Intervention de Vincent Peillon

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 30 octobre 2012 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2013 — Audition de M. Vincent Peillon ministre de l'éducation nationale et de Mme George Pau-langevin ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale chargée de la réussite éducative

Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale :

Je suis heureux de vous présenter, avec George Pau-Langevin, le budget de l'année 2013, même si nous avons déjà eu l'occasion de nous rencontrer récemment. Je me réjouis en outre, compte tenu des événements récents, que vous receviez prochainement Éric Debarbieux, à qui a été confiée la délégation ministérielle chargée de la prévention et de la lutte contre les violences en milieu scolaire.

Ce budget est cohérent avec la loi de finances rectificative adoptée en juillet dernier. Il concrétise la priorité donnée à l'éducation nationale annoncée par le Président de la République. En effet, grâce à la concertation achevée il y a moins d'un mois, permise par l'implication de beaucoup d'entre vous au-delà des clivages politiques traditionnels, le chef de l'État a fixé le cap des années à venir et confirmé la priorité budgétaire en faveur de l'éducation. Il était temps, car depuis des années, l'éducation nationale a souffert d'un abandon matériel, intellectuel et moral. Il nous faut désormais la replacer au coeur de la République.

Ainsi, le budget de l'éducation nationale s'élève désormais à 62,7 milliards d'euros, ce qui représente une augmentation de 2,92 %. Hors charges de pension, cela signifie une progression de 0,6 % pour l'année 2013, soit 280 millions d'euros. L'état des finances publiques impose de stabiliser les dépenses de l'État en valeur : nous envoyons dès lors un signal fort.

Le Sénat avait eu la primeur de l'annonce de 43 000 recrutements d'enseignants en 2013. Ces postes seront créés par la voie du concours normal, pour lequel la période d'inscription vient de s'achever, mais également par la voie d'un concours exceptionnel, pour lequel les inscriptions auront lieu après Noël, dans la perspective d'un recrutement en juin. Ce second concours est nécessaire. Il est paradoxal que ces recrutements aient suscité une polémique, alors que je reçois sans cesse de nouvelles demandes sur les postes de réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED), sur la formation des enseignants ou sur les disciplines déficitaires. La France manque d'enseignants, c'est une réalité cruelle. Notre taux d'encadrement, surtout dans le primaire, est faible et se détériore depuis des années. Il nous faut en même temps recomposer la formation des enseignants : c'est l'ambition des écoles supérieures du professorat et de l'éducation d'une part ; de l'organisation d'autre part, à l'attention des enseignants reçus dès le mois de juin prochain à ce second concours, d'une année de formation rémunérée à hauteur de 900 à 1 000 euros, incluant une présence sur le terrain de six heures seulement. Cela correspond à la création pour cette année de 8 281 postes, auxquels nous rajoutons 500 postes de non-enseignants.

Le budget pour 2013 s'inscrit dans une programmation triennale, afin d'asseoir notre action dans la durée. Plus que toute autre politique publique, la nôtre a besoin de temps, de sérénité et de persévérance. Le budget de l'éducation nationale augmentera encore de près de 400 millions d'euros en 2014 et de 500 millions d'euros en 2015. La consommation des moyens est essentiellement consacrée à la mise en place de cette nouvelle formation des enseignants. Votre collègue Jean-Pierre Chevènement me confirmait encore tout à l'heure au téléphone qu'il s'agissait de l'élément le plus fondamental de la loi d'orientation et de programmation dont nous aurons à discuter prochainement.

Les moyens qui ne concernent pas les postes de professeurs sont majoritairement consacrés aux auxiliaires de vie scolaire, dont la mission consiste à aider les enfants atteints de handicap. Afin de respecter notre promesse républicaine et de reconstituer notre vivier de recrutement, ce budget prévoit crée 6 000 emplois d'avenir professeurs dès la rentrée de janvier. Il en sera créé autant en 2014 et en 2015, à condition que nous puissions pérenniser ce dispositif dans notre budget. Au titre de 2013, 31 millions d'euros lui sont consacrés.

