Monsieur le Président, pour répondre sans tarder à votre question sur la trajectoire financière, je voudrais dire à titre liminaire que la Commission du Livre blanc doit poursuivre ses travaux dans la sérénité. Les conjectures des pronostiqueurs restent des conjectures et les bloggeurs ne sont pas les décideurs. Je ne dis pas que les choses seront faciles, mais je ne veux pas préjuger de ce que seront les arbitrages politiques qui seront rendus au plus haut niveau de l'Etat. Ce qui ne veut pas dire qu'il ne faudra pas faire des choix, car quel que soit le niveau de l'effort de défense, il faudra se replacer dans une trajectoire réaliste.
Le budget 2013 de la mission « Défense » s'inscrit en effet résolument dans la perspective, souhaitée par le Président de la République et portée par l'ensemble du Gouvernement, de revenir à 3% de déficit à la fin de l'année 2013 et à l'équilibre budgétaire à la fin du quinquennat. Lors de notre première rencontre, je vous avais indiqué dans quel état d'esprit nous abordions les négociations budgétaires : conscients de la nécessité de prendre part, à l'égal des autres missions de l'Etat, à l'effort de redressement, mais en même temps déterminés à préserver nos capacités en ce qu'elles ont d'essentiel. Cela, pour être à la hauteur d'un contexte stratégique qui nous mobilise beaucoup, mais aussi pour ne pas anticiper sur la période post-Livre blanc, qui sera celle des choix décisifs. Le budget que je vous présente aujourd'hui tient compte de ce double impératif. La défense consent un effort important, dans le contexte de contraintes fortes, mais nous tenons nos engagements en nous préservant de mesures irréversibles. C'est donc un budget de transition, dans l'attente de la future loi de programmation militaire qui suivra les conclusions du Livre blanc.
J'en profite pour rendre à nouveau hommage au travail préparatoire de votre commission sénatoriale, dont les huit rapports d'information, publiés en juillet, irriguent actuellement les travaux de la Commission avec le plus grand profit. Il y a là un travail de fond que je tenais à saluer.
Je vais évidemment entrer dans le détail du projet budgétaire. Mais je voudrais simplement souligner, en préambule, que ce budget prend également place dans un contexte européen. Des pays aussi importants que l'Espagne et le Royaume-Uni ont décidé des coupes sévères dans leur budget de défense, coupes qui ne manqueront pas d'avoir des effets sur les capacités. Pour mémoire, le budget de défense espagnol diminue de 6% en 2013 par rapport à 2012, et celui du Royaume-Uni de -8 % sur quatre ans. Sur le même sujet, j'ai été frappé lors de la réunion des ministres de la défense de l'OTAN, le 9 octobre, de constater que la quasi-totalité de mes collègues européens, et même mon homologue américain, toutes choses égales par ailleurs, étaient dans une tendance de baisse de leurs efforts de défense pour des raisons de nature budgétaire. Nous n'en sommes pas aux niveaux annoncés par certains. Je me suis attaché à préserver les crédits défense, qui sont donc stables pour 2013. Mais il est clair que le contexte est difficile pour tous en Europe, et je constate les réductions opérées par nos voisins et amis britanniques et espagnols avec d'autant plus d'inquiétude que les menaces nouvelles apparaissent sans que les menaces anciennes disparaissent. C'est dans ce contexte que la question de l'Europe de la défense se pose avec acuité. Aujourd'hui, avec nos amis européens, nous avons l'obligation d'être ambitieux. La mutualisation est plus que jamais l'une des pistes, pas la seule, qui peut nous permettre de résoudre l'équation quasi impossible entre le contexte géostratégique et la situation budgétaire.
J'en viens au coeur de mon propos, avec la présentation du budget, et je commence par vous indiquer que le plafond de ressources de la mission « Défense » tient d'abord compte des besoins de financement hérités de la programmation militaire en vigueur. La LPM 2009-2014 prévoyait une ressource de 128,8 milliards d'euros pour la période 2009-2012, mais les ressources effectives se sont progressivement écartées de la trajectoire initialement prévue. En définitive, la mission « Défense » a bénéficié de 125,8 milliards d'euros. A la fin de cette année, ce sont donc près de 3 milliards d'euros qui manqueront pour financer les besoins de la défense. Ce manque de ressources est corroboré par les travaux de la Cour des comptes qui évaluaient la perte à 4,1 milliards d'euros mais en incluant une année de plus, donc 2009-2013.
