Ce droit de jouissance, aux termes de la loi et comme l’atteste la pratique notariale, n’est ni cessible ni transmissible, à la différence d’un droit patrimonial classique. Il ne peut pas être cédé définitivement ou temporairement – on ne peut, par exemple, donner son droit de jouissance pendant que l’on part en vacances ! Par conséquent, en matière de biens sectionaux, on ne peut parler de droit patrimonial acquis : il s’agit d’un droit lié à l’appartenance à une collectivité. Le fait que la Cour européenne des droits de l’homme puisse qualifier ce droit de jouissance de « bien », ce qu’il est effectivement et que nous ne contestons pas, est sans influence sur la qualification qui lui est donnée en droit interne. Ce point me paraît essentiel.
Les articles 4 sexies nouveau et 4 septies nouveau sont tout aussi importants, mais je les décrirai plus rapidement.
L'article 4 sexies permet de sortir de l’impasse née du refus d’un conseil municipal de voter le budget proposé par une section. Dans le vide des textes et en l’état de la jurisprudence, il ne peut que l’accepter ou le refuser. Nous proposons qu’il puisse modifier ce projet de budget.
L'article 4 septies autorise, une fois les besoins de la section satisfaits, et non ceux de ses membres – c’est interdit –, l’affectation du surplus de revenus au financement d’opérations d’intérêt général, au bénéfice non exclusif de la section.
Jacques Mézard l’a souligné : cette disposition met un terme à un objet de scandale pour les élus et les habitants de communes pauvres sur le territoire desquelles prospèrent des sections riches, qui, faute de pouvoir répartir leurs excédents entre membres sous forme pécuniaire, doivent les laisser dormir dans les comptes, alors que la commune doit emprunter pour investir. Si, en plus, un conflit oppose le maire et la section de commune, la situation devient intenable.
Ce pouvoir du conseil municipal est cependant strictement encadré. Seul le surplus budgétaire de la section de commune peut être utilisé, les besoins de la section devant d’abord être satisfaits. Par ailleurs, seules des dépenses pour la réalisation de travaux d’investissement ou d’entretien pourront être ainsi financées : les dépenses de personnel sont donc exclues, pour ne prendre que cet exemple. Enfin, le conseil municipal devra motiver sa délibération.
Quelle que soit notre volonté de conserver les sections de commune bien vivantes, nous proposons qu’il ne puisse plus en être créé d’autres. Je ne m’y attarde pas. Lorsque des communes prennent la décision de fusionner, aux termes des dispositions prévues par le code général des collectivités territoriales, c’est qu’elles entendent constituer une seule commune. Or, maintenant que le développement de l’intercommunalité offre des modalités d’associations très fines, laisser se créer de nouvelles sections de commune, c’est aller au-devant de difficultés inutiles !
Mes chers collègues, telles sont les propositions que la commission des lois vous soumet. Elle a poursuivi un double objectif. D’une part, il s’agit de faciliter et de pacifier les relations trop souvent conflictuelles entre les communes, leurs conseils municipaux et les sections de commune. D’autre part, lorsque ces sections se contentent de survivre ou constituent, à l’évidence, un obstacle au développement communal, il convient de donner les moyens aux conseils municipaux qui le souhaitent – j’insiste sur ce point – d’en sortir, au terme d’une procédure strictement encadrée et respectueuse des droits de chacun.