Pour la rentrée 2013, en dehors de la reconstitution de la formation des professeurs, les créations de postes seront ciblées selon les priorités affichées depuis le début et partagées par tous : d'une part, sur l'accueil des enfants de moins de 3 ans, pour lequel une attention particulière sera portée aux zones urbaines ou rurales connaissant les tensions les plus vives ; d'autre part, sur la transformation pédagogique, qui consiste à disposer de plus de maîtres que de classes. Ce principe, mis en place dès la rentrée en fonction des moyens disponibles, sera également ciblé sur les zones en difficulté.

Les crédits d'intervention du ministère sont préservés. Ils financeront à hauteur de 539 millions d'euros, soit 15 % de plus que l'année précédente, les bourses nationales d'études destinées aux familles défavorisées dont les enfants sont inscrits dans un établissement du second degré. Les fonds sociaux sont maintenus au niveau de la loi de finances pour 2012, qui les créditait de 30 millions d'euros. Les crédits dédiés à l'assistance éducative et aux contrats aidés sont revalorisés à hauteur de 115 millions d'euros. Soucieux de la situation des contrats aidés mis en place pour soutenir les directeurs d'école, nous avons alerté le ministère du travail qui gère ces contrats. Les directeurs d'école ont une tâche très difficile, et les réductions de ces contrats ont eu sur eux un impact très négatif. En dépit de la création par la loi de finances rectificative de 1 500 postes d'auxiliaires de vie scolaire individualisés, et de la circulaire ciblée sur les enfants handicapés que j'ai envoyée aux recteurs en début d'année, quelques milliers d'entre eux n'ont pas pu être accueillis. Cette situation est indigne. Nous avons évidemment inscrit au budget le financement des 12 000 contrats aidés maintenus à la rentrée. Les assistants d'éducation et les 500 postes d'assistants de prévention et de sécurité nouvellement recrutés ont été formés. J'irai installer publiquement le premier de ceux-ci à Amiens à la fin des vacances de la Toussaint. Tous sont bien sûr intégrés en année pleine dans le budget 2013.

En revanche, et je me réjouis que nous soyons aussi exemplaires, notre budget de fonctionnement est soumis aux mêmes règles que les autres ministères : il baissera en 2013 de 5 %. C'est un effort considérable, compte tenu de la baisse de 25 % déjà enregistrée par ce poste sur la période 2007-2012, et nous le poursuivons. Nos opérateurs sont soumis aux mêmes règles d'économies. Le seul poste non concerné par ces réductions est celui de l'économie numérique : nous avons en effet là un retard préoccupant à rattraper. La dotation qui lui est consacrée passe de 3,6 millions à 10 millions d'euros. Je tiens à votre disposition le détail des opérations que nous menons avec la Caisse des dépôts et consignations, le commissariat à l'investissement, et bientôt, je l'espère, avec le fonds européen de développement régional (FEDER).

Nous allons fixer nos priorités d'allocations de moyens. Elles concernent d'abord les remplacements : vous connaissez les nouvelles difficultés que connaît la Seine-Saint-Denis actuellement, où le vivier de remplacement pour plusieurs centaines de postes est déjà entièrement consommé. Y remédier est un impératif pour garantir la continuité du service public et répondre aux soucis majeurs des familles et des enfants. Il s'agit également de l'accueil des tout petits, en vertu du principe « plus de maîtres que de classes ». Dans le second degré, nous mettrons les moyens dont nous disposons en priorité dans les établissements les plus défavorisés et professionnels, au front de la difficulté sociale et scolaire.

Le temps viendra, rapidement, de la loi d'orientation et de programmation sur la refondation de l'école. Nous sommes au stade des consultations nécessaires avant la finalisation du texte. Celui-ci sera présenté au conseil des ministres avant Noël. Nous devrions avoir l'occasion d'en débattre au premier semestre 2013. Elle portera sur cinq ans, non par obsession du quantitatif, mais bien au contraire pour assurer la réussite de tous.

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