Cette divergence entre les ambitions et les moyens finalement alloués, entre l'affichage et la réalité concrète, a généré un certain nombre de difficultés dans la mise en oeuvre des contrats opérationnels tels qu'ils avaient été définis par le Livre blanc de 2008.
L'autre logique qui a présidé à la définition de ce budget, c'est donc la détermination de la Défense à participer de façon équitable à la politique de maîtrise de la dépense publique qui est portée par l'ensemble du Gouvernement. L'objectif est bien une stabilisation stricte en valeur de la dépense de l'Etat, hors charge d'intérêt de la dette et hors contribution aux pensions des fonctionnaires. Le budget de la Défense réalise cette stabilisation des crédits. Concrètement, les ressources totales pour 2013, 31,4 milliards d'euros, sont identiques à celles de 2012.
Comme vous le savez, un projet de loi de programmation a été déposé en parallèle, qui prévoit le rétablissement de nos finances publiques en 2017. Les crédits budgétaires de la Défense seront stables jusqu'en 2015. Il s'agit d'une donnée d'entrée qui a été portée à la connaissance de la commission chargée du Livre blanc. A elle, ensuite, de faire des propositions y compris sur la trajectoire financière de la Défense. Le gouvernement n'a pris à ce stade aucune orientation financière de long terme, hormis ce budget pour 2013 et ce projet de loi de programmation.
Le Président de la République avait annoncé 10 milliards d'euros d'économies pour 2013 sur les dépenses publiques. Nous y contribuons à hauteur de 2,2 milliards d'euros. Ces économies correspondent à une diminution de nos besoins de paiements par rapport à la trajectoire prévue en programmation.
Dans cette perspective, les armées et les services du ministère se sont mobilisés pour identifier des sources d'économies réalisables en 2013, sans compromettre l'avenir. Nous en avons identifié trois.
Nous allons d'abord faire des économies sur le fonctionnement courant. Les dépenses en la matière diminuent de 7 % entre 2012 et 2013, ce qui place le ministère de la défense dans le strict respect de la règle fixée par le Premier ministre pour l'ensemble des administrations de l'Etat. Cela, je le précise car c'est une autre nécessité, sans compromettre le fonctionnement opérationnel de nos armées. Ainsi, les subventions pour les opérateurs ont été révisées à la baisse. Il en va de même du parc de véhicules légers de la gamme commerciale du ministère réduit à 13 000 véhicules d'ici 2014. Les dépenses de communication sont diminuées de près de 10 %.
Efforts, ensuite, sur la masse salariale, hors pensions et hors opérations extérieures (OPEX), qui est maîtrisée et diminue de 0,7 % entre 2012 et 2013. C'est la baisse des effectifs, conformément à la loi de programmation encore en vigueur, qui prévoit 7 234 suppressions d'emploi nettes en 2013. Cette contrainte ne nous interdit pas de définir des priorités. C'est ainsi que l'on crée 164 postes pour la fonction « connaissance et anticipation » et la cyberdéfense. Ce sont en effet deux priorités qui doivent être renforcées et je suis convaincu qu'elles le seront dans les années qui viennent.
Sur la masse salariale, je voudrais ajouter que les dépenses de personnel ont été budgétées avec sincérité. Les 11,2 milliards d'euros de masse salariale, hors pensions et hors opérations extérieures, correspondent au même montant qu'en 2012 mais avec des effectifs qui auront été diminués en 2013. Le ministère obtient donc cette année des crédits fixés au juste niveau. Il met fin à plusieurs années de sous-évaluation de la budgétisation des crédits de titre 2, qui se traduisait nécessairement par des compléments de ressources de la masse salariale en cours d'année. Ce sera encore le cas cette année.
