Les critiques de M. Emorine concernent la loi de finances pour 2013, non le projet de loi organique. La moyenne des prévisions de croissance des économistes pour 2013 est de 0,3 %, certains envisagent un recul de 0,7 % tandis que d'autres prévoient une croissance de 1,3 %. Je m'étonne toujours que l'on pare de toutes les vertus du consensus ce qui n'est qu'une moyenne entre des prévisions divergentes. Accordons de la valeur à ce chiffre, mais pas au-delà de ce qu'il mérite.
A défaut de nouvelles citations d'auteurs antiques, je me réfèrerai aux propos de Mathilde Lemoine, chef économiste à la banque HSBC, qui a aussi exercé des responsabilités à Matignon lorsque M. de Villepin était Premier ministre. Ces dernières années, elle s'est rarement trompée dans ses prévisions. Or elle annonce 0,9 % pour 2013. Vous rétorquerez que cela m'arrange. Certes. Mais accordons une valeur relative au « consensus des économistes ».
La loi de finances pour 2013 prévoit la suppression de 2 317 postes dans la fonction publique d'État. En outre, la masse salariale augmentera de 0,2 %, contre 1,2 % en 2007, 0,7 % en 2008, 1 % en 2009, 0,7 % en 2010, 0,5 % en 2011. Nous ferons mieux l'an prochain que durant les cinq années de la précédente législature. Certaines critiques méritent donc d'être nuancées. Si nous sommes laxistes avec 0,2 %, comment qualifier nos prédécesseurs ?
Ne méconnaissez pas l'article 34 de la Constitution, Mme Des Esgaulx : l'objectif d'équilibre des comptes y figure déjà, du fait d'une révision que vous avez votée. Faut-il faire du Conseil constitutionnel le censeur ex post de la loi de finances ? Je n'ai pas eu l'impression que le juge constitutionnel réclamait cette prérogative, non pas parce qu'il ne disposerait pas de moyens d'expertise suffisants, mais parce qu'il estime, n'ayant pas la légitimité du suffrage populaire, qu'il n'est pas dans son rôle de censurer une politique économique.
Faut-il créer un Conseil indépendant ? Oui, l'article 3 du traité est explicite, M. Dallier : il n'y a pas de marge de manoeuvre. Dès lors qu'il n'y a pas de jugement ex post, il faut bien une structure qui dise ex ante si la politique budgétaire et financière proposée par le Gouvernement est en adéquation avec la trajectoire de retour à l'équilibre telle qu'adoptée par le Parlement. Le Haut Conseil ne prescrira pas de recettes économiques mais se prononcera sur la cohérence entre les textes. Il aura à sa disposition les administrations d'État, comme les services de la Cour des comptes dans leurs travaux d'audit.
Fallait-il retenir la Cour des comptes comme l'organisme indépendant mentionné à l'article 8 ? Je ne le crois pas : son rôle est défini par la Constitution. Elle est une juridiction. Ses méthodes de travail impliquent le contradictoire et le délibéré. Comment pourrait-elle se prononcer en deux ou trois semaines avec des procédures si lourdes ? En outre, il y aurait conflit d'intérêt puisqu'elle se prononcerait avant et après le projet de loi de finances : autant mettre tout de suite le Gouvernement et le Parlement en congé pour la laisser régner seule ! Enfin, je comprends assez mal la position de M. Karoutchi : la Cour des comptes ne réclamait pas ce rôle.
Nous ne nous laissons pas aller à la facilité. Le solde structurel, certes, n'est pas d'une vérité mathématique absolue, mais le solde nominal non plus, qui dépend des règles de la comptabilité nationale et des décisions d'Eurostat. Il y a, dans l'un et l'autre cas, une part de convention.
Merci à M. Hervé pour ses appréciations. Le fait de regrouper sous une même responsabilité gouvernementale les comptes de l'État et ceux de la sécurité sociale date de 2007 : il s'agit d'une initiative heureuse et cet usage va sans doute se pérenniser.