évoquer de nouveau ces sujets ensemble. Le débat se poursuivra ainsi entre nous et permettra de mesurer le décalage entre ce que nous disons vouloir faire et ce que nous aurons pu obtenir tout au long du quinquennat.

J’adresserai ensuite des remerciements à l’ensemble des orateurs du groupe socialiste. Ce matin, Alain Richard s’est exprimé avec la rigueur, la précision et la hauteur de vue qui caractérisent toujours ses interventions sur les sujets les plus pointus. Il l’a fait en avançant des idées auxquelles nous croyons et qui guident l’action gouvernementale.

Nous n’avons en effet pas vocation à laisser aux générations futures des dettes et des déficits sans fin. Il nous faut procéder au redressement de nos comptes publics, parce qu’il s’agit d’un engagement que nous avons pris. Nous voulons agir dans la justice, tout en créant les conditions de la croissance.

Je me tourne maintenant vers les orateurs de l’opposition. M. Philippe Bas, aujourd’hui, M. Jean Bizet, hier, ont évoqué des arguments précis, qui sonnaient comme autant d’interpellations à destination du Gouvernement. J’apporterai donc plusieurs éléments de réponse.

Pour ce qui concerne le projet européen lui-même, je répète ce que j’indiquais, hier, en réponse à un orateur du groupe UMP : le Gouvernement n’est pas du tout fermé à des évolutions institutionnelles. Vous ne pouvez donc pas dire, monsieur Bas, que notre démarche consiste à inscrire l’ensemble de ce qui pourrait être fait dans le cadre des seuls traités existants. Ce n’est ni ce que j’ai dit ni ce que je pense.

Je comprends que vous vouliez apporter la démonstration de ce que nous sommes prêts à faire et de ce que vous souhaiteriez nous voir faire. Or ce que nous nous apprêtons à faire est très différent à la fois de ce que vous imaginez et de ce que vous avez fait. J’avancerai donc, une nouvelle fois, des réponses précises, qui sont à peu près celles que j’ai déjà indiquées, avec quelques compléments d’information.

Je le redis, au moment où la crise s’aggrave, s’approfondit, s’enkyste, à l’heure où les peuples d’Europe en souffrent, s’inquiètent, manifestent et s’indignent, il nous paraît dangereux politiquement et absolument illusoire, en tant que proeuropéens, d’aller dire à ces mêmes peuples que la réponse que nous nous apprêtons à apporter est une nouvelle convention au terme de laquelle il y aura un nouveau référendum. Non, la politique européenne de la France ne se réduit pas à une réflexion sur les institutions européennes, présentée comme un préalable à toutes les solutions urgentes qu’appelle la crise !

Nous, nous sommes dans le concret. Pour sortir de la crise, nous proposons de remettre de l’ordre dans la finance, d’aller au bout de l’union bancaire, en mettant en place la supervision bancaire pour toutes les banques, pas seulement les banques systémiques.

Nous sommes à l’avant-garde, à la pointe du combat pour l’Union européenne. Tous ceux qui sont européens, résolument européens, qui croient en l’Europe, partagent notre souhait de doter celle-ci de dispositifs de contrôle de la finance propres à lui épargner les errements spéculatifs qui ont ruiné l’économie réelle au cours des dernières années. Nous, nous sommes à la pointe quand d’autres n’acceptent pas de nous suivre sur ce chemin.

Nous formons le vœu de voir l’Europe aller plus loin dans la solidarité monétaire et financière, mais nous comprenons très bien, monsieur Bas, qu’un certain nombre de pays du Nord, notamment l’Allemagne, notre partenaire, ne veuillent pas aller plus avant dans la solidarité tant que la discipline budgétaire n’est pas établie. Après tout, ces pays peuvent légitimement considérer qu’ils n’ont pas à payer indéfiniment pour d’autres qui n’appliquent pas, à eux-mêmes, les principes budgétaires que les Allemands, notamment, ont décidé d’appliquer à leur propre pays depuis longtemps.

Pour autant, dès lors que cette discipline budgétaire est acceptée comme un élément de la convergence des politiques économiques, qui garantit l’intégrité de la zone euro, au nom de quel argument s’opposerait-on à davantage de solidarité ?

C’est précisément parce que la discussion sur la discipline budgétaire s’est engagée que nous nous sentons légitimes à aller plus loin dans l’exigence de solidarité, en défendant l’émission commune d’obligations, la mise en place de fonds de rédemption, la création, demain, d’euro-obligations, dans une logique de mutualisation de la dette que Jean-Pierre Chevènement a appelé de ses vœux ce matin.

Comment pouvez-vous dire que nous ne sommes pas force de proposition, à l’avant-garde, alors que, précisément, sur les sujets que je viens d’évoquer, nous figurons, en Europe, parmi ceux qui sont les plus audacieux, qui tendent la main, qui proposent, qui invitent à une nouvelle frontière, dans un esprit de responsabilité, avec la volonté de faire en sorte que la discipline budgétaire permette le rétablissement des comptes publics.

À vous entendre, nous n’allons pas mettre en œuvre ce à quoi nous nous engageons. C’est vous qui parliez d’humilité précédemment. Celle-ci est toujours nécessaire dans le débat politique. Mais quelle est la situation qui nous a été laissée ?

Chacun connaît le niveau du déficit de notre commerce extérieur. Il traduit un problème de compétitivité de l’économie française, qui ne résulte pas des quatre mois d’exercice du pouvoir par ce gouvernement.

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