Merci pour ces mots d'accueil. Dans une vie politique, on est plus souvent élu que ministre. Quelles que soient mes responsabilités actuelles, je me souviens que j'ai été parlementaire et j'espère le redevenir un jour : raison de plus pour être respectueux du Parlement. Quant à mon champ de compétences, je rappelle que les décrets d'attribution me confient la responsabilité des comptes sociaux.
Certains souhaitaient que le traité européen soit renégocié avant d'être soumis au Parlement. Dès lors qu'il a été complété, j'en juge les termes acceptables. Le contexte européen a changé. Premier élément : le plan de relance européen de 240 milliards d'euros qui sera mis en oeuvre notamment par la Banque européenne d'investissement. Celle-ci pourra, certes pour un faible montant, émettre des project bonds, ce qui n'allait pas de soi il y a quelques mois. La Banque centrale européenne a lancé son programme d'opérations monétaires sur titres (OMT), autrement dit le rachat sans plafond de dette à court terme d'États de la zone euro ; reste à faire de même pour les emprunts à long terme. La Cour constitutionnelle de Karlsruhe a validé la démarche institutionnelle. Les taux se détendent dans les pays du sud de l'Europe et la France emprunte à long terme à des taux historiquement bas, ce qui nous accorde un répit pour procéder à un ajustement budgétaire résolu - c'est ce à quoi s'emploie le projet de loi de finances initiale.
Le projet de loi organique vous est connu, je n'entrerai pas dans les détails. Permettez-moi seulement de dire ce que ce texte n'est pas. D'abord, ce n'est pas un abandon de souveraineté de la France à quelque institution ou organisme supranational, ce qui explique que nous vous présentions non pas une réforme constitutionnelle mais une loi organique. Ensuite, ce texte ne fixe que des règles de procédures : il ne contraint en rien sur le fond le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif, qui restent maîtres de leurs choix. La souveraineté du Parlement n'est en rien altérée. Ce qui ne veut pas dire que cet outil commun soit sans importance, loin s'en faut. La clé de voûte en sera le Haut Conseil des finances publiques, dont la composition, telle qu'imaginée par le Gouvernement et complétée par l'Assemblée nationale, garantit l'indépendance. Ses avis ne s'imposeront pas au Gouvernement ni au Parlement, mais qui peut imaginer qu'ils ne soient pas suivis ? Ce conseil aura de fait une force considérable, tout en respectant les prérogatives de l'exécutif et du législateur.
Le projet de loi organique indique quelles seraient les cordes de rappel au cas où les finances publiques ne suivraient pas la trajectoire souhaitée par le Gouvernement et décidée par le Parlement. Nous n'avons pas souhaité de réforme constitutionnelle, car nous estimons que la volonté politique doit l'emporter. Il n'y a pas lieu de se méfier par principe d'un gouvernement, quel qu'il soit, ou du Parlement. C'est un appel à la responsabilité collective. Il y a un quasi-consensus pour dire que le rétablissement de nos finances publiques est un impératif absolu. Il y va de la souveraineté nationale, du respect de la parole de la France. Notre endettement, véritable impôt à la naissance, est un handicap insupportable en termes de compétitivité. L'assèchement des liquidités empêche l'investissement dans le secteur productif. Le désendettement entraînera une détente des taux, y compris pour le secteur privé.
Voilà donc l'outil qui est proposé à votre assemblée. J'espère ardemment que ce texte sera adopté, dans des termes qui feront que personne, à l'intérieur mais surtout hors de nos frontières, ne pourra douter de notre volonté de rétablir les finances publiques.