Pour les militaires, l'ajustement portera inévitablement sur la pyramide des grades. Ces dernières années, il y eut un renforcement des grades les plus élevés. Nous devons réexaminer ces évolutions, notamment au regard de l'allongement de la durée des carrières. Je suis bien conscient de l'importance que revêt l'avancement pour la communauté militaire. Pour elle, l'accession au grade supérieur représente la reconnaissance des mérites et du travail accompli. C'est la traduction concrète de l'ascension sociale qui fait aussi la force de nos armées. C'est pour cela que j'ai obtenu, dès à présent, que les décrets d'avancement 2012 ne soient pas remis en cause.
S'agissant des tableaux d'avancement pour 2013, le flux d'avancement sera réduit par rapport à 2012. Mais le volume de réduction pour 2013 n'est pas fixé à 30 % pour tous, car il ne s'agit à ce stade que d'un plafond qui n'est en aucun cas une mesure de portée générale. Ce volume ne sera définitivement fixé qu'à l'issue d'une étude, confiée conjointement à l'Inspection générale des finances et au Contrôle général des armées, qui nous donnera une vision objective de la situation pour 2013. Cela veut dire que les commissions d'avancement se réuniront dans les semaines à venir selon la procédure normale, afin que leurs travaux débouchent sur la publication des tableaux d'avancement en fin d'année, comme à l'accoutumée en poursuivant le processus de « dépyramidage ».
Un effort particulier en ce sens est prévu pour 2013. Je sais être en mesure de respecter le budget global 2013 tout en préservant le niveau d'avancement nécessaire pour que les dossiers de tous ceux qui peuvent prétendre au grade supérieur puissent être examinés de manière équitable et juste.
Ici, permettez-moi de faire un aparté. Je voudrais profiter du volet ressources humaines pour vous dire quelques mots du logiciel « Louvois », qui devait permettre au ministère de la défense de simplifier le processus de gestion des ressources humaines et la fonction solde. A l'occasion de plusieurs déplacements récents dans les forces - en particulier au troisième régiment d'infanterie de marine et au quatre-vingt-troisième régiment de montagne de Varces, j'ai pu constater que ce n'était pas le cas. J'ai rencontré des gens désemparés, pris dans des situations abracadabrantes. J'ai pris toute la mesure des dysfonctionnements, dans le paiement des soldes, qui sont inacceptables. A l'origine des problèmes, il y a trois raisons : bien sûr le logiciel lui-même qui bogue plus souvent qu'à son tour; ensuite, alors que la marine a basculé relativement bien, l'armée de terre a rencontré plus de problèmes, avec de nombreux dossiers laissés en plan pour privilégier la mise en oeuvre du logiciel ; enfin au même moment, la mise en oeuvre des bases de défense a été menée tambour battant, la défense n'étant pas prête à supporter toutes les réformes, et la perte des repères consécutive a ralenti la remontée des informations et l'identification des dysfonctionnements. Sans plus tarder, j'ai décidé des mesures très fortes, par un plan d'action qui va permettre, par la mise en place d'un numéro vert, d'un groupe d'utilisateurs, de dispositifs de contrôle, surtout par le renforcement du centre de Nancy avec d'anciens soldiers, de donner un coup d'accélérateur aux 10 000 dossiers qui sont toujours en attente de régularisation. Je vais à nouveau effectuer une visite sur le sujet demain à Rambouillet. Je voulais vous en parler parce que, dans un contexte difficile pour les hommes et les femmes de la défense, nous devons être vigilants sur tous les points où l'institution pourrait manquer de respect à leur égard. Ne pas arriver à payer à temps un soldat qui rentre d'Afghanistan, c'est bien une question de manque de respect. Cela va donc changer. Je vais y veiller. J'ajoute que lors de mes derniers déplacements, notamment sur la base de défense d'Orléans-Bricy, d'autres sujets sont apparus, comme le remboursement des frais de mission, ou la mise à jour des dossiers de retraite. Ce sont autant de sujets sur lesquels il faut être particulièrement vigilant. Je le suis, comme je suis déterminé à tout mettre en oeuvre pour régler ces difficultés.
