Madame la présidente, monsieur le ministre, mesdames, messieurs les sénateurs, mes collègues du groupe socialiste et moi-même avions indiqué, tout au long de la discussion de ce texte en première lecture, au mois de mai, les craintes que suscitaient en nous les deux dispositifs tels que vous les avez présentés dans le projet de loi : le volontariat associatif et l'engagement éducatif. Cependant, nous étions conscients que le mouvement associatif attendait des réponses et des mesures trop longtemps laissées en suspens dans ces deux domaines.
En revanche, monsieur le ministre, je vous avais dit, en première lecture, que nous ne vous laisserions pas occulter votre politique réelle, concrète, autrement dit budgétaire, concernant le mouvement associatif, avec ce projet qui prétend répondre à ses attentes.
À ce sujet, est-il nécessaire de le rappeler, la loi de finances pour 2006 poursuit la politique de désengagement de l'État menée depuis 2002. Le programme « Vie associative » est ainsi réduit à la portion congrue de 126 millions d'euros, et ce alors que l'exécution du budget 2005 - sans parler des années antérieures - a été calamiteuse !
Monsieur le ministre, au nom des associations qui vous regardent aujourd'hui, je vous pose la question : qu'avez-vous fait des crédits votés par le Parlement pour la vie associative en 2005 ?
Au cours de l'été dernier, de nombreuses associations ont eu la surprise d'apprendre que, sans la moindre concertation préalable, leurs subventions étaient dramatiquement réduites - jusqu'à 60 % pour certaines, comme le dénonce le CNAJEP, le Comité national des associations de jeunesse et d'éducation populaire.
Ainsi, en deux ans, le financement public accordé au mouvement rural de jeunesse chrétienne, le MRJC, a chuté de plus de 300 000 euros, réduction considérable qui met en péril cette association. Et les exemples de ce type sont nombreux...
Ces associations jouent pourtant un rôle fondamental dans une société qui a cruellement besoin de cohésion sociale, comme nous l'ont rappelé les événements de l'automne dernier.
Le Gouvernement et la majorité préfèrent y répondre par un surcroît de précarité pour les jeunes dans le travail et par une remise en cause du financement du tissu associatif dans les quartiers. Cela ne concerne pas seulement votre ministère, monsieur le ministre, loin de là : culture, politique de la ville, affaires sociales, tous ces secteurs sont touchés.
Avec la volonté de faire baisser à tout prix les chiffres du chômage sans souci de créer des emplois durables et de qualité, vous aviez demandé au secteur associatif de créer 45 000 contrats aidés à la fin de l'année 2005. Comment inciter les associations à créer des emplois si, en parallèle, elles sont l'objet de coupes budgétaires non concertées ? Mais vous allez sans doute me répondre.
À la contradiction, ce gouvernement semble ajouter l'amateurisme et l'indifférence, refusant d'écouter les principaux acteurs de ce secteur.
Depuis longtemps, la CPCA, la Conférence permanente des coordinations associatives, demande que soient réunies les conditions devant permettre de développer des emplois associatifs de qualité. Or nous ne pouvons avoir que de graves inquiétudes quant au financement de l'emploi associatif.
Les concours du FONJEP baissent continuellement : en 2006, ils se monteront à 7 381 euros par poste. Ce désengagement participe évidemment au transfert de charges dissimulé vers les collectivités locales, lesquelles doivent bien se substituer à l'État pour éviter aux associations de leurs territoires de s'éteindre progressivement.
Cette politique de retrait de l'État au détriment du soutien de la vie associative, pourtant si riche et si dynamique dans notre pays, s'inscrit dans une entreprise de démolition de toute forme d'économie sociale.
La suppression de la délégation interministérielle à l'innovation sociale et à l'économie sociale, la DIES, sans aucun dialogue préalable, en est une preuve.
Dans ce contexte, notre volonté de soutenir le mouvement associatif aurait justifié que nous nous abstenions sur le projet de loi en deuxième lecture, comme en première lecture, car le mouvement associatif, en ce moment plus que jamais, a besoin de signaux positifs.
Notre abstention en première lecture était le signe de notre esprit d'ouverture dans un débat qui, pour nous, ne faisait que commencer. Lors de mon explication de vote sur l'ensemble, je m'étais même permis d'espérer qu'au cours de la navette des éléments nouveaux amélioreraient le texte dans le sens que nous souhaitions. Nous ne pouvons que nous désoler de son résultat, qui est probablement le fruit de la radicalisation du Gouvernement et de sa majorité en matière de libéralisation du droit du travail.
En effet, le groupe UMP de l'Assemblée nationale, avec l'appui du Gouvernement, a rendu tout à fait inacceptable la rédaction du titre II, relatif à l'engagement éducatif, qui nous préoccupait déjà beaucoup dans sa version initiale.
Monsieur le ministre, la modification de l'article 11, qui bouleverse totalement l'économie du dispositif en permettant à des organismes à but lucratif d'y recourir, suffit à justifier notre opposition frontale à ce qu'est devenu le projet de loi.
Mais, pour ajouter à l'inacceptable, les quelques amendements que notre groupe avait réussi à vous faire adopter en première lecture pour améliorer le titre Ier, parfois avec l'appui du rapporteur et de la commission, ont été supprimés.