Intervention de Marie-Christine Blandin

Réunion du 22 février 2006 à 22h00
Volontariat associatif et engagement éducatif — Discussion d'un projet de loi en deuxième lecture

Photo de Marie-Christine BlandinMarie-Christine Blandin :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, neuf mois se sont écoulés depuis la première lecture au Sénat du projet de loi relatif au volontariat associatif et à l'engagement éducatif. Neuf mois : des banlieues en colère, un débat sur la LOLF au Parlement et, feuille après feuille, la remise en cause du code du travail.

Si j'évoque les banlieues en colère, c'est que même des lieux où s'exerce la vie associative ont été enflammés et que le mot le plus prononcé après « discrimination » fut celui de « travail ».

Si j'évoque la LOLF, la loi organique relative aux lois de finances, c'est que, après plusieurs années de baisses alarmantes, le budget du programme « Jeunesse et vie associative » n'a même pas suivi l'inflation.

Nos boîtes aux lettres croulent sous les appels au secours des associations aux budgets amputés par vos collègues.

Pire, sous couvert de rationalisation et de transparence, l'éducation nationale n'apportera plus de moyens humains mis à disposition des associations. Il y aura des compensations financières à ces quelque 800 postes, nous a-t-on dit. Mais tous les élus ici présents savent combien les dotations qui accompagnent la suppression d'un dispositif ou d'une ressource s'amenuisent rapidement et sont toujours calculées avec restriction.

Si j'évoque enfin le code du travail, c'est que les coups de boutoir successifs créent une insécurité croissante pour la rémunération des activités et les conditions légales dans lesquelles celles-ci s'exercent.

C'est dans ce contexte qu'il faut regarder l'écriture du statut du volontariat associatif ou de l'animateur de centres de vacances. Cet environnement à risque - rupture des liens, diminution des budgets, érosion des droits -, exige une grande rigueur pour que cette innovation attendue, il faut avoir l'honnêteté de le souligner, ne devienne ni une aventure aux lendemains amers, ni le cheval de Troie d'une nouvelle précarisation. Cette vigilance, nous avons tenté de l'exercer en première lecture.

Hélas, une utilisation psychorigide de la navette a remis les rares articles améliorés dans leur état primitif : aide juridictionnelle, validation des acquis sur l'ensemble du parcours, montant minimal de l'indemnité, par exemple, ont disparu.

En revanche, l'ouverture au secteur marchand, peut- être défendable pour quelques sociétés dont le maigre bénéfice soumis à l'impôt n'a d'égal que leur réel engagement, s'est faite sans aucune précaution ni encadrement. Ce sont désormais des entreprises florissantes qui vont pouvoir se dispenser d'embaucher des encadrants, et qui vont bénéficier des mesures facilitantes de ce texte. C'est un peu comme la défiscalisation, qui profite à l'aide privée aux devoirs, pour ceux qui en ont les moyens, pendant que l'on supprime des postes à l'éducation nationale.

Ce n'est sûrement pas ainsi que se créeront des emplois. Ce sont même des emplois qui vont être supprimés. Or, c'était l'un des enjeux de ce texte que de reconnaître l'engagement volontaire et le dédommager sans fragiliser l'emploi identifié.

Au discours sur l'innovation, sur la souplesse nécessaire pour favoriser l'entrée dans l'activité, vous auriez pu adjoindre un vrai travail sur l'économie solidaire, aux frontières du secteur public et du secteur marchand, aux limites du volontariat rémunéré et de l'emploi, aux marges du coopératif et du privé, mais bordé par l'éthique et la décision collective.

Au lieu de cela, vous ouvrez sans précaution au secteur marchand.

Ce faisant, vous prenez aussi le risque de fragiliser le tissu associatif et ses missions, missions au service de tous, missions qui répondent aux besoins et aux attentes de ceux qui ont moins de moyens : les « colos », les « centres aérés » ne sont pas un luxe, ce sont autant de réponses en termes de loisirs, de vie collective, de citoyenneté et de vacances pour tous.

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