Je reviens aux sources d'économies réalisables pour dire que nous ferons porter nos efforts également sur les équipements. Près de 5,5 milliards d'euros de commandes prévues en 2012 et 2013 ont été décalées, dont près de 4,5 milliards d'euros sur les seules opérations d'armement, hors la dissuasion qui, conformément à l'engagement du Président de la République, est préservée. Mais là encore, les aménagements retenus permettent de limiter la dépense de l'Etat en 2013 sans remettre en cause les contrats en cours, ni anticiper les choix qui sortiront du nouveau Livre blanc et de la future LPM. Ces décalages ne sont pas irréversibles tant sur le plan industriel que sur le plan capacitaire. Certains reports sont des mesures techniques pour lisser nos dépenses. Ainsi le quatrième Barracuda est reporté de quelques mois, sachant que cette décision n'obère pas le plan de charge de DCNS. D'autres reports sont étroitement liés aux choix qui nous seront proposés par le nouveau Livre blanc. Il s'agit notamment du programme Scorpion, de modernisation de l'ensemble des véhicules blindés de l'armée de terre ; sa commande est reportée mais sans conséquence industrielle majeure. C'est un ensemble de mesures décalées de six mois ou un peu plus qui nous permettent de faire des économies dès cette année.
Voilà les efforts d'économie que nous engageons, pour inscrire ce budget dans une trajectoire qui est cohérente avec la programmation en cours et à venir, mais aussi avec la politique de maîtrise de la dépense publique du Gouvernement.
Mais les efforts, c'est aussi ceux que nous déployons pour garantir, dans un contexte difficile, les ressources qui sont essentielles à nos armées comme aux services du ministère. Ici, nous avons déterminé un certain nombre de priorités. Avec vous, je voudrais détailler celles qui nous ont semblé les plus cruciales, concernant l'activité et l'équipement des armées.
Le financement de l'entraînement et de l'activité opérationnelle des forces, d'abord, est une priorité que nous avons souhaité renforcer, à un moment où le désengagement d'Afghanistan va avoir des conséquences importantes dans ces domaines. Il est primordial que le niveau de préparation opérationnelle que les unités ont acquis en opérations extérieures soit préservé. Les crédits d'entretien du matériel, de fonctionnement opérationnel et de carburant progressent ainsi de près de 300 millions d'euros par rapport aux crédits de 2012. C'est un choix, une volonté que j'ai tenue à manifester dans cette décision très significative qui vise donc à préserver le taux d'activité des unités et le taux de disponibilité des matériels.
Ainsi, le financement de jours de préparation opérationnelle de l'armée de terre supplémentaires, pour compenser la moindre activité opérationnelle liée au désengagement progressif d'Afghanistan, est assuré. L'armée de terre bénéficiera de 105 jours de préparation et d'activité opérationnelle, soit exactement comme en 2009.
Dans le même esprit, nous maintenons la provision budgétaire pour les opérations extérieures. La France est actuellement engagée dans une vingtaine d'OPEX. Vous savez que les surcoûts générés par ces opérations sont provisionnés en partie dès la construction du budget. La dotation qui les finance partiellement est maintenue pour 2013, ce qui représente 630 millions d'euros. J'ai souhaité maintenir ce mode de financement, complété en gestion par abondement interministériel, afin de ne pas réduire les dépenses d'équipement du ministère. Toutes choses égales par ailleurs, les surcoûts OPEX devraient s'élever à 870 millions d'euros en 2012.
Le ministère de la défense reste également attaché à la poursuite de la modernisation des équipements des armées. C'est l'autre grande priorité, à côté de l'activité opérationnelle des forces. D'autant qu'il y a là des enjeux globaux qui touchent aussi l'économie, l'emploi, c'est-à-dire nos territoires.
L'effort d'équipement du ministère, qui est le premier investisseur public, bénéficie d'abord de plus de 16 milliards d'euros de crédits de paiement. Je tiens à signaler que ce montant est stable par rapport à 2012 en dépit du contexte budgétaire. Cette dotation permet ainsi de financer, sans modification majeure, la plupart des besoins de paiement que nous héritons des programmes déjà lancés, notamment dans le cadre du modèle d'armées et de la réforme du ministère définis en 2008.
