Ce projet de loi traduit une inversion par rapport à la politique de ces dernières années marquée à la fois par un recul des droits sociaux et une augmentation du déficit. Ce dernier, qui atteint 17,4 milliards d'euros en 2012 pour le régime général et le fonds de solidarité vieillesse (FSV), devrait en effet être ramené à 13,9 milliards en 2013 alors que, dans le même temps, le rôle de la protection sociale sera réaffirmé.
Il s'agit d'un PLFSS de protection, qui ne prévoit pas en effet de déremboursements ou de remises en cause des droits sociaux car les efforts demandés porteront sur l'organisation du système et non sur les assurés.
La priorité donnée à la santé se traduira par une croissance de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) de 2,7 % contre 2,5 % en 2012, soit un effort supplémentaire de 4,5 milliards, réparti entre la médecine de ville et la médecine hospitalière bénéficiant chacune d'une augmentation de 2,6 %, et les dépenses médico-sociales en hausse de 4 %.
Nous avons aussi la volonté d'assainir autant que possible nos régimes de retraite, toujours financièrement très fragiles malgré la réforme de 2010. Une partie des recettes nouvelles bénéficiera donc au FSV et aux différents régimes, des efforts spécifiques étant demandés pour équilibrer la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) ou celle des industries électriques et gazières ; le prélèvement instauré sur les retraités alimentera la politique de lutte contre la perte l'autonomie. Le texte prévoit aussi des mesures positives pour les travailleurs de l'amiante, qui pourront prendre leur retraite à soixante ans quel que soit leur régime, et pour les travailleurs non salariés agricoles qui bénéficieront de points retraite gratuits en compensation des périodes d'invalidité et de maladie.
Au titre de la priorité donnée à la famille, nous avons déjà instauré le tiers payant des dépenses de garde d'enfants pour les familles modestes et augmenté de 25 % l'allocation de rentrée scolaire pour un coût de 350 millions d'euros. Un milliard d'euros de recettes ont été affectés à la branche famille pour financer cette dépense et compenser le déséquilibre financier de la branche. Au total, le déficit est stabilisé ; sans cet effort, il se serait aggravé de 700 millions.
Enfin, la prise en charge à 100 % des interruptions volontaires de grossesse a été décidée.
Notre projet s'inscrit donc résolument dans une perspective de maintien et d'extension des droits car il ne s'agit pas seulement de répondre à des besoins sociaux mais aussi, plus que jamais en cette période de tourmente due à la crise, de réaffirmer le rôle central de la protection sociale dans la cohésion républicaine.
Le redressement des comptes ne reposera pas sur les assurés mais passera par une politique de modernisation qui concernera notamment l'assurance maladie, la branche vieillesse faisant l'objet d'une réforme spécifique et globale en 2013, annoncée lors de la conférence sociale de juillet dernier.
Premier pilier de cette modernisation, une politique d'économies renforcée, portant sur 2,4 milliards d'euros dont environ 1 milliard au titre de la politique du médicament et 650 à 660 millions pour l'hôpital, au travers d'une réorganisation des parcours, la maîtrise des dépenses de médicament et la rationalisation des achats. Le reste des économies sera réalisé par la médecine de ville grâce à une baisse des tarifs de certaines professions, davantage de maîtrise médicalisée et, là aussi, une meilleure organisation des parcours.
La réorganisation du système de soins constitue le second pilier de cette politique avec pour fil conducteur l'égalité d'accès aux soins, mise à mal par la croissance non maîtrisée des tarifs ou la constitution de déserts médicaux. Près de 20 % des Français ont renoncé à des soins ou les repoussent pour des raisons financières : ce n'est pas satisfaisant.
Pour l'instant, aucune mesure financière particulière n'est prévue dans la loi car les négociations sur les dépassements d'honoraires sont en cours. Notre action en matière d'organisation consistera d'une part, à revaloriser les missions de l'hôpital public, d'autre part, à veiller à une meilleure organisation de la médecine de proximité. Nous reprenons à cette occasion plusieurs propositions du rapport sur le financement de l'hôpital public, rendu dans le cadre de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) par MM. Le Menn et Milon. Ainsi est-il envisagé de réintroduire dans la loi la notion de service public hospitalier, de faire en sorte que la tarification à l'activité ne soit plus le seul mode de financement des hôpitaux, de protéger les missions d'intérêt général en mettant fin à la pratique des gels de début d'année ou encore de faciliter l'accès au crédit des CHU, en les autorisant à émettre des billets de trésorerie sans passer par les communes. En outre, des concertations sont menées afin de mettre en place un pacte de confiance pour l'hôpital public dont la préparation est confiée à Edouard Couty.
Notre politique de réorganisation concerne aussi la médecine de proximité de façon à éviter les hospitalisations inopportunes, dans la mesure où, dans notre pays, on hospitalise trop et trop longtemps, constat qui ne vaut pas uniquement pour les personnes âgées.
Ceci conduit à des évolutions d'ensemble impliquant notamment la réorganisation des services d'urgence ou encore la constitution de pôles de soins pluridisciplinaires grâce au financement du travail en équipe des personnels soignants. Ces pôles prendront appui sur une expérimentation de parcours de soins menée avec les personnes âgées et dont les résultats sont attendus pour l'année prochaine.
Quant à la lutte contre les déserts médicaux, si elle appelle nécessairement plusieurs mesures, il en est une particulièrement symbolique : la création de contrats de praticiens locaux de médecine générale à destination des secteurs sous-dotés.