Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, être l'un des derniers intervenants présente l'avantage de ne pas répéter un certain nombre de choses qui ont été précédemment dites de manière excellente, bien mieux qu'on aurait pu les dire soi-même.
Je limiterai mon propos à deux observations, lesquelles appuieront deux objectifs.
Nous sommes à une étape fondamentale de notre histoire dans le domaine de la communication. Aussi, le Gouvernement doit promouvoir et faciliter le développement des technologies de l'information et de la communication, agir comme une force et non comme un frein. C'est ma première observation.
En outre, il doit veiller à l'accompagnement législatif des collectivités et des entreprises, mais en faisant en sorte que celles-ci ne soient pas gênées aux entournures. C'est ma seconde observation.
J'en viens à mes deux illustrations.
Les départements ont mis en oeuvre des délégations de service public, les DSP. Pour ma part, j'ai l'honneur de présider aux destinées du département de la Manche qui a mis en oeuvre une telle DSP.
À cet égard, je remercie à mon tour Bruno Sido d'avoir déposé cette question orale avec débat, parce qu'elle nous permet de faire un point intéressant.
Je ne reviendrai pas sur la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, si ce n'est pour rappeler que la commission des affaires économiques a beaucoup réfléchi à cette question, grâce à son rapporteur Bruno Sido, qui a fait preuve d'une très grande ouverture. Il aura été très difficile de faire évoluer les choses, notamment l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, qui avait été au centre d'un débat, d'une problématique et qui a été un enjeu politique de première importance. Cet article, conformément à mes voeux, a autorisé les collectivités à devenir « opérateurs d'opérateurs », constituant en cela un changement culturel extrêmement profond. Les collectivités peuvent désormais adapter ou retenir des stratégies de développement de l'accès à Internet, même si celles-ci sont différentes. Dans ce domaine, l'enjeu est de pouvoir disposer de la quantité et de la qualité. C'est ce qu'a permis l'article précité.
Allier la qualité et la quantité, c'est faire en sorte, que l'on raisonne en mégabits ou en gigabits à l'échelle de l'ensemble du territoire et que les tarifs restent compétitifs.
Un certain nombre de départements ont retenu la procédure de la DSP. Je suis un peu surpris que cette procédure, là où elle est engagée, suscite une certaine suspicion et qu'elle soit fréquemment remise en cause. Ce sont des combats d'arrière-garde. Monsieur le ministre, j'attire votre attention sur ces DSP. Elles visent à compléter les infrastructures qui existent, propriété de France Télécom, qui les loue - c'est la technique du dégroupage, partiel ou total -, ou à accompagner les départements dans leurs efforts de réalisation d'infrastructures, qui, pour ce faire, font appel à des entreprises privées.
Le département de la Manche, pour sa part, a retenu le groupement LD Collectivités, Vinci Networks et Axia France. Il a créé le syndicat mixte Manche Numérique, qui est chargé de l'aménagement numérique du territoire.
Mon insistance n'a pas pour objet de mettre en valeur nos actions en la matière. Nous ne sommes pas les seuls. En revanche, je veux attirer votre attention sur le fait que ce système permet aux grandes villes du département, à savoir Cherbourg et Saint-Lô, de bénéficier des mêmes tarifs que Paris et aux chefs-lieux de canton, notamment ceux qui sont situés dans des zones rurales, des mêmes tarifs que Rennes, Caen, Toulouse ou Bordeaux. L'accès en quantité et à des tarifs extrêmement compétitifs, voilà la vraie réduction de la fracture numérique ! Les DSP nous le permettent.
Je souhaiterais donc, monsieur le ministre, que des consignes soient données pour éviter que les DSP, qui sont des actes importants et parfois délicats, ne subissent des combats d'arrière-garde.
Aujourd'hui, le dégroupage concerne plus de 70 % du territoire de la Manche et plus de 85 % de sa population. Certaines entreprises proposent des capacités de plusieurs gigabits à des tarifs qui sont le fruit de la concurrence.
En outre - et c'est ma seconde illustration -, je vous demande, monsieur le ministre, de faire en sorte que l'administration puisse accompagner le développement des usages. À quoi servirait-il de disposer d'infrastructures si elles ne devaient pas être utilisées ? Pourquoi construire une route si aucun véhicule n'y circule ? Le développement des usages contribuera à réduire les différentiels d'aménagement du territoire. Voilà qui va contribuer à réduire la fatalité territoriale pour nous orienter durablement vers une vie choisie et non contrainte, qui échappera aux déterminismes d'une ruralité un peu éloignée.
L'aménagement numérique du territoire passe notamment par le développement des usages. Ce dernier passera par les e-services à la personne et par le e-enseignement. Nous avons les uns et les autres un certain nombre d'idées en la matière et j'ai noté avec intérêt que plusieurs présidents de conseil général se sont exprimés sur ces sujets, qui constituent un enjeu extraordinaire en termes d'aménagement du territoire. Cela passera également par la e-santé - le département de la Manche s'est doté d'un certain nombre de systèmes, notamment le portail Manche Santé sur le plan numérique, dont l'objectif est de conforter l'action médicale et d'aider le médecin à poser un diagnostic ou à donner un conseil. Bref, il faut développer les e-services et le e-enseignement, qui est si important.
S'agissant particulièrement de la e-administration, monsieur le ministre, il faut permettre à nos concitoyens d'obtenir des documents administratifs de la manière la plus simple possible, quel que soit le lieu où ils habitent. À cette fin, nous avons mené l'expérience des VisioGuichets. Néanmoins, le VisioGuichet requiert une personne référente dans l'administration de l'État et dans l'administration départementale. Aussi, seule une action conjointe de l'État et du département permettra à tout un chacun, pour autant qu'il soit équipé d'une imprimante, d'obtenir un document administratif quelconque sans se déplacer, au seul moyen du VisioGuichet. Pour simple qu'elle soit, la mise en oeuvre de ces actions et l'utilisation des nouvelles technologies requièrent la mobilisation des agents de l'État et des départements, lesquels doivent changer quelques peu leur culture et sortir des sentiers battus pour se mettre à la disposition des citoyens.
Monsieur le ministre, soyez facilitateur, soyez promoteur, encadrez-nous mais laissez-nous de la liberté !