Le budget 2013, comme je vous l'ai dit, est un budget de transition. Dans ce contexte particulier, il ne fallait pas prendre de mesure irréversible, c'est-à-dire éviter de passer des contrats lourds irréversibles qui reviendraient à réduire les marges de manoeuvre du Livre blanc, mais aussi ne pas mettre durablement à mal notre capacité industrielle, à laquelle je suis très attaché comme vous le savez, ou ne pas générer de rupture capacitaire pour nos forces. C'est pour cela que 19 milliards d'euros d'autorisations d'engagement au profit de l'équipement ont été prévus pour passer, en 2013, les commandes indispensables à notre dissuasion et nos capacités militaires essentielles, cela en tenant compte de la situation des industries et de l'emploi.
De la même façon, ce budget préserve pour l'essentiel les dépenses d'avenir. Le ministère continuera de susciter et d'accompagner l'innovation industrielle et technologique en finançant la Recherche & Développement à hauteur de 3,3 milliards d'euros en 2013. Les crédits dédiés aux études amont, y compris ceux de la dissuasion, progressent même de 10 % entre 2012 et 2013 pour s'établir à 750 millions d'euros environ. Nous contribuons ainsi pleinement à la politique de croissance et de compétitivité du Gouvernement. Dans une période où nous devons trouver des économies, il est plus que nécessaire, il est vital de préserver les dépenses d'avenir. Ces crédits sont notre avenir, pour notre industrie, pour nos armées, pour nos emplois, pour notre compétitivité.
Dans cet esprit, j'ai donc souhaité maintenir l'effort sur les crédits de recherche et de technologie, car il y va de la compétitivité de notre base industrielle. Mais j'ai aussi préservé les volumes financiers consacrés au soutien des PME. C'est un sujet qui me tient à coeur et je travaille activement au smart business act de défense que je publierai en fin d'année. Nous soutenons activement tous les dispositifs en faveur des PME. Je pense notamment à RAPID, le régime d'appui pour l'innovation duale, qui permet aux PME de soumettre spontanément leurs projets technologiques innovants, en particulier ceux qui présentent des applications sur les marchés militaires et à la fois des retombées sur les marchés civils. 40 millions d'euros y sont consacrés.
J'ai enfin maintenu un certain nombre de commandes dans des secteurs qui sont aujourd'hui incontournables. Je voudrais simplement en mentionner quelques-unes : j'ai notifié le programme CONTACT peu de temps après ma prise de fonctions, pour améliorer ce qu'on appelle la « numérisation des forces terrestres ». J'ai maintenu intégralement, comme l'a souhaité le Président de la République, le volume consacré aux différentes composantes de la dissuasion. J'ai maintenu le calendrier du programme MRTT qui vise au renouvellement de nos avions ravitailleurs qui atteignent un état de vétusté auquel il est impératif de remédier. C'est par ailleurs un jalon important de notre démarche européenne, les opérations en Libye nous ayant permis de constater un déficit européen en matière de ravitaillement. J'ai maintenu les commandes des hélicoptères NH-90, indispensables au renouvellement de notre capacité aéromobile. J'ai maintenu les crédits qui nous permettront en 2013 de commander des drones, notamment le drone MALE intermédiaire dont nous avions beaucoup parlé, mais aussi les systèmes de drones tactiques. J'ai maintenu les actions de modernisation de nos forces et en particulier la commande du système d'information des armées, particulièrement ambitieux, et je poursuis les acquisitions de satellites de communication ou d'observation.
Et nous continuerons, bien évidemment, à livrer des équipements performants pour nos forces. En effet, j'ai demandé de ne pas étaler les livraisons déjà prévues. Ainsi, en 2012, nous recevrons la FREMM Normandie et j'aurai d'ailleurs le plaisir de présider jeudi la cérémonie de mise à l'eau avec Pierre Moscovici. En 2013, nous recevrons les premiers avions A400M, 3 systèmes de drones tactiques, 4 nouveaux hélicoptères Tigre...
J'ai voulu d'autre part que l'accompagnement des restructurations soit préservé dans les arbitrages budgétaires. D'abord, je tiens à dire que la liste des sites restructurés que j'ai validée le 31 juillet est une décision dont je mesure tous les enjeux. D'abord pour les hommes et les femmes concernés, pour la défense, mais au-delà, pour ceux de nos territoires qui sont touchés. Lorsque nous prenons de telles décisions, c'est que nous n'avons pas le choix. Il faut le garder à l'esprit.
C'est en tout cas pour cette raison que le ministère de la défense, dans le cadre des mesures de dissolution, de réorganisation et de transfert des unités et établissements qui ont été prises en application de la LPM 2009-2014, met en oeuvre un dispositif d'accompagnement économique et social des restructurations, qui constitue un effort financier conséquent. Ainsi, dans le cadre des contrats de redynamisation des sites de défense (CRSD) et des plans locaux de restructuration (PLR), les collectivités territoriales les plus touchées par les restructurations de la Défense bénéficient d'un fonds de 320 millions d'euros, financé à concurrence des deux tiers par le ministère de la défense.
Pour conclure sur cette présentation budgétaire, j'insisterais donc sur les économies que nous devons réaliser, pour nous conformer aux ressources disponibles dans un contexte difficile. Ces économies, vous l'avez compris, le ministère les assume, pour que le passif budgétaire ne pèse plus sur nos choix d'avenir. Il est de ma responsabilité de garantir au Président de la République les moyens de refonder, à partir des conclusions du nouveau Livre blanc, une stratégie de défense qui accorde enfin ambitions et moyens.
Je m'en tiens là pour la présentation du budget de la défense pour 2013. Je répondrai bien sûr à toutes vos questions sur ce sujet.
Pour répondre à votre question sur l'affaire EADS-BAE, lorsque s'est produite la fuite qui a provoqué l'annonce du projet de fusion, ma position initiale était, au départ, circonspecte, en tous cas sur sa dimension « défense ». J'ai posé beaucoup de questions sur la façon dont serait préservée la sécurité de notre outil de dissuasion, ainsi que sur le risque de dilution de MBDA et de la filière missile européenne dans ce grand ensemble. Il était indispensable que nous puissions préserver nos intérêts nationaux. Ces interrogations étaient d'autant plus fortes que le pôle défense de ce nouveau groupe aurait été dominé par BAE et que cette société réalise la moitié de son chiffre d'affaires aux Etats-Unis. En revanche, je n'avais aucun doute, qu'en ce qui concerne la complémentarité entre les « activités civiles » et militaires cette fusion avait industriellement beaucoup de sens. Je dois dire que, même du point de vue « défense » qui est naturellement le mien, j'ai évolué d'autant que, dans les derniers moments de la négociation, nous avons obtenu des entreprises des garanties très satisfaisantes pour la préservation de nos intérêts dans la dissuasion et les missiles. Aussi ai-je regretté l'arrêt brutal de cette négociation, qui n'est pas le fait du gouvernement français. Sans doute la brièveté du délai n'a-t-elle pas favorisé les choses. Le fait est qu'aujourd'hui le dossier est clos.
Sur l'Afghanistan, les enjeux portent, pour moi, dans l'immédiat sur les conditions de sécurité maximum qui doivent entourer le retrait. Mais Laurent Fabius et moi-même vous en dirons plus le 20 novembre prochain lors de notre audition sur ce sujet.
Au Mali, il y a des faits nouveaux qui permettent de dire que nous sommes entrés dans une nouvelle phase. L'intervention forte du Président de la République aux Nations unies en particulier a amené une prise de conscience internationale des dangers de la situation. L'objectif est que le Mali retrouve son intégrité territoriale et que l'on empêche les groupes jihadistes et terroristes de poursuivre leur expansion et leur enracinement. Une initiative des ministres de la défense européens à Chypre le 26 septembre, entérinée ce lundi 15 octobre par le Conseil des affaires étrangères de l'Union, a lancé le principe d'une intervention militaire de la PSDC pour la formation, l'entraînement et le soutien des forces armées maliennes, ainsi que d'un soutien pour la force des pays africains qui souhaitent contribuer à la stabilisation du Mali. Il s'agit d'expliquer, de former et d'assurer la logistique. Il reste quarante cinq jours aux Etats de la Communauté de l'Afrique de l'Ouest et de l'Union africaine pour planifier une telle action et soumettre ce projet au Conseil de sécurité des Nations unies.